JURIDIQUE : LE REFUS DU RETRAIT DU VOILE N’ENTRAÎNE PAS OBLIGATOIREMENT LE LICENCIEMENT

JURIDIQUE : LE REFUS DU RETRAIT DU VOILE N’ENTRAÎNE PAS OBLIGATOIREMENT LE LICENCIEMENT

La Cour d’appel de Versailles a annulé, le 18 avril 20191, le licenciement d’une salariée qui avait refusé d’ôter son voile, car celui-ci a été jugé discriminatoire. Ainsi elle se conforme aux enseignements de la CJUE2 et de la Cour de cassation3.

Les juges ont vérifié l’existence d’une règle interne à l’entreprise sur l’obligation de neutralité des salarié.e.s dans l’expression de leurs convictions politiques, philosophiques ou religieuses, telle qu’elle en résulte des arrêts de la CJUE et de la Cour de cassation.

Pour rappel, une règle interne peut imposer aux salarié.e.s une obligation de neutralité générale leur interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux, à condition :

  • D’être prévue dans le règlement intérieur ou dans une note de service soumise au mêmes dispositions que celui-ci4 ;
  • D’être générale et indifférenciée ;
  • De n’être appliquée qu’aux salarié.e.s se trouvant en contact avec les clients.

C’est dans cette hypothèse qu’une telle obligation ne constitue pas une discrimination directe.

Or, dans la présente affaire, l’employeur ne pouvait pas faire valoir l’existence d’une quelconque règle écrite.

C’est donc à raison que la Cour de cassation a jugé que l’entreprise ne répondait pas aux conditions posées par la jurisprudence.

De plus, l’entreprise n’alléguait qu’une obligation de neutralité au regard de l’expression des convictions religieuses.

Or, les juges de la Cour d’appel de Versailles rappellent, même si la règle invoquée ne fait aucune distinction entre les différentes confessions, croyances ou pratiques religieuses, la règle ayant pour seul objet d’encadrer le fait religieux n’opère ps de traitement identique de tous les travailleurs de l’entreprise en leur imposant, de manière générale et indifférencié, notamment une neutralité vestimentaire s’opposant au port de signes visibles de convictions philosophiques, politiques ou religieuses.

De fait, une telle règle constitue donc une discrimination directe fondée sur la religion.

Dernier point, la volonté de tenir compte du souhait d’un client ne justifie pas une restriction de la liberté religieuse, car, en l’absence de règle de neutralité interne, seule une exigence professionnelle essentielle et déterminante peut légitimer une interdiction du port de signes religieux.

Dans ce cadre, le licenciement de la salariée motivé par l’expression de ses convictions religieuses est donc annulé en raison de son caractère discriminatoire.

NDLR : Il est à noter qu’un cas identique opposait une salariée d’un de nos secteurs professionnels à son employeur pour le même motif. La Cour d’appel de Versailles à, là encore, tranché en faveur de la plaignante5.

Source : Lien Syndical de la Fédération CGT des Sociétés d’Etudes


1. CA Versailles n°18/021898 du 18 avril 2019

2. CJUE aff. 188/15 du 14 mars 2017

3. Cass. soc. N°13-19.855 du 22 novembre 2017

4. Art. L.1321-2-1 du Code du travail

5. CA Versailles n°17/01249 du 29 novembre 2018


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