Le 21ème siècle verra-t-il la fin des centres villes ?

Le 21ème siècle verra-t-il la fin des centres villes ?

‘‘ La désertification des centres villes est désormais un fait indiscutable ’’

Si le désir de campagne et de villes à visages humains est fortement présent dans les « choix de vie », et l’imaginaire social d’une partie importante de la population ; la représentation sociale urbaine et l’image focalisée sur les grandes métropoles régionales constituent,  à contrario, une réalité bien présente.

Cette réalité domine l’actualité politique au sein des régions et fait diversion sur l’autre débat territorial, concernant l’avenir des villes moyennes et des territoires péri-urbains et ruraux. La désertification des centres villes est désormais un fait indiscutable. Il faut s’en saisir pour amener des propositions nouvelles sur les usages de la ville, en proposant des modèles de résilience et de soutien aux activités à même de répondre à ces défis.

 ‘‘ …nous passons plus de temps en voiture à échapper au centre-ville qu’à nous y promener…’’

Aménagement des territoires et mobilités.

Le centre-dense, la ville centre ne représente plus aujourd’hui que 25% de la population, si on inclut les banlieues on arrive à 30 ou 35%. 35% c’est le chiffre que représente la population des trente premières agglomérations françaises par rapport à la population totale.

L’étalement urbain favorisant le développement d’un espace péri-urbain de plus en plus éloigné de la banlieue ou de l’agglomération, c’est donc aujourd’hui une majorité de français qui vivent dans ces territoires, au centre desquels se situe une majorité de petites et moyennes villes souvent éloignées des métropoles les plus actives.

Première conséquence de la périurbanisation, on perd aujourd’hui en France 200 hectares par jour de terres agricoles. On est aussi passé de 26 à 40 m2 de surface habitable moyenne par habitant entre 1972 et 2006. Seconde conséquence, la mobilité géographique qui semble être le modèle valorisé de l’entreprise et de l’emploi, génère au quotidien des déplacements pendulaires qui nous amènent en moyenne à parcourir 45 km par jour, pour répondre à nos différents besoins en divers lieux.  En continuant sur la même lancée, il est probable qu’à l’horizon 2030 ces distances soient doublées .

Ces deux constats s’accordent assez mal avec l’idée d’une économie des ressources et d’un modèle socio-économique soucieux de la préservation des équilibres écologiques, quand nous passons plus de temps  en voiture à échapper au centre-ville qu’à nous y promener, en prenant selon nos besoins, les transports en commun.  De ce point de vue les choses semblent d’ores et déjà réglées et d’aucuns pensent qu’il faudra faire avec « le désert ».  Mais si ce sont nos comportements individuels additionnés qui sont la cause structurelle de cet « aménagement »-« déménagement » du territoire, on peut aussi être tenté d’y apporter des corrections par des incitations positives qui pourraient redonner une dynamique nouvelle aux centres villes.

 Le déclin des commerces des centres villes

La désertification des centres villes touche indistinctement tous types de villes. Aux données structurelles évoquées, s’ajoute le lent tarissement et assèchement des relations sociales en milieu citadin. Ces changements de comportement coïncident avec l’évolution des mentalités : désir de consommation en panne d’affectivité et de sens sur fond d’une critique de la consommation standardisée, repli sur soi décuplé par l’intrusion des objets connectés dans l’espace public, rapatriement des échanges sur les supports numériques et les réseaux sociaux, développement du commerce par internet… Le monde est sur écran, à portée de pouce et je peux me démultiplier en autant de moi, dans une mise en scène de ma vie quotidienne.

‘‘ La désertification des centres villes touche indistinctement tous types de villes’’

Ces transformations touchent au fondement du commerce au sens général de rapport à l’autre  et accélère une certaine désaffection et dépersonnalisation des lieux physiques de consommation que symbolise les commerces de centre-ville. Ce sont eux qui paient le prix fort de ces changements avec un sentiment de lassitude et de perte d’un « savoir-vivre » ensemble. En repli sur eux-mêmes, l’horloge semble s’être arrêtée. Ce sont désormais des lieux en attente… Attente de clients, de projets, de touristes, de meilleure saison, de mobilité, d’emplois, de locataires, de rénovation, d’enchantement à très haut débit.

‘‘ La réalité est là
et la désertification s’accélère.’’

