Le Post-it, cet outil digital !

Le Post-it, cet outil digital !

En l’espace de quatre décennies, le Post-it a colonisé le monde de l’entreprise. Il est devenu le partenaire attachant des sessions de brainstorming, des ateliers de créativité colorés (Innovation Games) ou encore des projets Lean / Agiles (tableaux Kanban). Ce petit feuillet autocollant d’apparence anodine cristallise en fait un certain nombre de pratiques, d’attentes et de valeurs emblématiques de la culture digitale : partage, transparence, horizontalité, décontraction, orientation client, souplesse… Et si le Post-it était tout simplement devenu l’outil digital par excellence ?

Disclaimer : Post-it® est une marque déposée de la société 3M. Par commodité, nous utilisons ici le terme « Post-it » dans son acceptation usuelle de « papillon adhésif ».

 

La transformation digitale, une affaire de culture plus que de technologie

Argument #1 : Même dans sa version papier, non informatisée, le Post-it est déjà un outil digital. Car le digital, c’est avant tout une culture naissant de la rencontre de technologies, de pratiques, d’attentes et de valeurs partagées. 

Commençons par tordre le cou à une idée reçue qui se rencontre encore trop souvent. La transformation digitale des organisations ne peut se réduire à la mise en place de nouvelles technologies (cloud, data mining, blockchain, machine learning...). Les projets de transformation digitale qui apportent véritablement de la valeur se caractérisent avant tout par leur capacité à replacer « l’humain au centre », selon la formule consacrée. Mais au centre de quoi ?

Pour donner du sens à ce concept, il faut le rapprocher du fameux impératif de customer centricity qui s’est fortement développé ces dernières années, en lien avec les méthodes Agiles et le Design Thinking.

Du point de vue de la démarche, la notion de « centralité » de l’humain / du client / de l’utilisateur renvoie essentiellement à deux choses :

  1. Le client est impliqué dès le début du processus d’idéation. Son implication très en amont, dès la phase de conception du produit ou du service que l’on souhaite créer ou faire évoluer, permet de s’assurer que l’on développe une solution utile à un problème réel.  
  2. On valorise ce qui nous caractérise en tant qu’êtres humains. Une écoute active, sincère et empathique conduit à définir une problématique non pas seulement en termes technico-fonctionnels mais aussi ludiques et émotionnels. Jouer de toute la palette de l’expérience humaine permet de créer des solutions véritablement innovantes qui répondent aux attentes profondes des individus et des collectifs et pas simplement à leurs « besoins ».  

Avec le recul, on constate aujourd’hui que le curseur de l’innovation digitale s’est en fait déplacé de la technologie vers les usages, les attentes et les valeurs des individus.

Dans le cas de Wikipédia, par exemple, la proposition de valeur de la plateforme consiste à mettre à disposition une base de connaissance de nature encyclopédique, gratuite et alimentée continuellement par les internautes.

On voit bien ici que la véritable valeur ajoutée repose moins sur la technologie sous-jacente (le wiki), qui n’est qu’un moyen facilitateur, que sur les nouveaux usages, c’est-à-dire l’évolution du comportement des internautes vis-à-vis de la connaissance (possibilité de trouver des réponses à ses questions à tout instant, de contribuer en tant qu’auteur, de modérer des discussions…).

Avec le temps, les habitudes prises par les utilisateurs ont conduit à développer de nouvelles attentes chez ces derniers (tout le monde peut s’exprimer, la modération se fait a posteriori, l’accès à la connaissance est gratuit et simplifié…) et, par extension, à affermir certaines valeurs (liberté de parole, liberté d’opinion, accès libre au savoir…).  

A l’échelle d’une entreprise, l’enjeu consiste à adapter l’organisation à un monde devenu digital, à rattraper un retard en transformant son « ADN », autrement dit en développant la culture digitale en interne (c’est la fameuse « acculturation »).

Comment ? En reproduisant ce qui s’est passé dans la société au cours de ces 30 dernières années, c’est-à-dire en introduisant de nouvelles technologies, qui vont peu à peu modifier les comportements, faire évoluer les attentes et incarner de nouvelles valeurs, ce qui revient à faire une sorte de rétroingénierie culturelle. En conséquence de quoi, il devient évident que la conduite du changement doit être placée au cœur de toute démarche de transformation digitale.

Cette digression introductive n’avait d’autre but que de défendre l’idée que ce n’est pas parce que le Post-it est un bout de papier qu’il ne peut pas être considéré comme un outil digital à part entière. Bien au contraire. 


Un outil au service des projets digitaux et de l’intelligence collective

Argument #2 : Les pratiques de travail emblématiques de l’ère digitale s’appuient sur de multiples techniques d’animation de l’intelligence collective utilisant bien souvent le Post-it comme support de facilitation.

Utilisé dans le contexte du travail d’équipe, en particulier sur les projets digitaux, le Post-it peut être utilisé de nombreuses façons différentes (tableau Kanban, brainstorming, mind mapping, matrices, planning projet, process mapping, Business Model Canvas…), mais ce qui fait sa valeur est relativement stable et homogène.

