Kouilou: Un « sage-homme » au service des femmes
(CRP/Syfia) A Doumanga, dans le département du Kouilou, le centre de santé manque de moyens matériels et humains. Résultat : l'unique infirmier aide les femmes du village à donner la vie. Une noble mission, qu'il réalise sérieusement, pour la grande satisfaction des habitants.
« Notre infirmier accueille bien les malades. Il donne des conseils aux femmes pour limiter les risques à l'accouchement. Une chose est vraie : ici, nous donnons naissance sans problèmes ! Quand une femme enceinte arrive dans le centre de santé pour se faire consulter, notre infirmier prend le temps de bien examiner son cas », lâche, satisfaite, Marie Ngoyi.
La trentaine révolue, mariée et mère de trois enfants, Marie est l’une des femmes de Doumanga, petit village d’environ 1 000 habitants (district de Mvouti) situé à 70 km de Pointe-Noire, qui ont mis au monde assistées de Max Banzoulou, l’unique infirmier et chef de leur centre de santé intégré (CSI). Un personnage respecté dans ce village. A tel point que les femmes l'appellent affectueusement « sage-homme », lui qui joue le rôle de sage-femme ici.
Infirmier diplômé d’Etat (IDE) de l’Ecole publique paramédicale Jean Joseph Loukabou de Pointe-Noire, la quarantaine révolue, marié et père de trois enfants, Max Banzoulou est en poste à Doumanga depuis 2009. « Il met en pratique sa déontologie professionnelle. Il est gentil. Rien que par son accueil et son sourire, tu peux guérir ! Il n’y a pas deux comme lui ici ! », témoigne, enthousiaste, Ngouzi Diabizenga, célibataire mère de deux enfants, qui a déjà bénéficié des services de Max.
« Sous la lumière des torches...»
Dans ce centre de santé en pleine forêt du Mayombe, Max a pris la résolution de se mettre en quatre pour combler le déficit en personnel soignant : « Nous qui travaillons en brousse, nous sommes obligés de tout faire, à cause du manque de sages-femmes. C'est vraiment difficile, mais j'y suis obligé, pour sauver des vies. » Avant, Max était au CSI de Etraba de Pointe-Noire et dans celui de Mboukou (district de Hinda, Kouilou). A l'époque, déjà, il intervenait en tant qu’accoucheur, mais, nécessité oblige, il le fait davantage à Doumanga.
Construit en 1972 par la population, et bien que disposant de quatre chambres dites "salles de consultation, d’accouchement, d’observation et de soins", le CSI de Doumanga manque de tout ou presque (gants, aspirine, quinine, balance pour peser les enfants). « Il n’y a pas d’électricité... Notre "sage-homme" est donc parfois obligé de sortir de sa poche de quoi payer du carburant pour alimenter le groupe électrogène... Il arrive même que les femmes donnent naissance sous la lumière des torches ! », témoigne encore Ngouzi Diabizenga. Dans ces conditions, sage par définition, Max préfère ne prendre aucun risque et transférer les cas les plus délicats sur Pointe-Noire, la ville la plus proche.
Mais, parfois, l'urgence s'invite malgré tout à Doumanga. Situé sur la nationale N°1, ce CSI et son infirmier chef reçoivent quelque fois des accidentés de la route nationale. Max administre alors les premiers soins avant l’évacuation à Pointe-Noire. « La fois dernière, j’ai reçu une femme enceinte qui a eu, en cours de route, des douleurs. J'ai été obligé d’intervenir. L'accouchement s'est bien passé et la dame a poursuivi son voyage. Mais, cette aventure montre la nécessité d’équiper notre centre », explique Max Banzoulou. Ce dernier fait accoucher en moyenne chaque mois quatre femmes.
A quand les renforts ?
Pour l'épauler, depuis quelques mois, le ministère de la Santé, par le biais de la direction départementale de la santé au Kouilou, a affecté à Doumanga deux filles stagiaires en fin de formation à l’Ecole paramédicale Jean Joseph Loukabou. Ces dernières sont encadrées par Max. « Nous savons désormais consulter, monter une perfusion, faire des points de suture et même aider les femmes à accoucher. Nous ne savions pas le faire à notre arrivée ici en octobre dernier », se félicite Sandra Mouaya, l’une des stagiaires. Toutes deux ont prolongé leur stage prévu initialement pour six mois. Pour le moment, on ne sait pas si les autorités vont affecter ou pas au CSI de Doumanga d’autres stagiaires.
De son coté, Eric Makaya, habitant du village, estime que « l’Etat doit normalement envoyer des sages-femmes et infirmières qualifiées pour aider les femmes à accoucher au lieu que ce soit un homme qui le fasse. Cela est possible, mais une femme pour ces services, c’est mieux ! » En attendant que l'Etat écoute ce vœu dicté par la pudeur, Max continuera d'aider les habitantes à donner la vie.
Haircy Mbimi (Juin 2016)
Articles réalisés avec l'aide financière de l'Union européenne. Le contenu de ces articles relève de la seule responsabilité du CRP et de Syfia international et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant la position de l'Union européenne.