La réalité est là et la désertification s’accélère. L’étude annuelle réalisée par Procos (Fédération du commerce spécialisé) en atteste une fois de plus : le taux de vacance dans les boutiques de centre-ville continue de croître. En 2015, il a atteint le taux record de 9,5% soit un point de plus que l’année précédente. Pour les agglomérations de 50.000 à 100.000 habitants ce taux atteint 10,2%. La progression du phénomène atteint toutes les villes.

L’autre fait observé est que l’origine de la richesse économique influe sur l’intensité du phénomène de désertification. Les villes qui se tiennent le mieux (moins de 5%) sont celles où les revenus d’activités sont en majorité tirés des activités productives des secteurs de l’agriculture et de l’industrie à l’exemple d’Angers, Beaune, Nantes.

A l’inverse, les villes qui tirent la part la plus élevée de leurs revenus de transferts publics (pensions de retraite, transferts sociaux, salaires de la fonction publique), se situent autour d’un taux de vacance supérieur à 10% à l’exemple d’Alençon, Autun, Bourges, calais…

Avec 180 magasins fermés en 2016, contre 149 un an plus tôt, le centre-ville de Saint-Brieuc affiche un nombre record de commerces vides. Près d’une vitrine sur trois a baissé le rideau selon le baromètre exclusif publié par le Journal des Entreprises.

Des propositions nouvelles à inventer

Il semble évident au regard du contexte que des propositions nouvelles peuvent et doivent être faites. Nous fixons ici les principes que nous avons pu dégager de nos interventions desquelles il ressort :

Que les politiques de rénovation urbaine des centres villes n’ont que peu d’effets structurants sur les dynamiques de commerces et d’activités des centres villes ; de plus dans un contexte de tensions fortes sur les finances des collectivités, elles feront de plus en plus l’objet de critiques et de controverses auprès des populations, y compris des acteurs économiques concernés, au regard notamment des montants affectés à ces aménagements.

‘‘ S’il semble désormais acquis que
ce sont principalement les revenus des activités de production (agriculture, industrie et en partie tourisme localisé dans des villes à forte image Biarritz, Saint-Malo, La Rochelle, Aix en Provence…) qui maintiennent un niveau élevé de commerces en centre-ville ’’

S’il semble désormais acquis que ce sont principalement les revenus des activités de production (agriculture, industrie et en partie tourisme localisé dans des villes à forte image Biarritz, Saint-Malo, La Rochelle, Aix en Provence…) qui maintiennent un niveau élevé de commerces en centre-ville. A ce sujet, l'exemple d'Oslo, le long de la rivière Aker, où on a transformé un quartier, pour complètement le transformer afin de devenir un des poumons de la capitale et l’un de ses espaces les plus fréquentés (alors que chacun se focalise sur le modèle du cœur de ville). Comme le souligne justement la Ministre, Mme Bjørnøy, « de ne pas confondre ‘‘conservation du patrimoine’’ avec ‘‘volonté de figer le temps’’ ».

Il convient :

  • de réorganiser les zones d’activités dans cette optique
  • de limiter l’extension des zones commerciales les plus éloignées en ramenant une offre généraliste de qualité dans les centres villes. Ceci permettra de répondre à la fois aux enjeux de réduction des émissions de carbone, et au besoin de maintenir un niveau de généralités de commerces et services qui constituent une valeur ajoutée d’attractivité d’un territoire, au regard notamment de l’accueil de nouveaux arrivants en particulier des retraités sur une grande partie des villes du Sud.


Que la participation directe des acteurs économiques, associatifs aux enjeux et décisions de redynamisation des centres villes est un élément indissociable du succès de nouvelles réalisations permettant une coproduction public/privé dans le soutien à l’économie, l’emploi, l’environnement, le cadre de vie. 

Qu’il convient en tant que moyen,  d’utiliser toutes les technologies numériques, télévisuelles, informatives favorisant les interactions et la promotion des idées, des activités et des événements,  mais sans perdre de vue la finalité humaine de la rencontre, qui constitue la ville comme forme sociale et visage, comme présence réelle et continuité.

 

‘‘ Presque rien’’ peut changer ‘‘ presque tout’’.

