La transformation de la société se fera avec les "Millennials"​ (mais différemment)
Benoit Tessier / Reuters

La transformation de la société se fera avec les "Millennials" (mais différemment)

Les "Millennials" forment une génération à la recherche de nouvelles formes d’engagement.

Aux élections régionales de décembre 2015, 65% des 18-30 ans se sont abstenus. Un an plus tôt, aux élections européennes, 73% d'entre eux l'avaient fait. Les Millennials éprouvent régulièrement la tentation de s'abstenir.

Le premier volet de cette série sur les Millennials et l'abstention a montré que leur scepticisme à l'égard du clivage droite/gauche était un facteur clé pour comprendre leur démobilisation. Dans ce deuxième volet, Sociovision et The Social Wire examinent la question de leur engagement. Certes, les Millennials votent moins que les autres générations, mais sont-ils pour autant désengagés, indifférents à l'évolution de la société? Rien n'est moins sûr.

1. Les jeunes parlent de politique avec leurs proches autant que les autres générations

En réalité, la politique n'est pas indifférente aux Millennials. 40% des moins de 30 ans reconnaissent qu'il leur arrive de parler de politique avec leurs proches. Certes, ce chiffre n'est pas majoritaire, mais il n'est pas inférieur à celui mesuré sur les autres générations (40% également). Autrement dit, les Millennials échangent autant que le reste de la population des propos à contenu politique. Ce fait est moins étonnant qu'il n'y paraît: les jeunes ont une sociabilité nettement plus importante que le reste de la population (sorties, soirées, cafés, etc.) et parmi leurs nombreux sujets de conversation, la politique ne fait pas défaut.

En outre, l'échange politique passe également par internet. 19% des moins de trente ans déclarent partager des informations (articles, vidéos...) avec d'autres sur des sujets politiques ou des questions de société plusieurs fois par semaine. Si on ajoute à ce chiffre ceux qui le font moins souvent, on obtient une majorité de 55% qui le font contre 48% des Français. Ces chiffres soulignent un intérêt évident pour les débats de société et le recours fréquent aux fonctions de partage numériques pour interagir avec d'autres.


2. Les jeunes souhaitent s'investir dans des activités d'intérêt général

Au-delà de la simple conversation politique, on ne sent pas chez cette génération une indifférence face aux grandes questions qui animent le débat public. Quand on les interroge, on se rend compte que les jeunes sont aussi désireux que les autres générations de s'impliquer pour faire avancer la société. S'ils en avaient le temps ou la possibilité, ils sont ainsi 38% à déclarer vouloir s'investir dans l'éducation, 38% à vouloir le faire dans le domaine de la santé et la même proportion à vouloir lutter contre la pauvreté. Ces chiffres sont similaires à ceux mesurés dans le reste de la population. Ils obtiennent même des scores plus élevés en ce qui concerne l'humanitaire: 26% souhaitent y investir du temps contre 18% dans le reste de la population française. En fait, la seule activité où ils sont peu nombreux à vouloir s'engager est la politique: seuls 9% sont prêts à y consacrer un peu de temps. En d'autres termes, le désir d'engagement existe bel et bien chez les Millennials, mais il ne se traduit pas par une mobilisation politique au sens traditionnel du terme. Tout se passe à leurs yeux comme si la politisation d'une cause la desservait automatiquement. S'engager, oui, mais pas à travers le prisme politique classique.


3. Les jeunes, adeptes de la démocratie directe

Quand on les interroge sur les modes d'action qui permettraient de transformer la société française, deux pratiques sont spécifiquement citées par les moins de trente ans. D'abord, ils accordent leurs faveurs au référendum. 62% le citent comme un moyen efficace de réformer la France (vs. 57% pour les Français en général). Comment mieux exprimer l'envie de démocratie directe des Millennials, celle qui court-circuite les grands partis politiques?

L'autre mode d'action qui les distingue des autres générations réside dans les grèves et les manifestations. 24% pensent que c'est un bon mode d'action contre 18% pour l'ensemble des Français. De fait, en 2016, les jeunes étaient surreprésentés dans les rassemblements "Nuit Debout" (8% des moins de trente ans disent y avoir participé contre 4% des Français) et les manifestations contre la loi El Khomri (13% déclarent avoir participé à une manifestation contre le projet de loi contre 9% des Français).

L'intérêt porté à ces deux modes d'action en particulier témoigne du désir des Millennials d'agir concrètement sur la société sans passer par la représentation politique. Ne se reconnaissant plus dans celle-ci, considérant le clivage gauche/droite comme dépassé, ils recherchent des engagements plus directs, plus efficaces, aux résultats plus tangibles. Cette quête traduit moins une radicalisation qu'une préoccupation réelle pour les questions de société.

Moralité : il faudra non seulement compter sur les Millennials pour transformer la société, mais également réfléchir à d'autres façons de les mobiliser, car, contrairement à ce que les niveaux d'abstention suggèrent à première vue, les jeunes, eux aussi, ont envie de participer. Une bonne nouvelle pour la démocratie.

Rémy Oudghiri

MÉTHODOLOGIE DE L'ENQUÊTE

Ces analyses reposent sur les données collectées dans la vague 2016 de l'Observatoire des Français de Sociovision. Depuis 1975, celui-ci interroge chaque année un échantillon représentatif de 2000 Français âgés de 15 à 74 ans sur de très nombreuses dimensions : valeurs, opinions, état d'esprit, loisirs, modes de consommation, etc. Les données qualitatives reposent sur des enquêtes qualitatives sur les médias sociaux menées auprès de Millennials entre septembre 2015 et janvier 2016.

Retrouvez l'intégralité de l'article sur le Huffington Post : http://www.huffingtonpost.fr/remy-oudghiri/la-transformation-de-la-societe-se-fera-avec-les-millennials/



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