Le courage : la clé de la réussite managériale

Lors d’un entretien RH, vous a-t-on déjà demandé si vous étiez courageux ? Rarement, car on estime que c’est induit lorsqu’on postule à un job, ou que c’est incongru ou hors-sujet. Pourtant ne s'agit-il pas d'une compétence nommée comme telle, le courage n'est-il pas l'attitude ou le savoir-être essentiel du collaborateur 3.0, dans un environnement de plus en plus compétitif et changeant?

Qu’est-ce que le courage ?

En grec, le mot « andreia » désigne à la fois l’audace et la virilité. Mais l’époque, à laquelle la bravoure, mâle vertu, consistait à surmonter la peur qu’inspirait le guerrier ennemi ou l’animal féroce, est bien révolue. D’un courage corporel et viril, on est passé à une conception plus morale, où les femmes tirent singulièrement leur épingle du jeu.

Dans une société de consommation qui nous donne pour modèles des images sur papier glacé, le courage consiste aussi à refuser d’être des clones. Mais il faut être solide pour résister au formatage. Il est d’autant plus difficile, à notre époque, de rester indépendant, d’affirmer ses propres convictions, que la mondialisation et la rapidité des communications sur Internet uniformise les modes de pensée.

Ne pas céder à la facilité : l’essence même du courage

Quel est le point commun entre ces personnes qui, dans des circonstances très dissemblables, se sont surpassées ? Ne pas avoir cédé à la facilité. Le courage résulte d’une lutte intestine entre cette partie de nous-même qui craint de se faire mal ou de déplaire, cherche le confort, fuit la difficulté ; et celle qui tient bon, ose dire non, affronte la réalité. Je me lève le matin malgré la fatigue, je contrôle ma paresse contextualisée, je résiste à la tentation de craquer. Le courage c'est ainsi une forme de résistance, de persévérance qui donne de la force face à l'adversité, la volonté de poursuivre en dépit d'échecs, de résultats insatisfaisants. Et c’est dans les périodes d’incertitude – qu’elle soit économique ou personnelle – que nous avons le plus besoin de cette force d’âme.

Qui est-on pour manager avec courage?

Le courage va avec une forme d'honnêteté et de conscience de soi. Honnêteté car il faut avoir des valeurs pour « mouiller sa chemise ». Être congruent entre ce que l'on dit et ce que l'on fait. Etre aligné aussi avec ses propres valeurs et celles prônées par l'entreprise. Si ce n’est pas le cas, suis-je prêt(e) à assumer ce paradoxe profond? Une vertu masculine? Heureusement non. Tout ceci suppose aussi une bonne dose de conscience de soi et de confiance en soi: qui suis-je ? A quoi mon rôle sert-il ? Le film « Corporate », réalisé par Nicolas Silhol en 2017, avec Lambert Wilson et Céline Sallette, qui a créé un véritable tsunami au sein de la filière RH, illustre (notamment) à merveille ce thème de la congruence et du courage en entreprise.

Déléguer : un acte de courage…

Le courage ne s'exprime pas nécessairement de manière explicite. Il peut s’illustrer au travers d’un acte fort. Déléguer revient à prendre le risque de faire confiance. Un pas difficile à franchir par le délégataire, qui sera jugé sur ce que d'autres auront fait. Selon une étude menée par le sociologue Christian Morel, il y a davantage d'accidents d’avion quand le commandant pilote que lorsque c'est le numéro deux qui se retrouve aux commandes. « La raison vient de la difficulté à dire au commandant qu'il se trompe, alors que l'inverse est plus aisé », explique le sociologue. Pourquoi ce qui se passe dans un avion ne pourrait être appliqué le long d'une chaîne hiérarchique d'entreprise ? Les résistances sont fortes. Pas facile de proposer un changement de règles. Un numéro deux, un manager intermédiaire ou un « simple » collaborateur préfère renoncer à s'exposer de peur d'être sacrifié par le système.

L’empathie au service du courage…

Le courage s'exprime dans le risque et l'incertitude. L'objectif à atteindre sera perçu comme supérieur à l'alternative de ne rien faire. L'enjeu vaut la prise de risque mesurée. L'équipe elle-même renforce la motivation du chef à prendre fait et cause pour elle: leurs résultats, la relation de confiance, leurs personnalités… Le manager n'est pas un héros, il ne met pas en danger son équipe ou l'entreprise, il exerce son sens critique. Son courage est moral. Mais pour cela, il doit connaître les forces et les faiblesses de son équipe. Le bras armé du courage managérial est donc l’empathie. Plus un manager connaîtra son équipe, comprendra qui elle est, ce qui la motive profondément, ses attentes, ses craintes, plus cela renforcera son courage, sa confiance en soi et la force de son équipe et sa capacité à se dépasser.

En conclusion, j’aimerais reprendre cette citation de Nelson Mandela, qui résume parfaitement le propos: "J'ai appris que le courage n'est pas l'absence de peur, mais la capacité de la vaincre."