Investir dans la diaspora africaine, la meilleure preuve de rupture avec la Françafrique !
J’entends et souscris au discours du Président Macron en faveur de la nécessité et l’opportunité pour la France de rompre avec la Francafrique. J’entrevois la vision mais où est la stratégie de rupture ?
La France doit se persuader que le territoire naturel pour marquer la rupture avec les stigmates de son passé colonial africain, tient à sa capacité à engager les diasporas africaines présentes sur son territoire, comme acteurs clés de stratégies de codéveloppement restant à redessiner. Dans ce domaine, les aspirations rejoignent les intérêts !
D’une part, des économies africaines en mal d’atouts endogènes pour asseoir leur développement durable ; d’autre part des millions d’Africains de « sang et de cœur » vivant harmonieusement en France, aspirant à une relation plus équilibrée avec le pays d’origine et habités par une même frustration individuelle de besoins clés insatisfaits : identitaire, économique, sociétal…
La France et les pays d’origine ont tout à gagner à décrypter et organiser ce « marché du lien » en partie aujourd’hui entre les mains d’acteurs informels (besoins économiques) et d’endoctrineurs incontrôlés (besoins identitaires et religieux)
Concrètement, il ne s’agit plus seulement de faire financer la énième infrastructure par l’AFD (Agence Française de développement) et consorts, ou de rassembler médiatiquement des tops VIP de la diaspora dans l’avion présidentiel lors d’une visite officielle… Il est urgent de recomposer autant d’écosystèmes bilatéraux constitués d’institutionnels publics, entreprises publiques et privées, sociétés civiles…en communautés « irriguées » et « fertiles » aptes à comprendre subtilement les besoins nouveaux, interagir et produire des opportunités « win-win-win » (Diaspora/France/Pays d’origine).
Dans cette nouvelle donne initiée et stimulée paritairement par les stratégies publiques des deux Etats (France et pays d’origine), les diasporas seraient les premiers « clients » des entreprises et institutions qui structurent aujourd’hui le lien bilatéral : instituts financières, opérateurs télécoms, compagnies aériennes, acteurs du tourisme, sociétés d’import-export, sociétés mixtes…
Il faut vivre avec son temps : un opérateur télécom a aujourd’hui plus de pouvoir réel et structurant (éducatif, financier...) que l’AFD ou l’UNICEF !
Quelques idées (état non exhaustif) en faveur d’une stratégie de codéveloppement plus en phase avec les logiques d’opportunités et d’équilibrage identitaire qui prévalent au sein des principales communautés diasporiques de France :
- Reconnaissance officielle de la double culture (dans le respect des valeurs de la République) et activation d’un programme de réappropriation
- Co-programmation de cours d’histoire et langues nationales à l’attention des jeunes publics
- Co-élaboration de contenus pédagogiques digitaux diffusés via les opérateurs télécoms, medias locaux, consulats…
- Lancement de nouvelles offres en tourisme « ancestral » chères aux diasporas : programmes spécifiques (cours de langues et/ou de cuisine locale, excursions « patrimoine »...) portés par les compagnies aériennes et les opérateurs touristiques (hôtels, agences de voyage…) installés dans les pays d’origine.
- Relance par une meilleure rationalisation du programme de jumelage des villes « France/Afrique » intégrant la composante locale « diaspora ». Exemples d’associations qui ont du sens : Montreuil et Kayes (Mali) ; Toulon et Bizerte (Tunisie) ; Lyon et Sétif (Algérie)…
- Billets d’avions promotionnels pour les jeunes (objectif : permettre le retour régulier au pays d’origine)
2. Favoriser la mobilisation circulatoire des compétences
- Programmes de coopération internationale priorisant l'appel à des experts issus de la diaspora du pays « client »
- Favoriser et assister les pays d’origine dans la mise en place de réseaux numériques visant à engager à distance les chercheurs et compétences de leur diaspora
- Permettre aux scientifiques (chercheurs, médecins…) officiant dans les secteurs publics et privés de pouvoir exercer provisoirement dans leur pays d’origine à l’occasion de grandes échéances (Programmes courts de recherche, colloques et conférences, jury d’examen…)
3. Accompagner les investissements dans le pays d’origine
- Prévoir de nouveaux instruments financiers transnationaux impliquant les banques centrales (exemple : prêts hypothécaires transnationaux)
- Aider à la mise en place de fonds diaspora destinés à soutenir les investissements dans le pays d’origine
- Institutionnaliser de nouvelles sources de financement participatives et/ou autoalimentées à partir des transferts d’argent, billets d’avions…
- Offrir la possibilité aux demandeurs d’emplois de trouver un emploi voire d’investir sous certaines conditions dans leur pays d’origine (micro-projets…)
- Assister les autorités diplomatiques et/ou organisations de la diaspora dans l'organisation d'évènements visant à faire connaître les opportunités d’investissement
- Tarifs promotionnels « créateurs d’entreprise » pour les billets d’avion…
4. Œuvrer à une meilleure inclusion financière
- Etudier et lutter contre les ressorts des transferts informels (estimés à > 50% sur certains corridors) en encourageant notamment les banques françaises à mettre en place des partenariats avec les institutions financières des pays d’origine.
- Sensibiliser les banques à la mise en place d’offres affinitaires (relation bancaire, épargne, financement…) intégrant les spécificités besoins et comportementales des diasporas
- Faire baisser les coûts des transferts d’argent en intensifiant la concurrence issue notamment de la "Fintech"
5. Intégrer l’opportunité « diaspora » dans le management des entreprises
- Programmes de développement à l’international impliquant aux premiers rangs les collaborateurs et partenaires d’origine étrangère (partage de la connaissance des territoires, opportunités d’emploi ou de créer son entreprise dans le pays d’origine…)
- Intégrer la diversité dans l’animation de la vie sociale de l’entreprise (journées « pays », évènements culturels mettant à l’honneur les pays d’origine des collaborateurs…)