Le sommet des chefs d’Etat du G5-sahel et de la France : Clarification, Responsabilité et Fait accompli.

Le sommet du 09 juillet 2021 tenu par visioconférence à vue la participation en présentielle du seul président nigérien parmi les chefs d’état du G5-Sahel.

Les objectifs étaient entre autres d’évaluer la situation sécuritaire au sahel et de définir le nouveau format de la lutte anti-terroriste.

Les décisions ci-après ont été prises par les Chefs d’Etats :

·       La fermeture des bases françaises de Tessalit, Kidal, Tombouctou d’ici fin 2022 ;

·       La montée en puissance et l’autonomisation de la Force Conjointe G5-Sahel sous une seule responsabilité opérationnelle, financière et logistique du COMAFOR pour disposer des renseignements stratégiques et tactiques d’origine satellitaires , techniques, et en imagerie, des moyens de transports aériens et logistiques, d’une chaine de santé opérationnelle et des infrastructures pour le casernement des unités déployées dans les divers pays ;

·       La mise en place du Centre de Fusion du Renseignement à Niamey et  sa prise en charge par le Secrétariat Exécutif ;

·       Le financement pérenne et prévisible de la force conjointe du G5-Sahel ;

·       L’octroi d’un mandat sous le chapitre VII de la charte des Nations Unies ;

·       La mise en œuvre par la CEDEAO de son plan d’actions prioritaires 2020-2024 pour éradiquer le terrorisme dans l’espace CEDEAO ;

·       La mise à disposition d’un soutien au Burkina Faso, au Mali et au Niger pour participer à la sécurisation des trois frontières de la zone du Liptako Gourma ;

·       L’importance d’une veille active de l’ensemble des pays de la sous-région :

·       La mise en place d’une action collective et énergétique en vue de contrer la menace terroriste ;

·       La poursuite des efforts communs et la réaffirmation de la pleine mobilisation à travers les négociations actives et participatives avec les partenaires de la Coalition Internationale pour le Sahel ;

·       La mise à la disposition de la Force Conjointe des capacités indispensables aux missions de la force et dont les pays du G5-Sahel ne disposent ;

·       Le renforcement de la force conjointe autour du Bassin du Lac-Tchad face à la persistance de la menace terroriste.

Les éléments évoqués montrent à suffisance le bilan mitigé des forces Barkhane et la faiblesse des forces du sahel à disposer des renseignements stratégiques via les outils modernes de collectes, d’analyse, et d’hiérarchisation des informations pertinentes. Aussi, l’intelligence économique militaire n’est pas fortement développée, utilisée comme instrument de défenses et de sécurité dans nos états.

Le changement de paradigme terroriste au sahel nécessite la définition d’une nouvelle formule d’action plus performante.

La reconfiguration de la lutte antiterroriste : Européanisation avec l’appui américain.

Le changement de paradigme des terroristes en passant d’une ambition territoriale à un projet de dissémination de la menace à l’échelle de l’ensemble de l’Afrique de l’ouest augure un lendemain sombre sur l’ensemble des pays du golfe de guinée car malgré la présence de Barkhane nous avons assisté à une expansion géographique de la menace terroriste.

Les forces de défense et de sécurités de nos régions et celles de la France doivent s’adapter à cette évolution.

Le président Macron a souligné que la présence militaire française au sahel s’articulera autour de deux missions fondamentales. La première, la poursuite de la neutralisation et de la désorganisation du haut commandement de l’EIGS et d’AQMI avec ses alliés dont le GSIM. La seconde mission est relative à l’appui à la montée en puissance des armées de la région et de la Task force Takuba.

Le président français à insister sur la capacité des armées de la région en précisant qu’il s’agit de construire des outils de défense capables de former, d’entrainer et de gérer dans la durée les soldats, d’entretenir les matériels, d’acquérir aussi des compétences.

En outre, il a précisé que le processus de diminution des forces Barkhane déployées plus au Nord du Mali commencera d’ici la fin de l’année pour les concentrer vers le Sud, en raison de la menace terroriste qui y prévaut. Cette décision sera-t-elle soumise au Conseil National de Transition du Mali avant tout déploiement ?

Les nouvelles modalités ont été définies en concertation avec les Etats concernés selon le président nigérien Mohamed Bazoum. Cette assertion est à relativisé aux regards des réponses données par certaines autorités de la région du sahel.

La décision de fermeture des bases françaises de Tessalit, Kidal, Tombouctou d’ici fin 2022 et l’européanisation des forces étrangères sont des décisions non inclusives et guidées par les enjeux de la politique intérieure française. (Cf. Fin de l’opération Barkhane : Simple effet d’annonce.)

Les Chefs d’état du G5-Sahel ont été mis devant les faits accomplis au regard de la pression des contribuables françaises sur leurs autorités (l’opération est trop couteuse).

Le premier tour de l’élection présidentielle est prévu pour le 10 avril 2022. Le Président E. Macron est préoccupé par la reconquête de l’électoral en vue de sa réélection.