Le Post-it reste fondamentalement un support, un conteneur, destiné à recueillir des idées, noter des mots et des images. Mais à la différence du paperboard, qui remplit la même fonction, les idées sont aisément manipulables, elles ne restent pas figées une fois écrites ou dessinées. Chaque Post-it représente en effet une unité de sens, pouvant être ajoutée, supprimée, intégrée à une catégorie, ordonnée, classée, triée…

Par ailleurs, le Post-it constitue un outil de facilitation visuelle dynamique qui permet de modéliser une pensée collective en action. Il permet de jouer facilement avec des hypothèses de travail en encourageant la contribution de tous les participants.

Cela étant posé, on constate que les praticiens de la transformation digitale des organisations ont accueilli le Post-it avec beaucoup de ferveur. Comment expliquer cet engouement ? Nous voyons au moins deux raisons à cela.

D’une part, dans un atelier de co-conception ou un Innovation Game par exemple, la contribution de tous les participants est attendue. Mais ces mêmes participants peuvent toutefois venir d’horizons très différents et ne pas toujours partager les mêmes référentiels. Il devient donc important de pouvoir noter et donner à voir les idées qui émergent en temps réel pour obtenir un feedback immédiat et faciliter une compréhension partagée.

D’autre part, il est particulièrement utile de pouvoir faire évoluer le schéma mental collectif émergent au fur et à mesure du déroulement de la discussion, car ce que l’on cherche à tracer au fil de l’eau c’est bien l’évolution d’une intelligence collective en action, pour aboutir à une vision commune et partagée.

En dernier lieu, force est de constater que le Post-it représente un outil « low-tech » idéal, économique en plus d’être transportable partout, adapté à tout un tas de situations : explorer collectivement un sujet, alimenter une discussion, construire du sens, faciliter la compréhension, faire apparaître les failles logiques dans un raisonnement, ou encore schématiser une situation dynamique comme un processus métier, un plan projet ou un business model.

Mais bien davantage qu’un simple élément facilitateur d’une méthode d’animation, au travers des comportements qu’il encourage, le Post-it paraît être lui-même un vecteur de la transformation culturelle.


Un catalyseur de la culture digitale

Argument #3 : Correctement encadré et animé, l’usage collaboratif du Post-it permet d’incarner des valeurs associées à la culture digitale et d’encourager des comportements vertueux.

Lorsque les membres d’un groupe de travail partagent une même culture, cela se traduit par des comportements, des attentes et des valeurs en commun. Loin d’être un concept hors-sol, la culture d’une entreprise constitue bel et bien un actif immatériel observable. Il suffit de porter son attention sur les usages, de détecter les attentes cachées et les valeurs qui sont incarnées au quotidien.

Les réunions et les workshops constituent des occasions privilégiées où la culture peut justement être observée. Ces instances de travail représentent en effet le moment par excellence où les points de vue et les pratiques se confrontent, où les divergences s’exacerbent et les opinions peuvent converger.

Pris isolément, l’apport d’un outil comme le Post-it à l’évolution de la culture d’une organisation peut apparaître comme un épiphénomène. Pourtant, les comportements qu’il encourage au travers des méthodes d’animation évoquées plus haut incarnent de facto un certain de nombre de valeurs généralement associées à la culture digitale : partage, transparence, horizontalité, décontraction, orientation client, souplesse…

Ainsi, par exemple :

  • Partage et transparence : appliqué à la cartographie des processus, aux tableaux Kankan ou au Business Model Canvas, l’emploi du Post-it permet de rendre visible des pratiques de travail, des réserves de valeur, des interactions entre acteurs ou bien encore des priorités. Ces techniques collaboratives de facilitation visuelle sont particulièrement compatibles avec l’ouverture des organisations tant en interne que vers leur écosystème élargi, qui caractérise de plus en plus les nouvelles chaines de valeur de l’ère digitale.    
  • Horizontalité et décontraction : en tant que support aux sessions de brainstorming ou aux Innovation Games (ex : Speedboat), l’usage du Post-it autorise et encourage la contribution de chacun, dans un contexte d’échange vivant et moins formel que d’autres réunions. La multiplication des instances de ce type traduit la volonté des organisations de faire émerger d’authentiques dynamiques bottom-up, vecteurs d’innovation, en complément des flux décisionnels descendants.   
  • Orientation client et souplesse : l’écoute des besoins des clients, qu’ils soient utilisateurs finaux d’une nouvelle solution interne ou bien potentiels consommateurs d’un nouveau produit à lancer sur le marché, se fait désormais le plus souvent en amont, dès la phase de design. A cet égard, l’animation d’ateliers de co-conception à l’aide de Post-it permet d’engager une démarche d’écoute active et d’itérer progressivement du concept initial vers le MVP (Minimum Viable Product). 


En synthèse, on se dira peut-être que tout ceci est un peu tiré par les cheveux… Pour autant, après ce tour d’horizon, on a aura probablement compris que le sujet était moins de traiter du Post-it en tant que tel que de remettre en perspective quelques idées clés liées à la Transformation digitale et à ses enjeux, le Post-it servant à cet égard de prétexte de bon aloi.



 



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