AccorHotels, là où on ne l'attendait pas
AccorHotels a créé la surprise en lançant, il y a peu et en toute discrétion, une nouvelle application, AccorLocal, qui entend bouleverser l’image traditionnelle de l’hôtel. Auparavant bulles déconnectées de la vie de quartier, les hôtels se réintègrent, grâce à cette application, dans le tissu local. La fonction des hôtels se diversifie : à travers AccorLocal, l’hôtel prend une place centrale au sein de son quartier, grâce à la proposition de plusieurs services de proximité à ses résidents. Cela représente une nouvelle transformation digitale d’AccorHotels.
La disruption viendrait-elle aussi d’AccorHotels ?
Pour survivre notamment au développement de sites et d’applications tels airbnb, expedia ou encore booking.com, AccorHotels a du effectuer un gros travail de mise à plat de sa stratégie digitale. Le site a ainsi rationalisé son offre d’applications pour atteindre un cercle de clients plus étendu. Il parvient à toucher plus large que les clients d’hôtels en inventant une nouvelle offre partant des habitants mêmes du quartier d’un hôtel donné : l’application AccorLocal. Les hôtels sont, par là, perçus à travers leur appartenance à une partie de la ville, lieux d’échanges et de vie au cœur des quartiers. Pour y trouver sa place, AccorLocal s’appuie sur les atouts spécifiques aux hôtels : par exemple, leur personnel d’accueil, présent 24 heures sur 24, assure un accès permanent à leurs services, contrairement aux commerces de proximité d’un quartier.
De même, AccorHotels poursuit une stratégie d’acquisition, plaçant sa stratégie de croissance au-delà du secteur du voyage. John Paul (service de conciergerie), Travel Keys (location de résidences privées de luxe), VeryChic (ventes évènementielles de voyages) ou encore Potel et Chabot (traiteur haut de gamme)… AccorHotels fait émerger de nouveaux potentiels de croissance, toujours dans la perspective de faire profiter le plan local de nouvelles possibilités. Ainsi, grâce à Potel et Chabot, le groupe entend développer des offres de restauration non plus seulement à la clientèle hôtelière, mais aussi à la clientèle locale. Cette agilité et cette approche dynamique du secteur du voyage permettent au groupe de proposer à ses clients une gamme de services très diversifiés.
Ce plan stratégique a été longuement et habilement préparé, grâce à un effort d’investissement de 225 millions d’euros. Il s’appuie sur deux piliers : infrastructures informatiques et gestion des données. De plus, il est le fruit d’une étude de terrain minutieuse, partant du constat que les voyageurs ont en moyenne une application dédiée à l’hôtellerie dans leur smartphone. D’où la volonté d’AccorHotels de se démarquer, en intégrant toutes leurs applications dans une seule – autant d’arguments, pour le client, de les choisir et non une autre. Proposer une expérience complète : tel est l’objectif d’AccorHotels en rationalisant leur stratégie vers une application commune, tout en se basant sur les perceptions, besoins et attentes des clients.
Le digital peut donc, dans le cas d’AccorHotels, aider les business classiques, en se mettant à leur service pour les aider à faire face à l’arrivée d’entrants disruptants (grandes centrales internet de réservation, sites de location entre particuliers,…). Le digital prend alors les devants et aide les business traditionnels à prospérer en se transformant, c’est-à-dire en apportant de nouveaux services à valeur ajoutée et en améliorant ses processus internes (automatisation, meilleure efficacité opérationnelle). L’évolution stratégique d’AccorHotels, à la recherche de nouvelles pistes pour muer, en est un bon exemple. Le digital peut-il aider n’importe quelle entreprise à croître et à s’améliorer ? Oui, si les entreprises traditionnelles savent mettre à profit leurs atouts. Le digital les pousse à réinventer leur business, à valoriser leur capital de données et à s’ouvrir à l’innovation. La digitalisation de l’entreprise permet une meilleure efficacité et rentabilité de celle-ci, et joue un rôle crucial dans le développement du chiffre d’affaires. Elle porte à s’interroger sur sa stratégie et ouvre des perspectives d’optimisation non négligeables. Enfin, lorsqu’elle touche plusieurs secteurs et différents plans (local, régional, national, international), la digitalisation entraîne une transformation sociétale : elle bouleverse non seulement les codes de l’entreprise, mais également les rôles des acteurs d’une société sur un plan donné.
Pas de digital sans penser usage d’abord
Si le mobile est devenu prépondérant dans l’utilisation d’internet par rapport aux postes fixes, il ne s’agit pas de transposer ce que l’on faisait bien sur le web sur des smartphones. Il faut repenser sa présence dans le digital en partant des mobiles et non en partant des anciennes manières d’utiliser internet sur un ordinateur : il faut penser mobile pour aller vers le mobile et non aller du web au mobile. Le mobile apporte une vraie liberté à ses utilisateurs. Les applications auxquelles ils accèdent doivent refléter cette simplicité et l’immédiateté de cet usage. Ainsi émergent de nouveaux besoins, auparavant non identifiés. Au contraire, continuer à partir d’anciens sites web riches mais complexes s’adressant à tout le monde – et par là à personne en particulier – c’est passer à côté de nombreuses nouvelles opportunités. Il est nécessaire de se mettre à la place de l’utilisateur qui, lui, a besoin d'informations et de fonctionnalités pertinentes et simples d’utilisation dans le lieu où il se trouve. Penser mobile, c’est donc mettre le client au centre – une approche « client-centrique » qui vaut autant pour le service que pour l’application qui le propose.
