Le télétravail peut-il contribuer à faire chuter les arrêts maladie ?

Il y a quelques jours le gouvernement français annonçait qu'il souhaitait agir contre les arrêts de travail délivrés en téléconsultation, lorsqu'ils ne sont pas délivrés par le médecin traitant, en espérant réaliser une économie estimée à 100 millions d’euros (voici une des sources).

Si on peut comprendre qu'il faille lutter contres les pratiques sociales abusives de certains, beaucoup trouveront que le timing de cette proposition est assez mal choisi, au moment ou nombre de français ne peuvent pas se soigner faute de médecin disponible. La plupart d'entre nous peut le constater : les déserts médicaux concernent désormais aussi bien les villes que les campagnes et la situation touche l'ensemble des professions médicales dont les médecins généralistes.

Personnellement j'habite à 30 mn du centre de Paris et suite au départ de mon ancien médecin traitant, j'ai eu le plus grand mal à trouver un médecin généraliste qui acceptait de prendre de nouveaux patients. C'est un vrai parcours du combattant ! On me renvoyait spontanément vers les urgences ou vers SOS médecin, même pour une simple grippe ! Et quand j'appelais les urgences pour mes proches ou moi même, les télé-agents faisaient tout pour me dissuader de venir garnir les salles d'attente et couloirs des hôpitaux déjà saturés de monde. C'était finalement à moi d'estimer ce qui était une urgence et ce qui n'en était pas une et la plupart du temps je finissais par abandonner.... Ainsi de guerre lasse, beaucoup de français renoncent à se soigner et sont contraints de tirer sur la corde.

Face à cette situation, pour les plus "digitaux" d'entre nous, il reste la solution miracle, des consultations médicales en lignes (genre Mèdecin.fr...) permettant d'accéder à un médecin disponible pris à la volée. Nombre de mairies proposent d'ailleurs des cabines médicales pour permettent aux citoyens en galère, d'accéder à une consultation médicale en ligne de ce type. J'ai essayé une fois. C'était pas idéal mais ça m'a sorti provisoirement de la panade.

C'est donc à cela que le gouvernement veut s'attaquer du moins en ce qui concerne la délivrance des arrêts de travail ? Il est donc vain d'espérer utiliser ce type de dispositif de télé consultation pour demander un arrêt de travail ? Et comme les déserts médicaux ne sont pas prêts à se résorber demain au final on risque de créer de nouvelles fractures sociales

Sans médecin traitant, pas arrêt maladie !

A mon avis, si l'on considère que nombre de français qui consultent en ligne le font en dernier ressort, contraints et forcés, je trouve qu'interdire la délivrance d'arrêts maladie en téléconsultation quand on n'a pas la chance d'avoir un médecin traitant officiel, est une double peine pour ceux qui ne sont pas des resquilleurs du système et ont la malchance de vivre dans des déserts médicaux. A l'heure de l'avènement des IA, les abus doivent pouvoir se tracer numériquement il me semble, sans pénaliser tout le monde pour autant.

Et puis, la réalité n'est elle pas que finalement, avec l'avènement du #télétravail, beaucoup de salariés malades choisissent désormais de continuer à travailler de chez eux même malades ? De nombreux sondages tendent à confirmer. J'en ai moi-même récemment lancé un sur Linkedin qui semble confirmer ce fait.

Officiellement, si on est en arrêt de travail (pour cause de maladie ou accident de travail ou maladie professionnelle), on doit s'abstenir d'exercer toute activité non autorisée par le médecin y compris depuis le domicile (source).

Mais en réalité un nombre de salariés de plus en plus conséquent ne sollicite même plus d'arrêt de travail et s'oriente spontanément vers le télétravail en priant de se rétablir sans repos. La dérive risque donc d'être mécaniquement masquée par l'attitude même des salariés.

Il est vrai que le télétravail est bien pratique dans certains cas, et je suis d'ailleurs le premier à le faire. Mais je crains néanmoins que cela génère des dérives avec des conséquences sur la santé des Français. En effet, qui décidera quand on doit s'arrêter vraiment ou continuer de travailler quand même ? Quelle sera la pression sociale sur le sujet ? L'attitude de l'employeur ? Quelqu'un qui choisit de privilégier sa santé au détriment de son job sera t-il considéré comme un tire au flanc et à l'inverse celui qui continue de travailler sur son lit d'hôpital sera t-il vu comme un workaholic voire un fayot ? Ce choix personnel pourrait-t-il influer sur une carrière comme le choix de recourir ou pas au télétravail peut favoriser les adeptes du présentéisme ? L'avenir le dira, mais selon moi il est indispensable que les partenaires sociaux se saisissent du sujet pour que le remède ne soit pas pire que le mal.

Voilà pour ce petit article en forme de déclaration d'opinion

Je précise que ces réflexions et remarques n'engagent que moi. Je me trompe peut-être.

Mais ce qui m'intéresse ici c'est la discussion. Alors vous qu'en pensez-vous ?