« Il n’y a pas de vent favorable pour celui qui ne sait où il va ! »
Sénèque - Artiste, Dramaturge, Homme d'état, Philosophe ( - 65)
Quand le vent tourne, le navigateur a au moins deux possibilités. La première est de maintenir l’allure avec la conséquence de changer de cap. La deuxième est de changer d’allure avec l’objectif de maintenir le cap. Les deux choix comportent chacun avantages et inconvénients. Une autre possibilité serait de changer d’allure et de cap pour des raisons qui seraient sans doute étrangères au changement de direction du vent…
Le premier choix évitera au marin l’effort d’avoir à régler ses voiles. Il lui suffit d’incliner la barre et le tour et joué. Ce choix a l’avantage de ne pas changer la vitesse du navire si l’intensité du vent reste constante (au delta près notamment de l’incidence aux vagues qui pourrait varier). L’inconvénient majeur est que le temps à destination n’est plus le même. Un changement de trajectoire peut raccourcir ou rallonger la navigation. En d’autres termes, ce que l’on gagne en efforts peut se transformer en un gain de temps complémentaire (temp moindre à destination) ou en une perte de temps globale (temps de navigation plus long).
Les marins sauront que le deuxième choix a ses limites notamment lorsque l’on prend le risque de finir face au vent. Changer d’allure demande un effort soit pour ajuster les voiles soit pour les changer dans certains cas (affaler un spi par exemple). Le changement d’allure impacte la vitesse en plus ou en moins principalement suivant l’allure du navire avant le changement de direction du vent. Le changement d’allure permet de maintenir le cap mais pas nécessairement le temps de navigation.
On comprend bien que le marin analyse la situation avant de prendre l’une ou l’autre de ces décisions. Bon nombre d’éléments seront pris en compte. Est-il en promenade ou en régate ? Est-ce le matin ou le soir ? Sur quel plan d’eau navigue-t-il ? Peut-il prévoir une bascule ultérieure ? Veut-il privilégier le confort ou la performance… ? Suivant le contexte, sa décision aura un impact (ou pas) sur son heure d’arrivée au port, au mouillage ou sur la ligne d’arrivée.
Voilà une démonstration d’une célèbre citation : « Il n’y a pas de vent favorable pour celui qui ne sait où il va ! ». C’est aussi une illustration simplifiée de ce qu’est une stratégie. Elle vous mènera (ou pas) à votre objectif, dans un certain temps, en consommant plus ou moins de ressources. La stratégie se compose des processus d’analyse de la situation initiale, d’identification et d’évaluation des options, de décision (choisir donc exclure…), d’exécution, de contrôle. Ces processus sont itératifs et soumis à révisions régulières.
« Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise stratégie, à priori »*. Il y a des stratégies qui assemblent des arguments logiques valides et solides (validity and soundness) et d’autres plus farfelues qui ne tiennent même pas compte du sens du vent ni de l’endroit où se trouvent les cailloux.
Dans l’entreprise la stratégie peut être un plan qui consiste à créer et à capturer de la valeur aux fins de faire des profits. La création de valeur se traduit par des clients qui payent davantage un produit ou un service que ce qu’il ne coûte à fabriquer. Le processus de capture de la valeur est le processus qui garantit qu’une partie de la valeur créée soit captée par l’entreprise. Les leaders ont besoin de comprendre clairement l’intérêt de la stratégie pour trois raisons : investir à bon escient, décider de l’allocation des ressources, partager leur compréhension des enjeux avec les équipes et ainsi développer un élément critique du leadership.
C’est par exemple très important pour ne pas arriver trop tard au Yacht Club ou au bistrot du port et ainsi éviter d’avoir son équipage à dos.
Bon vent !
*Citation : Les Fondements de la Stratégie - Dunod