Le projet de transposition en France de la Directive Européenne extra-financière
renforce la transparence sur la parité

Le projet de transposition en France de la Directive Européenne extra-financière renforce la transparence sur la parité

La parité, qui refait régulièrement surface dans le débat politique, reste un non-sujet pour certaines entreprises. En effet, les préjugés ont parfois la peau dure. Ce n’est pas de notre faute si nous n’avons pas de femmes aux postes clés, nous ne les poussons pas vers la sortie, elles démissionnent, c’est incompréhensible. Certaines entreprises hésitent, à juste titre, en termes de communication, à utiliser le terme de parité, jugé trop engageant ou trop loin de la réalité, et préfèrent parler d’égalité professionnelle, voire de diversité.

Jusqu'ici, l'article 225 de la loi Grenelle 2 demandait uniquement la publication des mesures mises en place en la matière ainsi que des informations générales sur les rémunérations. Les raisons invoquées pour justifier le manque de transparence publique sur les écarts de salaires hommes - femmes sont nombreuses, comme l’impossibilité de comparer les salaires de manière littérale, étant donné que chaque poste est différent d’un autre, que chaque salarié a un parcours différent, ou que le recours au temps partiel des femmes contribue à fausser les chiffres. Des justifications qui n’expliquent clairement pas l’importance de l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes en France (qui est de 19% en moyenne et de 10% à poste égal selon l’INSEE, la France étant 134ème/144 en termes d’égalité salariale selon le World Economics Forum en 2016, derrière le Zimbabwe ou la Russie). 

En l’absence d’amélioration de la situation, les mesures chocs sont destinées à se multiplier, comme l’opération #7novembre16h34 ou encore la pratique du « Name and Shame ». En effet, la nouvelle tendance est à la publication de phrases sexistes anonymisées sur des blogs. L’Assemblée Nationale s’est lancée avec le blog « Chair Collaboratrice », et certaines facultés ont suivi avec « Paye ta fac ». La démarche de lanceur d’alerte est bonne, simplement, c’est dommage qu’il faille aller jusque-là pour faire réagir l’opinion publique. Alors que la mise en place de plans d’actions, la publication des données chiffrées précises et un véritable travail d’explication et d’analyse des évolutions, permettrait de rentrer dans une démarche constructive et rationnelle.

Sans compter que l’absence de transparence est difficilement justifiable : en termes de reporting, les chiffres sont la plupart du temps disponibles, étant donné que toutes les entreprises de plus de 50 salariés en France doivent réaliser un Rapport de situation comparée relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes depuis 1983. Néanmoins, la loi n’oblige pas les entreprises à communiquer en externe ce rapport, transmis uniquement en interne (cf. « Le rapport doit être transmis au comité d’entreprise pour avis, aux délégués syndicaux et à l’Inspection du Travail accompagné de l’avis du comité d’entreprise. De même, il doit être remis à disposition de tout salarié qui en fait la demande. Les indicateurs contenus dans le rapport doivent être affichés sur les lieux de travail. »).

A titre de bonne pratique, pour aller plus loin, on peut citer la récente publication en ligne du Rapport intégral de situation comparée relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes du Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche fin 2016, ou celui du Ministère de la Défense publié depuis 3 ans. Voir également l’exemple de British Land qui publie les écarts de rémunération hommes – femmes, en indiquant le ratio en % de différence de manière tout à fait transparente (slide 57 du Full data Report 2015).

Pour terminer sur une note positive, la nouvelle directive européenne extra-financière renforce depuis peu la transparence sur la diversité au sein des organes de gouvernance. Le projet 2017 de transposition de la Directive Européenne en France y fait explicitement mention : « Sauf lorsque leur total de bilan ou leur chiffre d’affaires et leur nombre de salariés n’excèdent pas des seuils fixés par décret en Conseil d’État, le rapport comprend également une description de la politique de diversité appliquée aux membres du conseil d'administration, au directeur général et aux directeurs généraux délégués de la société au regard de critères tels que l'âge, le genre ou les qualifications et l'expérience professionnelle, ainsi qu'une description des objectifs de cette politique, de ses modalités de mise en œuvre et des résultats obtenus au cours de l’exercice écoulé. Si la société n’applique pas une telle politique, le rapport comprend une explication des raisons le justifiant. ». En espérant que cela ne se limite pas, dans les faits, à la simple publication du nombre de femmes au sein des organes de gouvernance.

Car, au-delà de la transparence, les enjeux sont multiples : rétention des talents, sensibilisation du Top Management, respect de la proportion de femmes tout au long de la pyramide, réduction des écarts de salaire, amélioration du % de recrutement de femmes à des postes à haute responsabilité…. De même, les plans d’actions possibles sont nombreux : sensibilisation interne (newsletter, pièces de théâtre…), création de réseaux de femmes, mise en place d’un outil de suivi permettant d’identifier les écarts salariaux et de les rectifier, formations Leadership dédiées aux salariées femmes, mentoring… mais également mise en place de lieux d’échanges et d’écoute tout au long de l’année dédiées aux femmes.

Conclusion : il est vrai que le fait d’être une femme est souvent un faux-ami pour promouvoir la parité. Le risque de donner l’impression d’en faire une affaire personnelle, et, par conséquent, de se décrédibiliser, est critique (notamment pour les responsables RSE). Alors, pour ne plus être à bout d’arguments rationnels, voici cinq chiffres clés faciles à retenir (issus en grande partie d'études EY et du World Economics Forum), à développer, si nécessaire, autour de la machine à café, lors de votre prochain entretien annuel, ou du prochain Comex :

►  Entre 10 et 25 ans : c’est le nombre d’années estimé pour atteindre 30 à 40% de femmes au conseil d’administration au niveau international

►  170 ans : c’est nombre d’années estimées pour atteindre l’égalité salariale

►  Seulement 25% des entreprises sondées suivent les écarts de salaires hommes – femmes au niveau international

►  Pour 43% des hommes, la principale barrière à l’intégration de femmes dans le Top Management est le manque de profil approprié - contre 7% des femmes, qui évoquent davantage les biais organisationnels.

►  Les entreprises ayant au moins 30% de femmes à des postes à haute responsabilité pourraient accroître jusqu'à 6% leurs marges nettes

Convaincu(e)s ?

Pour en savoir plus sur la parité, contactez charlotte.barbe@fr.ey.com

Super intéressant et clair. Merci !

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