Le contrôle renforcé de l’activité partielle ou comment ramener des millions d’euros dans les caisses de l’Etat

Le contrôle renforcé de l’activité partielle ou comment ramener des millions d’euros dans les caisses de l’Etat

Le contexte économique actuel entraine un mouvement global de recherche d’économies et de maitrise des dépenses à tous les niveaux de l’Etat. Avec en moyenne 5 815 000 demandeurs d’emplois (catégories A, B, C au 2ème trimestre 2020) et un déficit budgétaire constant, les aides accordées par l’Etat au titre de l’activité partielle n’ont pas échappé à ce mouvement.

Le dispositif d’activité partielle a concerné plus de 8 millions de salariés au plus fort de la crise, soit environ 1 million d’entreprises. En août 2020, alors même que la tendance est à la baisse, l’activité partielle concernait encore 1,3 million de salariés du secteur privé. Selon la Dares, les secteurs de l’hébergement et de la restauration restent les plus touchés, 21% des salariés étant à l’arrêt ou en baisse d’activité. Par ailleurs, la mise en place du dispositif spécifique d’activité partielle de longue durée (APLD) et son déploiement d’ores-et-déjà entamé au sein des branches de la métallurgie et du Syntec, risquent sans nul doute d’entraîner une augmentation du nombre de salariés bénéficiant de l’activité partielle.

L’importance du soutien financier apporté par l’Etat dans l’accès à l’activité partielle n’est pas neutre et implique une augmentation de la dette publique. En contrepartie de ce coût engendré pour l’Etat et des facilités d’accès au dispositif d’activité partielle pour toutes les entreprises, le Gouvernement a souhaité renforcer le contrôle sur les demandes d’activité partielle.

Les moyens de contrôle habituels

Les contrôles classiques liés à l’activité partielle sont opérés par les DIRECCTE (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi). Il peut s’agir soit d’un contrôle sur place, avec ou sans avertissement préalable, et pouvant impliquer l’interrogation des salariés ; soit d’un contrôle sur pièces avec des demandes de pièces justificatives permettant de vérifier l’éligibilité à l’activité partielle et les modalités de sa mise en œuvre effective. Enfin, lors de la vérification du respect des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail, le contrôle peut par exemple porter sur les mails des salariés, et ainsi engendrer un examen de la concordance entre les jours travaillés et les jours déclarés en activité partielle.

Les nouveaux moyens de contrôle 

Parmi les nouvelles mesures déployées pour lutter efficacement contre la fraude, on trouve notamment la mise en place d’un outil informatique permettant d’apporter une aide au contrôle de l’activité partielle. En complément, l’Agence de services et de paiement (ASP), organisme auprès duquel les employeurs transmettent leur demande de mise en activité partielle et qui leur verse ensuite les allocations, a ouvert l’accès à de nombreuses données pour faciliter la collecte et la vérification des informations fournies par les entreprises. Par ailleurs, afin de renforcer les contrôles en amont (c’est-à-dire les contrôles ayant lieu entre la demande d’activité partielle et la réponse apportée aux entreprises), les délais de réponse ont été allongés de 2 à 15 jours pour les demandes d'activité partielle. Ces nouveaux moyens de contrôle sont facilités par l’amélioration de la coopération entre les services de la Ministre du travail, Elisabeth Borne, et du Ministre délégué chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt.

La diversité des profils des entreprises contrôlées 

Les DIRECCTE différencient deux types d’entreprises lorsqu’elles sont amenées à contrôler les demandes d’activité partielle :

  • les entreprises de bonne foi qui se sont trompées en remplissant les demandes d'indemnisation, pour ces dernières une régularisation à l'amiable est proposée afin de corriger les erreurs
  • les entreprises ayant commis une fraude : dans cette situation, des sanctions pénales (amende de 30 000€ et 2 ans d’emprisonnement) et administratives (remboursement des aides perçues et exclusion du bénéfice des aides publiques pour une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans) sont applicables

Dans la pratique, les fraudes concernent souvent des entreprises qui ont demandé à leurs salariés placés en activité partielle de télétravailler. Il s’agit également de demandes de remboursement intentionnellement majorées par rapport au montant des salaires effectivement payés. Autre cas rencontré, celui des demandes d'indemnisation pour des sociétés qui ne sont plus immatriculées. Une partie des contrôles est déclenchée par des signalements, souvent transmis par les salariés, les organisations syndicales ou les CSE (comité social et économique).

Le fruit des contrôles réalisés

Environ 270 000 contrôles ont d’ores et déjà été réalisés :

  • 220 000 contrôles menés a priori (au moment de la demande en ligne)
  • 50 000 contrôles menés a posteriori (une fois les indemnités versées aux entreprises)

A ce jour, plus de 400 procédures pénales ont été engagées à la suite des contrôles opérés. Grâce au renforcement des contrôles, 225 millions d’euros seront récupérables, le gouvernement ayant annoncé en avoir recouvré ou bloqué plus de la moitié, soit plus de 130 millions d’euros.

Les moyens de contestation pour les entreprises sanctionnées

A la suite des contrôles réalisés par les DIRECCTE, les entreprises ont la possibilité de contester les sanctions administratives prises à leur encontre (remboursement des aides perçues et exclusion du bénéfice des aides publiques pour une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans) par deux moyens :

  • Un recours devant le tribunal administratif
  • Un recours auprès du Ministre du travail 

A ce jour le dispositif global d’activité partielle représente un coût de financement de plus 30 milliards d’euros pour l’Etat. Les dérives observées dans son utilisation vont amener le Gouvernement, et dans la même lignée, les DIRECCTE, à maintenir un niveau de contrôle renforcé. Pour les entreprises en faute, tant la sanction administrative que la sanction pénale représentent un risque réputationnel non négligeable en termes d’image publique et de marque employeur.









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