La chute de l'or noir et le "Bear Rally"​

La chute de l'or noir et le "Bear Rally"

Encore un lundi noir le 27 avril 2020. Les cours du pétrole américain ont dégringolés de 25 % du à une offre toujours trop grande et un stockage du brut aux limites bientôt atteintes, sur fond de coronavirus. Référence à New York, le baril de WTI pour livraison en juin a chuté de 4,16 dollars pour finir à 12,78 dollars lundi, relativement au neutre mardi avec une légère hausse. Les navires attendent aux ports pour se faire décharger, mais la demande est inexistante.

Lundi dernier (20 avril), nous avons connu une séance inédite dans l’histoire du marché pétrolier, il fallait y être pour comprendre. Le baril pour livraison en mai clôturant à -37,63 dollars, les investisseurs étant prêts à payer pour se délester de leurs contrats. Je disais que, même s’il le donne le pétrole en ce moment, il fallait avoir l’espace pour entreposer les barils ! Eh bien, Carl Icahn, 26e plus grande fortune selon Forbes 400, propriétaire de l’entreprise CVR Energy Inc, aurait acheté entre 1 et 2 millions de barils au plus bas des cours, lundi le 22 avril. Puisqu’il a les entrepôts et la capacité de raffinage, il a pris avantage de la situation.

Situés dans l’Oklahoma, les stocks de brut du terminal de Cushing servent de référence à la cotation du WTI. Ils étaient de 59,7 millions de barils (MB) au 17 avril pour une capacité totale d’un peu plus de 76 millions de barils, selon les données de l’Agence américaine d’information sur l’Énergie.

La Bourse de New-York a clôturé sur une note positive lundi mais reste un peu au neutre aujourd’hui, mardi. Encouragée par une réouverture prochaine de l’économie, à l'aube d'une semaine riche en résultats d'entreprises et de réunions de Banques centrales. Ce sont les deux éléments à surveiller cette semaine. La confiance des consommateurs américains s’est dégradée en avril, pour un 2e mois consécutif.

Le rapport entre le prix des actions des entreprises et leurs bénéfices est actuellement plus élevé que mi-février, avant que la pandémie ne frappe de plein fouet l’économie américaine, souligne de son côté Patrick O’Hare de Briefing. C’est, à ses yeux, « une indication supplémentaire du divorce entre le marché et la réalité ». Ce qui veut dire que la valeur en bourse des entreprises qui publient leurs résultats financiers actuellement est surévalué par rapport à leurs revenus et leurs profits envisagés. Caterpillar (+0,71%), souvent considéré comme un des baromètres de la croissance mondiale, a lui confirmé que la pandémie allait peser sur ses résultats annuels mais est parvenu à limiter les dégâts entre janvier et mars.

En fait, toutes les entreprises revoient à la baisse leurs prévisions de rentabilité pour l’année 2020 en raison bien entendu de la COVID-19, mais certaines réussissent à sortir leur épingle du jeux (Netflix, Pfizer, Johnson Johnson, 3M, CAE, Métro, Amazon, etc).

Les acteurs du S&P 500 devraient voir leurs bénéfices reculer de 15,2 % en moyenne au premier trimestre et leurs chiffres d’affaires stagner. Le coup devrait être encore plus dur au deuxième trimestre, les analystes prévoyant actuellement un plongeon de 31,9 % des bénéfices et une baisse de 8,2 % du chiffre d’affaires. 

Le rebond !

Selon Jean Rabi, PDG de Netixis Managers, à RDI économie. Est-ce que le déconfinement vient trop rapidement? On ne peut pas se prononcer sur la science. Les marchés sont encouragés par un retour à la normale rapide. Toutefois le déconfinement se fera de façon progressive et par étapes, sur une longue période. La remontée en V des marchés ne sera pas, la courbe aura plus l’allure d’un U. On ne sait pas de quoi aura l’air la reprise, on ne peut pas prévoir le comportement des consommateurs. Ils dictent la demande, donc même si on ouvre les entreprises, les clients doivent être au rendez-vous. Le retour à une économie soutenue prendra un certain temps.

Signe très positif : les stimulus des gouvernements et des banques centrales comme jamais auparavant auront des impacts positifs sur les liquidités et sur le pouvoir d’achats des ménages. C’est important car ça diminue le risque de faillites ce qui permet de sauver les emplois. On ne connait pas encore l’impact des mesures gouvernementales sur les entreprises et les contribuables, nous n’en verrons les effets réels que dans 6 à 12 mois, quand les contribuables recommenceront à retrouver une vie sensiblement normale.

