Le succès est-il le fruit d’une culture ?

A l’heure ou Genève-Servette Hockey Club termine la saison, je souhaitais démarrer cet article avec le sport mais ni dans le football et ces clubs dont on affirme qu’ils ont la « culture de la gagne » comme le Real Madrid C.F. ou le FC Bayern München .

Bien que ce ne soit pas du tout dans la culture suisse, la saison 2022-2023 de Jan Cadieux démarre par la fixation d’un objectif clair et sans ambiguïté, devenir champion de Suisse. Par comparaison, HC Fribourg-Gottéron SA brillant second avant les playoff vient de voir son Président Hubert Waeber (enfin) oser affirmer que l’objectif était la finale puis le titre.

Revenons à Genève qui, pour la saison 2023-2024 a annoncé comme objectif la victoire en coupe d’Europe.

Pour ceux qui ne suivent le hockey sur glace, Genève Servette qui n’avait jamais gagné de titre, a remporté ces deux compétitions.

Il y a plusieurs bonnes pratiques à tirer de ces expériences :

• Fixer des objectifs précis et le système d’information adapté
• Partager ces objectifs et les décliner à tous les niveaux de l’entreprise
• Faire vivre l’effort sur une certaine durée
• Avoir des relais de performance

Les outils permettent le pilotage

Même si ce sont des outils « classiques », avoir un « Business Model Canvas » à jour pour appréhender l’entier de l’entreprise mais aussi un tableau de bord prospectif (balanced scorecard ) pour impliquer toutes les structures dans l’objectif final sont une base pour un outil de contrôle (MIS ou « management information system ». Evidemment, je peux être influencé puisque j’ai étudié à HEC Lausanne - La Faculté des Hautes Etudes Commerciales de l'Université de Lausanne et présidé les Alumni HEC Lausanne dont les auteurs du BMC Alexander Osterwalder et Yves Pigneur ur sont des membres, mais leur reconnaissance est mondiale et leur approche nourrira une startup, une PME comme une multinationale cotée.

L’immatériel complète le financier

A l’heure de l’ESG et donc de critères de Gouvernance importants dans la gestion stratégique et opérationnelle de l’entreprise, le capital immatériel devient essentiel et c’est là ou les indicateurs financiers sont complétés par l’extra financiers qui qualifie donc plusieurs types de capitaux :

• Capital Client
• Capital Humain
• Capital Organisationnel
• Capital de Système d’Information
• Capital de Savoir
• Capital de Marque
• Capital Partenaires
• Capital Actionnaire
• Capital Sociétal
• Capital Naturel

 Pour ACTORIA GROUP Mergers & Acquisitions, Strategy in Europe and Africa , cela signifie 10 axes, 98 thématiques, 135 indicateurs et 177 questions.

L’importance de l’immatériel…

Bien sûr, si tous les clubs de hockey ont des structures plus ou moins professionnelles, un contingent relatif au budget disponible et des infrastructures modernes, ce sont donc les critères extra-financiers qui peuvent équilibrer et surtout faire la différence. Objectivement, la situation du Genève Servette n’est pas des plus favorables avec une infrastructure dépassée et un public surtout de beau temps dans une ville ultra compétitive en offre de sport de haut niveau. Le budget est comme partout presque tabou mais semble parmi les grands budgets de la ligue nationale, les sponsors sont donc présents mais certains preneurs d’intérêts (ville, canton, politique) ne sont clairement pas en soutien. La marque est peu connue dans le hockey européen et donc tout doit se jouer sur les éléments suivants

1.      L’organisation qui va matérialiser cette ambition et gérer tous les paramètres pour les objectifs fixés. Nous retrouvons l’entraineur qui incarne cet objectif, le martèle et convainc les joueurs, la direction, le staff et les joueurs de leur impact pour son atteinte. Nous avons aussi son premier relai, l’emblématique capitaine Noah Rod et certainement d’autres personnes clés du vestiaire chez les joueurs et le staff.

2.      Le savoir faire individuel, d’équipe et de management qui doit transformer d’excellent solistes en une symphonie imparable.

… qui fait la différence

Mais la plupart des équipes ont tout ceci. Ce qui me semble faire la différence dans cet exemple, c’est une valeur de professionnalisme forgée depuis l’ère de Chris McSorley , du travail efficient mis en place par Patrick Emond pour atteindre la finale et enfin de cette culture de l’objectif de Jan Cadieux , le tout sous l’égide du directeur sportif Marc Gautschi .

Annoncer un objectif ambitieux est une prise de risque et l’atteindre peut s’apparenter à de la chance. Mais le faire deux fois sur des objectifs différents montre à mon sens une culture forte en place, base pérenne pour le futur. Cela signifie aussi pour son auteur autant une confiance dans son organisation qu’une sortie de sa zone de confort.

Un club de hockey est une entreprise et cet exemple nous montre des concepts connus mais qui se heurtent à d’autres comme la discrétion, une certaine opacité dans la gouvernance, une mesure dans la communication comme l’ambition, etc.

Si vous parcourez le livre de Sébastien Telley et Nicolas Puchat «Champions, le récit de la saison historique du GSHC», vous y trouverez beaucoup de ce qui fait un titre, du travail, des larmes, de la sueur, des émotions mais le matériel est sous-jacent, il ne fait pas la différence entre gagner et perdre.

Les limites de l’argent

Le sport en est une preuve extrême, le matériel n’est pas une garantie de succès. L’exemple du Matra Racing montre un échec qui a révolutionné le paysage du football français donc un documentaire est le témoin. Bien sûr, il faut un budget, donc un chiffre d’affaires, et une infrastructure, mais c’est le capital intangible comme la culture, le savoir faire, le capital humain et organisationnel qui fait la différence. Celui-ci n’est malheureusement pas dans les bilans sauf si nous intervenons même hors d’une stratégie d’acquisition ou de cession puisque la construction d’un actif et la détente d’un passif sont des objectifs quotidiens pour la pérennité d'une organisation qui faire l'histoire d'une entreprise et la légende d'un club.