L'assistance de l'avocat lors de l'information judiciaire: un soutien indispensable au plein exercice des droits des parties à la procédure
Qu'il soit à l'origine de l'enquête judiciaire, en tant que représentant de la partie civile (1), ou qu'il assiste la personne mise en examen (2), l'avocat tient un rôle essentiel à ce stade important de la procédure.
1- Seule en effet, la plainte avec constitution de partie civile, entre les mains du Doyen des juges d'instruction, permet de déclencher l'action publique et donc l'ouverture d'une information judiciaire avec la désignation d'un juge d'instruction, "l'homme le plus puissant de France" selon une formule traditionnelle, dont la suppression maintes fois annoncée, a toujours été reportée.
Au préalable toutefois, une plainte ( simple ou ordinaire) doit impérativement(on parle ici d'une exigence légale) avoir été déposée auprès de la Police (ou de la Gendarmerie) ou adressée directement au Procureur de la République.
Ce n'est en effet, seulement qu'en cas de classement sans suite expresse ou tacite tiré du silence gardé par le Parquet( cad le Procureur de la République) pendant trois mois à compter de la date du dépôt de plainte que la loi autorise le plaignant à se constituer partie civile .
Mais encore faut-il ajouter à cela , la consignation d'une somme d'argent( dont seul le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle est dispensé) , dont le montant est fixé par le Doyen des Juges d'instruction, et qui sert à dissuader les plaintes abusives et l'esprit de chicane.Il est à noter en outre que la somme d'argent ainsi consignée est restituée à la partie civile dans le seul cas où une ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement, est prononcée à l'issue de la phase d'instruction.
Dans ces conditions, nul doute que l'intervention de l'avocat soit indispensable au plein exercice des droits de la victime d'une infraction.
En effet, l'avocat tout d'abord peut rédiger la plainte initiale.
Auquel cas, l'avocat conseille son client dès l'origine de la procédure, ce qui est toujours préférable.Il peut ainsi le dissuader d'une éventuelle plainte abusive, ou au contraire le plus souvent, l'aider à qualifier les faits reprochés en infraction(s) pénale(s), ce qui est sans doute le plus important.
Force est de rappeler ici , en effet, qu'en vertu du principe de légalité des peines et des infractions, il ne peut exister d'autres infractions que celles limitativement énumérées par la loi et contenues pour l'essentiel dans le Code pénal, et dans quelques autres textes législatifs épars.
En outre, chaque infraction répond à une définition légale précise.
C'est dire que non seulement, les infractions reprochées doivent être"issues du catalogue légal", mais encore que l'avocat s'assure de la réunion en l'espèce, de l'élément matériel et moral ou intentionnel prévu par la loi pour chaque incrimination (chacune de ou des infractions reprochées).
En revanche, il importe peu que le ou les auteurs des faits soient connus ou non, la plainte pouvant aussi bien être libellée contre X, que contre personne dénommée.
Mais, la preuve de l'existence de l'infraction n'a pas à être à proprement parler rapportée par le plaignant, pas plus que la justification de son préjudice, pourvu que les deux (l'infraction et le préjudice ou dommage subi ) soient vraisemblables.
Dans le cas où la plainte (simple ou ordinaire) fait l'objet d'un classement sans suite, généralement après l'expiration du délai de trois mois depuis son dépôt auprès du Parquet, l'avocat rédige alors la plainte avec constitution de partie civile.Il s'agit de réitérer la plainte initiale tout en mentionnant expressément que le plaignant se constitue partie civile.La plainte avec constitution de partie civile est déposée auprès du Doyen des juges d'instruction qui fixe le montant de la somme à consigner par la partie civile, et transmet la plainte au Procureur aux fins de réquisitions.
Sauf exceptions (ex. prescription de l'infraction) le Procureur est tenu de requérir autrement dit de demander l'ouverture d'une information judiciaire avec la désignation d'un juge d'instruction.
Autant dire ici, que la plainte avec constitution de partie civile apparait comme l'unique moyen prévu par la loi, mis à disposition de la victime d'infraction de vaincre l'inertie de l'Autorité de poursuite.
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De son côté, le Doyen des juges d'instruction peut inviter, le cas échéant, l'intéressé à compléter auprès de lui sa plainte.
En principe, la consignation effectuée, et la qualité de partie civile ainsi régularisée, l'information judiciaire est ouverte et un juge d'instruction désigné à cette fin.
A partir de cet instant, la partie civile acquiert la qualité de partie à la procédure, au même titre que le ou les mis en examen, mais aussi le Parquet.
Il en résulte que la partie civile peut être entendue par le juge d'instruction en charge de l'enquête, avec l'assistance de son avocat qui a accès à l'intégralité du dossier de la procédure.
L'avocat peut également faire des demandes d'actes au juge d'instruction dans l'intérêt de son client tels notamment que des demandes d'audition de témoin, de confrontation, mais aussi tous autres actes de nature à contribuer à la manifestation de la vérité.
Enfin, à défaut de réponse satisfaisante du magistrat instructeur à une telle demande, le recours à la Chambre de l'instruction en tant qu'instance d'appel est toujours possible.
2- Lorsque le juge d'instruction estime qu'il existe des indices graves ou concordants que telle personne ait commis une infraction, il la convoque en présence de son avocat, afin de l'entendre sur les faits reprochés en vue de son éventuelle mise en examen. C'est l'interrogatoire de première comparution, étape décisive au cours de laquelle l'intéressé peut, sur les conseils de son avocat qui aura eu au préalable communication de l'entier dossier de la procédure, garder le silence ou répondre aux questions du magistrat instructeur ou encore de faire des déclarations spontanées.
Mais si en outre, le juge d'instruction envisage le placement en détention provisoire du mis en examen, notamment pour les nécessités de l'enquête et le maintien à disposition de la Justice de l'intéressé, il transmet le dossier de la procédure au Juge des Libertés et de la Détention, seul compétent pour se prononcer sur l'opportunité d'un tel placement ou à défaut, ordonner le placement sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique.
Au terme du débat contradictoire, en présence de l'avocat de la personne mise en examen, le JLD peut aussi ordonner la mise en liberté de cette dernière.
Qu'il s'agisse de l'interrogatoire de première comparution, comme du débat contradictoire sur l'éventuel placement en détention provisoire, dont les décisions judiciaires auxquelles ces deux audiences donnent lieu, sont susceptibles d'appel devant la Chambre de l'instruction, le rôle de l'avocat du mis en examen est évidemment stratégique.
Une fois mis en examen, la personne qui en fait l'objet acquiert le statut de partie à l'information judiciaire au même titre que la partie civile ou la Parquet, ce qui lui permet outre l'accès à l'intégralité du dossier de la procédure, via son avocat, de formuler des demandes d'actes tels que des auditions ou confrontations, ou encore des perquisitions, le but étant de tenter d'orienter les investigations judiciaires dans le sens des intérêts du client mis en examen.
Bien entendu, en cas de refus du juge d'instruction, la voie de recours est là encore l'appel devant la Chambre de l'instruction.
De même en cas de détention provisoire, l'avocat intervient au soutien des demandes de remise en liberté de son client devant le JLD.
De même en cas de rejet, cette décision est susceptible d'appel devant la Chambre de l'instruction.
Enfin, lorsque le juge d'instruction s'estime suffisamment informé, il met fin à l'instruction en rendant une ordonnance de non lieu à poursuivre, ou de renvoi devant la juridiction de jugement.
Dans ce dernier cas, l'avocat de la personne ainsi renvoyée à comparaitre, intervient par la voie de l'appel, ainsi que le cas échéant, en soulevant les nullités de la procédure.