 

 

 

 

 

 

Membres du projet   ‘‘ Design social / Centre-ville ’’:
Bruno HILT  :  Développement commercial
Bruno TUDAL  :  Expert Environnement et SIG
Christophe THIEBAULT  :  Sociologue consultant
Vafi VADSARIA  : Innovation analogique

Effectivement la taxe sur les friches commerciales peut aider à donner envie aux propriétaires de revoir le loyer à la baisse, c'est une cause de vacances mais hélas pas la seule. Le pouvoir d'achat en berne (sans vouloir attribuer la responsabilité a qui que ce soit, pas envie de politisé cette échange) et notamment des CSP+ contribue a cette chute sans fin d'une baisse d'activité des commerces en générales. La gratuité des parkings doit être limitée également pour favoriser le turn over des véhicules stationnés, mais il est évident que ce plus est incitatif pour le consommateur ou promeneur. Il faut penser la ville en mixant les idées, le commerçant doit aussi améliorer sa qualité de service et d'accueil, le temps est révolu ou il suffisait d'ouvrir sa porte. Il faut s'inspirer des réussites des uns et des autres en tenant compte des contraintes, une ville dynamique donne envie et facilite la vie des utilisateurs, la mixité des commerces est essentielle, métiers de bouches, métiers de services et bancaires, métiers de consommations doivent cohabiter sans que l'un prenne trop de place, dans certaines petites villes vous avez parfois 5 à 6 banques d'implantées dans le même périmètre. L'animation d'une ville qu'elle soit culturelle ou promotionnelle doit donner envie. Plusieurs facteurs de réussite doivent être envisagés mais dans une globalité.

La question est aussi comment faire venir les gens dans les centres villes de manière simple et constructif. On est dans une société qui manipule deux contraires pour en faire un plus. Mais si en Mathématique, c'est simple dans la multiplication, cela n'est pas vrai dans l'addition. Prenons l'exemple d'une ville comme Nantes que je connais un peu. Le centre ville est piéton et c'est sympa, mais pour venir sur ce centre pour y faire vos courses, vous avez deux solutions. Le transport en commun utilisant vos pieds, ou votre véhicule personnel. Lorsque l'on fait des course, on revient normalement chargé, ce qui implique souvent le véhicule personnel. Hors sur Nantes, la logique est de taxer les véhicules. Vous ne pouvez venir de la banlieue en voiture sans être taxé pour stationnement. Au point même que le samedi (jour du marché), le stationnement est aussi payant. Une logique de taxe systématique a été mise en place par la commune pour privilégier le transport en commun et éviter les nuisances dans la ville provoqué par les véhicules privés. Alors la question est : est il plus rentable de prendre des sous pour stationnement ou faire vivre le centre ville et ses commerces?

Didier BROCHON

Responsable auto-entrepreneur chez cdjf-casav (Didier BROCHON)

8 ans

d'où la "taxe sur les friches commerciales", créée en 2013 et qu'on ressort des tiroirs : un commerce reste inoccupé, vacant ? Le Propriétaire ne fait rien pour le relouer ? Il ne revoit pas à la baisse ses loyers (si la cause de la vacance est un loyer trop élevé) ? : les communes taxent !

difficile de penser une ville sans commerce, que d'autres centres d'intérêts coexistent effectivement, mais une ville sans centre et sans commerce à mes yeux deviendrait une ville dortoir. Mais ma logique est mienne et des exemples concrets me permettraient d'orienter une autre vision. Comme il faut des marchés, des bibliothèques etc..

Effectivement le digital a pris une part conséquente de nos loisirs, le wifi est une des pistes qui peut contribué à améliorer le cœur des villes, les centres commerciaux l'ont bien compris, les centres villes doivent réagir rapidement. Pour approfondir la désertification et la vacance des boutiques de détail, il faut approfondir la compréhension afin d'acquérir une surface commerciale, une activité commerciale avec du stock est difficile à financer, les banques sont d'accord pour des prêts sur l'acquisition des fonds mais rarement pour financer du stock, donc il faut un apport personnel conséquent pour acquérir cette marchandise avec un financement à 45 jours fin de mois (difficile d'en vendre l'intégralité sur la période), par conséquent la frilosité des banques plus le découragement fort des chambres de commerce renforce le choix du postulant a investir dans un univers moins contraignant. Les mass markets investissent sur des surfaces supérieur à partir de 200m2, d'où leurs choix des zones périphériques, les franchises rarement sur des surfaces inférieurs à 100m2, la complexité réside dans le choix de ces surfaces et les prix de loyer sur des emplacements numero1 ou 1bis.

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