Israël, un an après.

Un an après la tragédie du 7 octobre Israël est seul. Mais ce n’est pas nouveau. Le pays est né dans la solitude. Au lendemain du vote de l’ONU en 1948 les pays musulmans ont lancé leurs armées sur Israël et refusé le plan de partage qui était sur la table : ceux qui aujourd’hui revendiquent un État arabe en Cisjordanie feraient bien de s’en souvenir. 

 

Il serait juste de remarquer aussi la solitude des palestiniens. Après leur exode les « frères » arabes les ont abandonnés. Au lieu d’aider les réfugiés à créer un État, ce qui était alors possible, ils les ont laissés seuls croupir dans des camps et même massacrés comme en Syrie. Aujourd’hui encore l’Égypte n’accueille aucun réfugié de Gaza (sauf quelques privilégiés moyennant un péage exigé par des passeurs mafieux !)

 

Dans ce chaudron les passions tristes ont prospéré. Les Frères Musulmans, entre autres, ont distillé leur venin où la haine de l’Occident se mariait à la haine du juif. Ils ont fait en sorte que l’aide internationale vienne alimenter les caisses d’organisations corrompues au détriment des populations démunies. Tout cela en se cachant derrière une interprétation fanatique de la Charia pour imposer leur discipline moyenâgeuse. Il ne faut pas oublier le rôle du grand mufti de Jérusalem allié d’Hitler pendant la guerre. Le Hamas en est le digne héritier. Les étudiants qui défilent ici et là sous drapeau palestinien feraient bien de réviser leurs cours d’histoire. Par quelle amère ironie des jeunes américains brandissent ils le drapeau palestinien sur les campus… en oubliant qu’ils ont le privilège de vivre en démocratie et qu’ils sont eux même les descendants de colons ? 

 

Il faut le répéter, inlassablement : les ennemis d’Israël sont les mêmes qui ont mitraillé le Bataclan, assassiné S. Paty, D. Bernard, les journalistes de Ch. Hebdo et les clients d’un hypercacher. Qu’un ancien Premier Ministre français appelle « axe de résistance » le Hamas, le Hezbollah, et les Houthis du Yémen… est un pur scandale qui insulte la mémoire des victimes françaises tombées sous les balles de ces organisations criminelles. Et quand le même dénonce « la domination financière du sionisme international » il ne mérite que le mépris. 

 

Est-ce que cela excuse la vision messianique de certains israéliens s’installant par la force en cis Jordanie ? Sûrement pas : en laissant 750 000 colons s’établir en Cisjordanie le gouvernement israélien a travaillé contre la paix en rendant beaucoup plus complexe une solution à deux États. Les deux peuples sont pris en otages par leurs extrémistes, chacun brandissant sa légitimité. Il est baroque de les voir se disputer pour savoir qui était sur cette terre le premier, il y a plusieurs millénaires. Vous n’y étiez pas. Moi non plus ! 

 

Pour juger de la situation actuelle il faut garder en mémoire la menace permanente qui pèse sur un État qui, a plusieurs fois failli disparaitre. Il s’en est fallu de peu en 1973… Le 7 octobre fut la suite tragique de cet enchaînement. Après un tel pogrom comment imaginer qu’un pays puisse subir de telles atrocités sans réagir ? Il n’y a pas de riposte proportionnée quand il y a risque existentiel. Donc Israël a réagi. Quel signal de faiblesse son gouvernement aurait-il donné s’il avait laissé l’ennemi clamer à sa porte que le pays allait être détruit du fleuve à la mer ? Le temps n’est plus où les juifs étaient traités de lâches pour s’être laissés enfermés dans leurs ghettos. 

 

Bien sûr les souffrances des peuples de Gaza et de Beyrouth sont intolérables. Mais il faut être aveugle pour ne pas voir qu’en combattant le Hezbollah l’armée israélienne fait face à une organisation terroriste qui a mis le Liban en coupe réglée, après avoir assassiné son Premier Ministre, qui a fait massacrer des milliers de députés, de juges, de journalistes, ou de simples opposants, qui est soutenu par les mollah iraniens, par le régime syrien. Et qui se finance avec la drogue généreusement fournie par le Venezuela : l’organisation assure aujourd’hui 20% du trafic de cocaïne dans le monde ! Honte à ceux qui font semblant de ne pas voir sa dimension mafieuse.

 

Et comme rien n’est simple en Orient Israël a sa part de responsabilité.  Il faut avoir le courage de dire, tout en condamnant les fanatismes arabes, que certains nationalistes israéliens ont eu de leur côté un comportement irresponsable. C’est une faute impardonnable que de commettre les mêmes crimes que son ennemi. De là le grand malaise d’une partie de l’opinion israélienne, partagée entre le soutien de Tsahal et la tristesse de voir chez l’ennemi tant de victimes civiles. Il faut se remémorer Romain Gary : l’aviateur se haïssait d’avoir bombardé des villes allemandes pour lutter contre les nazis mais disait qu’il le ferait à nouveau s’il le fallait. Un sage a dit un jour : la pire solitude c’est de ne pas être à l’aise avec soi-même.

 

Oui la situation à Gaza est humainement dramatique. Rien ne justifiera jamais la mort d’un enfant. Le dilemme décrit par Camus dans les Justes trouve ici toute son actualité : son héros avait beau se battre pour une grande cause il refusa de jeter une bombe sur des enfants. Et la religion juive elle même enseigne que par-dessus tout il faut préférer la vie. Israël se serait grandi en restant fidèle à ce principe. Son gouvernement ne l’a pas fait. Et le pays se retrouve au banc des accusés. Seul. 