Plusieurs font allusion à une récession, mais on ne peut pas qualifier la crise actuelle comme telle. La définition même d’une récession est un phénomène cyclique qui provient d’une surchauffe décousue de l’économie ou de politiques monétaires ou fiscales inadaptées.

Cette fois-ci, notre économie allait à 120 milles à l’heure dans un Jeep, sur une route presque parfaite, une situation idéale quoi. Mais le Black-Shwan c’est changé en Grey-Rhino et il est venu nous bloquer le chemin. Nous avons volontairement mis un frein à notre bel élan. M. Rabi ne pense pas qu’on doit craindre une dépression car les programmes de stimulus vont soutenir la demande et les entreprises de productions sont encore debout. Les Industries sont prêtes à repartir. Oui ce sera plus long pour les entreprises dans les domaines du divertissement, hôtellerie et restauration. Les plus fortes et les plus novatrices survivront. Les taux d’intérêts resteront très bas, joint aux injections massives de capitaux ça entrainera nécessairement une augmentation de l’inflation au fil des ans. Cette hausse doit simplement être graduelle pour ne pas avoir un impact nocif.


Changement de philosophie

Un changement s’opère, sans même qu’on s’en rende compte. En moins d’un trimestre nous avons changé nos habitudes de vie et de consommation. Aujourd’hui, je ne suis plus près à prendre l’avion, au double ou le triple du prix, pour aller visiter la Familia Sagrada en personne, mais je serais peut-être près à payer pour en faire une visite guidée virtuelle.

Les entreprises ont aussi changé radicalement. GM et CAE sont d’excellents exemples, en produisant désormais des respirateurs médicaux. CAE avait déjà une division santé, GM non. Cette innovation sera en fait pour GM une évolution, la division d’équipements médicaux continuera d’exister après la crise du COVID-19.

Avec ce confinement, les travailleurs et les entreprises qui ont fonctionnées en télétravail, réalisent qu’en plus d’être fonctionnels et productifs, c’est viable à long-terme pour certains individus. Ça peut se traduire par une diminution des frais de location dans, la diminution du stress, la pollution liée aux transports. Qui sait, à long-terme, ça aura surement un impact sur la population des régions plus éloignées des grands centres urbains qui peinent actuellement à attirer de nouveaux citoyens.

La normalité d’hier est le danger d’aujourd’hui! Afin de sortir au plus vite de cette crise, il faut donc, notamment, que le secteur privé se réinvente en un temps record.

En conclusion

Comme investisseur il faut garder la vision à long-terme. Il faut être sélectifs sur les entreprises qu’on choisies. Les gestionnaires institutionnels continueront d’investir dans les placements privés, la diversification sera d’autant plus importante. Des secteurs seront perdants, d’autres de grands gagnants. Il est clair que les entreprises technologiques et pharmaceutiques sont actuellement très bien positionnées. Les critères ESG[i] prendront de plus en plus d’importance pour les investisseurs. Le caractère et la vision des dirigeants par rapport à l’environnement et les conditions de travail des employés seront aussi importantes que les profits dans l’évaluation de la viabilité à long-terme d’une entreprise.

We may not know exactly where this crisis will lead, for the world economy or anything else. But one thing seems clear: History sure can be scary when you don’t know how it ends. – auteur inconnu -

___________________________________________________________________


[i] La différence des ESG, l’indice mieux performé que le SP500

Carole Laible (CEO - Domini Impact Investments)

-         Les règles de gouvernance, le salaire des dirigeants en temps de crise;

-         Le traitement des employés, le nombre de mises à pieds;

-         Le pouvoir des actionnaires, l’aspect démocratique du libre marché;

-         Des entreprises qui créées de la valeur et non des biens remplacables;

-         Biotech et pharma pour combattre la maladie et trouver un virus;

-         Avec les énergies propres; nous ne sommes pas dépendants des prix du pétrole et il leur est possible de vendre des crédits carbones non-utilisés.

-         Financement des petites entreprises doit être plus présent.

Peut-on faire un lien entre la COVID-19 et les valeurs environnementales ? Bien sûr ! Nous avions catégorisé une pandémie comme un « Black Swan » ; événement casi improbable, demain nous devrons le prendre comme un « grey-rhino ». Nous devrons le voir venir et être préparés en conséquence. Nous ne pouvons pas nous permettre de passer à côté d’une telle opportunité de changement.




Anne LeBlond-Létourneau

Créer et réfléchir autrement!

4 ans

Une chose est bien certaine, il faut regarder bien plus loin que le bout de notre nez. Merci Fred!

Marouane Hammane

‎Directeur Développement Hypothécaire~Mortgage Development Manager chez National Bank of Canada

4 ans

Excellent article

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Autres pages consultées

Explorer les sujets