Les élections régionales n’ont pas mobilisés (un taux d’abstention estimé à 66 %) et les objectifs de la LREM n’ont pas été atteints par contre la droite et le PS ont été réconfortés.

Les impacts de certaines décisions du sommet :

La fermeture des bases françaises de Tessalit, Kidal et Tombouctou a des impacts négatifs sur la lutte contre le terrorisme au Mali et au sahel, sur les Forces Armées Maliennes et les Forces Onusiennes (MINUSMA).

Selon le sociologue Dr. Aly Tounkara, l’appréciation de la fermeture des bases françaises peut se faire sous trois lectures. La première est celle des populations vivant l’insécurité dans les zones concernées, la seconde est celle des analystes ne vivant pas l’insécurité mais l’observant et la troisième est celle des distants qui sont beaucoup plus sur les réseaux sociaux.

Il y a un risque d’effritement de la relative sécurité créée par les patrouilles effectuées par les forces françaises et de récupération des villes par les terroristes.

Sur un autre plan, les forces de la MINUSMA ne pourront bénéficier à hauteur de souhait de la puissance et de la réactivité de Barkhane surtout en cas d’urgence.

La force conjointe du G5-Sahel n’a pas encore un niveau d’action suffisant pour contrôler la région sahélienne (elle ne dispose pas de renseignements stratégiques et tactiques d’origine satellitaires, techniques, et en imagerie, des moyens de transports aériens et logistiques, d’une chaine de santé opérationnelle et des infrastructures pour le casernement des unités déployées).

Le retrait non maitrisé des troupes françaises couplé à celui des milices armées étrangères de Libye ordonné par le conseil de sécurité de l’ONU en date du 16 avril 2021 via la résolution 2570 peut être un catalyseur de la propension terroriste au sahel.

D’où l’inquiétude des Chefs d’État du G5-Sahel car il n’existe aucun plan de retrait des dites milices estimées à 30 000 combattants fortement armés. Pour stopper toutes velléités des milices, ils ont sollicité auprès des nations unies et de la Libye de contribuer à la sécurisation des frontières du G5-Sahel durant la phase de retrait.

La stratégie de Niamey consistant à renforcer les coopérations bilatérales avec l’Algérie est capitale au regard de la menace Libyenne. Le pays du « malien » est un acteur important dans le sahel et son aide en terme de renseignements, de formations, de moyens logistiques et d’échanges économiques est essentiel pour la lutte contre le terrorisme.

Les forces armées du sahel particulièrement celles du Mali ont certes la volonté et l’engament patriotique de gagner cette guerre qui perdure. Toutefois, il faut reconnaitre que la somme de plusieurs faiblesses ne peut constituer une force. Elles ne disposent pas d’outils de défense à l’image de la force Barkhane. Nos formes armées ont besoins de l’appui des forces étrangères pour mieux lutter contre les terroristes.

Les opérations conjointes plus efficaces :

Les opérations conjointes réalisées avec Barkhane sont plus efficaces que celles des forces conjointes du G5-Sahel et du Mali.

Selon les informations fournies par la Directeur de l'Information et des Relations publiques des Armées (DIRPA), 41% des terroristes neutralisés sur un total de 242 terroristes neutralisés est due aux opérations conjointes avec la force Barkhane, 26% à l’opération Maliko et 31% aux opérations conjointes G5-Sahel.

Le tableau ci-après donne les statistiques en fonction des opérations réalisées sur les six derniers mois.

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L’opération conjointe du G5S est moyennement efficace en termes de terroristes neutralisés mais plus efficace en interpellation. Un renforcement sincère et objectif des forces du G5S permettra de booster son efficacité.

Ce retrait n’a pas que des impacts négatifs, il en résulte aussi des opportunités. Il peut être une opportunité de gestion politique endogène de la crise au Sahel particulièrement pour le Mali et le Burkina Faso. Car il est une exigence parmi tant d’autres des groupes terroristes opérant dans notre pays.

Egalement, il pourra permettre aux états du sahel de nouer et ou de renforcer des partenaires stratégiques avec d’autres puissances internationales pour le bonheur de leur population.

Les Chefs d’état du G5S doivent tenir compte dans les analyses stratégiques de la présidence du conseil de sécurité pendant ce mois de juillet. Le conseil de sécurité est chargé du maintien de la paix et la sécurité internationale. Ses décisions ont force obligatoire et s’imposent à l’ensemble des membres de l’ONU.

Le conseil de sécurité des nations unies est présidé pendant ce mois de juillet par la France et le sahel occupe une place importante dans cet agenda.

Les Chefs d’état doivent renforcer leurs coopérations avec les autorités algériennes et prendre leur responsabilité en renforcer leurs outils de défense et de sécurité.

Il ne s’agit pas de combler l’absence de forces étrangères en court et moyen termes mais plutôt dans la durée.

Amadou COULIBALY-

Auditeur Interne

amadoucouli@hotmail.fr

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