Cependant, ces technologies, en plus du fait qu’elles évoluent très vite, sont souvent chères, complexes et multiples. Leur mise en œuvre nécessite d’avoir des équipes aux compétences multiples : développeurs familiers de différents langages de programmation, multiples systèmes d’exploitation des devices mobiles (ios, android, windows), navigateurs web, serveurs, cybersécurité, UX designers, réseaux sociaux,… Autant de problématiques qui demandent des savoir-faires particuliers. De plus, ces ressources coûtent cher et le marché de l’emploi concernant ces différents profils est tendu. Les personnes travaillant dans ce domaine doivent faire face à l’évolution très rapide de ces technologies et s’auto-former constamment pour rester à jour. Enfin, il est possible de miser sur des solutions avec backoffice qui permettent de créer des applications qui fonctionnent sur tous les OS.
Tout doit donc partir de l’expérience utilisateur, fondamentale aujourd’hui pour s’approprier non seulement une application, mais également un service. Car le digital transforme le produit en service. Le grand public, les clients en général sont devenus plus exigeants en termes d’immédiateté du service attendu, de la qualité de ce service et de sa personnalisation par rapport à leurs caractéristiques. Les opérationnels projettent leurs idées de solution pour répondre à un besoin sans se mettre à la place de l’utilisateur final. Aura-t-il de la connexion lors de l’utilisation de son device ou bien a-t-on également prévu un mode hors-ligne pour pallier ce problème ? Aura-t-il les deux mains libres ou bien une seule pour sélectionner des éléments dans l’appli qui necessite plus d’une main (usage d’une tablette ou d’un smartphone) ? Par combien d’écrans devra-t-il passer pour atteindre celui qu’il cherche ? Aura-t-il un moyen de garder en mémoire son mot de passe ou bien devra-t-il le ressaisir à la main (les mots de passe doivent, de nos jours, être de plus en plus sécurisés, et sont donc de plus en plus difficiles à retenir) ? Pourra-t-il se connecter à une solution de paiement qui lui est déjà familière ou devra-t-il ouvrir un nouveau compte sur une nouvelle plateforme ? Devra-t-il saisir des coordonnées personnelles sensibles (CNI, CB…) ou bien pourra-t-il utiliser des applications auxquelles il fait déjà confiance (coffre fort électronique, paypal…) ? Si le service fait référence à une adresse, permet-il facilement d’ouvrir une appli comme waze, mappy ou une autre sans avoir à ressaisir cette adresse ? Autant de questions à se poser pour parvenir à partir de l’expérience utilisateur et placer l’usage au centre de la conception. Si ces points ne sont pas étudiés, ils risquent de ruiner une application.
Résister à la disruption en se l’appropriant
Face aux disruptions qui guettent de toute part AccorHotels, tout est question d’usage et de simplicité. L’entreprise a réussi, pour faire face aux menaces de la digitalisation, à s’approprier ce phénomène de poussée du numérique pour inventer sa propre disruption. Aujourd’hui, l’usage d’internet se fait majoritairement en mobilité, et non plus depuis son PC ou son mac. AccorHotels a ainsi compris l’enjeu majeur de cette digitalisation et des bouleversements qui y sont liés : comprenons mieux nos clients et leurs besoins réels, et le reste coulera de source.
Directrice marketing, communication et relations investisseurs chez Cegedim Santé #esante #NumeriqueEnSante #telesante
7 ansMerci pour cette analyse Erwin. Cette stratégie hyper locale d'Accorhotels est pertinente à plus d'un titre. Elle ouvre les hotels sur leur environnement direct apportant de nouvelles opportunités de diversification. Parfaitement en ligne avec les valeurs de l'entreprise ( hospitalité, accueil, ouverture, service ...). Ce n'est pas rien la place d'un hotel dans une ville ! Je vais suivre cela avec intérêt
Public Affairs & Business Consultant, Chairman Africa SMB Forum, Senior Advisor de Gaulle, Fleurance & Associés, Founder of Africagora (1999), IVLP 2010 (USA), Special Representative of WUSME (World Union of SMEs)
7 ansAnticiper et mettre en œuvre l'inéluctable. Dispo pour en parler
Article intéressant ! En effet la mutation digitale concerne tout ce qui nous entoure et contraint les entreprises à opérer une transformation. Les clients communiquent et interagissent avec les marques mais aussi entre eux... Les entreprises doivent revoir leur mode de communication...
real-estate decarbonisation | smart-buildings & energy efficiency | transition policies
7 ansAu plaisir d'engager la discussion Emmanuel FRANCOIS , nous accompagnons ce client depuis maintenant 18 mois pour la transformation numérique de l'exploitation hôtelière.