 

La communauté internationale, elle aussi, s’est une nouvelle fois couverte de honte. Regarder l’ONU qui exige le cessez le feu sans demander le retour des otages. Regardez l’Unra qui n’a pas reconnu la participation de ses employés dans le massacre. Observez l’inaction de la Croix Rouge après le pogrom. Dans l’incapacité de porter un projet de paix dans la région, dans l’incapacité de s’interposer entre les belligérants, dans l’incapacité à distinguer agresseurs et agressés, dans l’incapacité de distinguer entre un pays démocratique et des régimes dictatoriaux les chanceliers s’agitent en tous sens pour faire reconnaître un État palestinien… qu’ils ont échoué à faire naître. Ils exigent aujourd’hui d’Israël l’ouverture de la frontière entre Gaza et l’Égypte tout en sachant que par cette même frontière ont transité les armes, les missiles et les bombes dirigés contre Israël ! Ils refusent enfin de comprendre que ce n’est pas la solution du problème palestiniens qui amenera la paix mais la paix qui apportera la solution du problème palestinien.

 

Dans ce contexte la France ne s’est pas grandie. Le président de la République a appelé au boycott des armes livrées à Israël. Mais au nom de quoi rendre impossible la défense légitime d’un pays agressé ? Comment peut-il plaider un jour pour la création d’une coalition contre le terrorisme et interdire le lendemain à Israël de se défendre contre ce fléau ? Il s’indigne quand des frappes israéliennes au sud du Liban blessent des soldats de la Finul. Mais s’est-il indigné quand la Finul a laissé le Hezbollah lancer ses missiles sur Israël à partir de bases voisines de ses installations ?

 

Pour tout compliquer le fond du tableau est glauque, marqué par le réveil de l’antisémitisme qui affecte Israël et toute sa diaspora. Là aussi grande est la solitude de beaucoup de juifs hors d’Israël. Ils savent que ceux qui couvrent Israël d’insultes sont souvent mus par une haine qui n’a que peu à voir avec la Palestine. La joie mauvaise qui s’est emparée de quelques esprits de gauche au lendemain du 7 octobre ne peut être détachée de la funeste pensée décoloniale. Elle en porte l’empreinte. Comment expliquer autrement que des mains anonymes déchirent en plein Paris, des affiches qui ne font que rappeler les visages d’innocents pris en otage et martyrisés dans d’obscures tunnels ? La solitude d’Israël c’est aussi cela : l’éternelle solitude du juif errant.

 

Certes Israël n’est pas seule sur le plan militaire : les Etats-Unis restent toujours solidaires : le groupe aéronaval américain, le Theodore Roosevelt, est en alerte dans des eaux proches d’Israël.  Mais la solitude d’Israël c’est autre chose, de beaucoup plus grave. Après la Shoah, le pays bénéficiait d’une sorte de légitimité morale. Il était considéré comme le point d’ancrage des démocraties face à des théocraties. Et on attendait de cette jeune nation une exemplarité morale. Cette époque est révolue. Le piège du Hamas a fonctionné. Par une étrange inversion des valeurs le pays est passé du camp des victimes à celui des bourreaux. La guerre salit tout. 

 

Ainsi s’explique l’agressivité de pays comme l’Afrique du Sud ou l’Espagne devant la CIJ de la Haye. Israël est devenu pour tout le Sud Global et pour l’ONU l’incarnation du mal, l’occupant, le colonisateur, le génocidaire. Tragique inversion des rôles dont profitent les véritables agresseurs.

  

À moyen terme les succès militaires sur le Hamas et le Hezbollah menacent de n’être que des victoires à la Pyrrhus. Ce qui se passe aujourd’hui au Levant résonne pourrait être un grave signal d’alarme. Gaza annoncerait le pire, à une échelle encore plus vaste, comme hier Guernica annonçait la déflagration mondiale. Et si l’on n’y prend pas garde Israël, éternellement bouc émissaire, en sera déclaré responsable. Les esprits faibles n’ont pas encore compris qu’à travers le juif c’est la haine de l’Occident qui s’exprime.

 

Il est donc vital qu’Israël retrouve vite le chemin de négociations lui permettant de construire son avenir sur la paix et non sur les armes. Cela ne sera pas facile car là encore Israël se retrouve seul, avec au nord et au sud très peu de partenaires fiables. Mais l’histoire montre que c’est toujours quand on est fort sur le terrain militaire qu’il est possible de faire des concessions sur le plan politique. La force seule n’est jamais suffisante pour retrouver durablement la paix. 

 

 B. Attali. 

 

Philippe Navier

Président de l'ADéS Embrun & Expert en MdP

2 mois

Très bel article qui devrait être communiqué à tous les enseignants et éducateurs, car nous souffrons d'une jeunesse manquant dramatiquement de culture historique et de faculté d'analyse équilibrée à charge et décharge.

Christian Ligeour

Secrétaire général chez ANORGEND

2 mois

Article équilibré. Je rajouterai qu'en plus de la cocaïne le Hezbollah fabrique du Captagon dont il inonde le Moyen Orient assiste par le regime syrien. Que le Hezbollah à participé à la répression des opposants de Assad en Syrie et à été utilisé pour réprimer par les armes les soulèvements populaires en Iran pour éviter que les pasdarans le fassent et soient condamnés par la population. Last but not least le Hamas refuse l'accès de ses tunnels aux palestiniens de la bande de Gaza.

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