Le lien de la fragilité

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Il a rétréci au lavage du virus couronné le « transhumanisé » ! Depuis le début de la pandémie, nous sommes passés de l’homme augmenté à l’homme grippé ; nous avons perdu nos prétentions. Nos vanités ont flambé avec le virus. Nous avons découvert l’homme diminué. Le transhumanisme a débouché sur le transattentisme. Nous différons. Nous subissons. Nous retenons notre souffle. Nous le confinons sous nos masques. Nous sommes psychiquement sous insuffisance respiratoire sans pour autant l’être physiquement. D’une certaine façon, nous sommes en salle de réanimation permanente. Nous avons perdu notre superbe, nos fausses certitudes, notre suffisance. Mais nous avons enfin repris conscience de cette fragilité qui nous unit. L’autre nous manque autant que nous nous manquons à nous-mêmes. L’autre nous manque et tout est dépeuplé. Car nous avions pu avoir l’illusion de tout résumer, de nous suffire à nous-même, oubliant que l’effeuillage de l’Ego ressemble à celui de la marguerite et finit toujours par « pas du tout ». Il faut savoir préserver un pétale. L’illusion de l’auto-suffisance nourrit toujours notre suffisance. L’homme augmenté n’est pas celui qui se prolonge en devenant invulnérable, en tendant vers le fantasme, vers le cauchemar de l’immortalité. C’est notre vulnérabilité, c’est notre finitude qui nous protègent en nous rendant solidaires des autres, de tous ceux qui dépendent de nous comme nous dépendons d’eux. Nous communions dans le périmètre de notre condition humaine. C’est notre âme qui nous augmente. Elle n’est pas effeuillable, pas plus qu’elle n’est échangeable. Elle est incomplète dès lors qu’elle n’est pas animée par le souffle du partage. Dans Pilote de guerre Antoine de Saint Exupéry nous rappelait que « La charité véritable, étant exercice d'un culte rendu à l'homme, au-delà de l'individu, impose de combattre l'individu pour y grandir l'homme. » Sans âme, l’homme est un grand mutilé qui finit toujours par ressentir les outrages, les morsures, les amputations de la grande solitude. L’intelligence artificielle nous apporte beaucoup mais elle est froide : elle n’est ni celle du cœur ni celle de l’âme. Elle est à des années lumières de l’intelligence émotionnelle et de l’intelligence spirituelle. L’homme augmenté c’est en fait l’humanité diminuée. Il vaudrait mieux évoquer l’âme augmentée : l’âme en partage.

Jean-Pierre Guéno

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