L’entrepreneuriat, une lutte entre confiance et défaitisme
En décembre 2017, Sonia Valente quitte le salariat en se faisant la promesse suivante : ne jamais y revenir. Utopique ou pas, à ses yeux l’entrepreneuriat est synonyme de liberté. La liberté dans le choix de son activité, la liberté dans son organisation du travail. La liberté d’être finalement libre.
Mon projet entrepreneurial partait de mon propre vécu : accompagner les femmes qui aspirent à vivre une vie professionnelle épanouissante en les aidant à trouver, définir et construire leur projet de reconversion. C’est comme ça que j’ai créé Wit Potentielles.
En trois mois et sans m’en rendre compte, la liberté qui m’a fait choisir cette voie s’est transformée en prison. Une prison psychologique puis physique dans laquelle j’étais à la fois coupable et victime. Coupable à cause de mon état d’esprit d’habitude défaitiste et manquant de confiance en soi, et victime à cause de mon état d’esprit confiant, déterminé et bienveillant que j’ai développé au cours de ma reconversion.
Et puis il y eu ce jeudi du début du mois de novembre 2018. Mon réveil a sonné à 8h comme tous les matins, mais ce jour-là, je ne me suis pas levée. Je ne pouvais littéralement pas sortir du lit parce que j’étais épuisée. Épuisée physiquement et psychologiquement.
Je suis restée dans mon lit, dans le noir, pendant trois jours à lister toutes les raisons pour lesquelles je n’avais pas les épaules d’une entrepreneure. Puis, le dimanche matin, j’ai fait mon auto-analyse pour comprendre ce qu’il venait de se passer. Il fallait que je me rendre à l’évidence, ce n’était certainement pas comme cela que j’arriverai à faire de mon projet professionnel une réalité concrète. Alors, après trois jours de végétation, j’ai repris les devants. Je vous explique en trois points comment mon état d’esprit défaitiste a pris le dessus sur mon état d’esprit confiant et comment j’ai inversé la balance pour ne pas abandonner mon projet entrepreneurial.
Me comparer à la concurrence a fait prendre l’avantage à mon état d’esprit défaitiste
En prenant la décision de devenir entrepreneure dans le secteur de la reconversion professionnelle, je savais que le marché était très concurrentiel. Pour me démarquer, j’ai commencé par auditer la concurrence : prestations de services, ton utilisé, formations, cible, ligne éditoriale…
Une tâche dont j’ai sous-estimé le risque. Mon audit ponctuel est devenu régulier. Je passais peut-être deux heures par jour à lire les articles de mes concurrents, à suivre les échanges sur les réseaux sociaux. Un nouveau programme, une nouvelle formation pour eux, alors que moi j’en étais bien loin !
En me comparant à mes concurrents, je me disais que j’étais incompétente, lente. Et que jamais je n’arriverai à me démarquer. Toutes les idées que j’avais étaient déjà trouvées. Quand je commençais à rédiger un article, un qui traite du même sujet sortait chez mon concurrent. Alors, je stoppais l’écriture, pensant que je n’étais pas suffisamment rapide.
Or, je me trompais d’adversaire. Ce n’était pas mon concurrent mon adversaire. C’était moi-même. À chaque fois que j’ouvrais la dernière newsletter de mon concurrent ou que je m’insultais d’incapable après la lecture d’un article, je nourrissais mon état d’esprit défaitiste.
J’avais donc si peu d’estime envers moi et si peu de confiance en moi pour considérer que je pouvais apporter une valeur ajoutée, un regard différent et intéressant de la reconversion qui parlerait à certains visiteurs. En adoptant cet état d’esprit, je m’éloignais un peu plus de l’esprit confiant et déterminé que doit avoir un entrepreneur pour réussir.
Ne plus répondre à mes besoins de sommeil et de faim a été le coup de grâce
Je n’ai pas vu les choses s’empirer. J’étais obsédée par l’idée de rattraper mes concurrents alors que je me trompais de combat. Je voulais arriver à leur niveau en seulement deux mois. Une obsession complètement stupide et irréalisable. Eux s’étaient lancés un an voire trois ans auparavant pour certains.
Alors, j’ai travaillé n’importe comment. J’écrivais des articles à la chaîne, pensant que ça allait faire décoller mon activité par miracle. J’ingurgitais un maximum de lectures, j’écoutais le plus de podcasts possible pour enrichir mes connaissances et trouver l’inspiration et puis je suivais des formations en ligne.
Je n’avais pas de plan préétabli, aucune stratégie définie. C’était un véritable bordel. Un bordel qui ne faisait qu’alimenter mon état d’esprit défaitiste. Pourquoi voulais-je arriver au niveau de mes concurrents ? Pour satisfaire un besoin de reconnaissance.
Pourtant, je recevais de la reconnaissance de la part des volontaires que j’accompagnais dans le cadre de ma formation. De la part de mes collègues de promo. Ou de la part de mon entourage qui reconnaissait ce talent que j’avais pour écouter les gens, les comprendre et faire ressortir le meilleur d’eux-mêmes. Plus je recevais des compliments et de la reconnaissance, plus mon niveau d’auto-exigence augmentait.
Or, comment devenir une bonne entrepreneure sociale si j’étais incapable de voir mes avancées et mes réussites ?
En n’ayant de cesse de faire grimper mon niveau d’auto-exigence, j’ai perdu toute bienveillance et tolérance envers moi-même. Alors, sans m’en apercevoir, j’ai commencé à moins me nourrir. Puis, je n’arrivais plus à trouver le sommeil parce que je ne voulais pas me déconnecter de mon activité.
Même fatiguée, il était hors de question que je fasse une grasse matinée. Le week-end, pas de sorties non plus. Je travaillais le samedi et le dimanche, sans relâche pour des résultats inexistants. Des résultats inexistants parce que je faisais les choses n’importe comment.
Aucun plan, aucun cadrage, je travaillais le matin, le midi, le soir, la nuit. J’étais totalement obsédée par la réussite de mon projet. Une réussite qui n’était certainement pas près d’arriver si je continuais à adopter un tel état d’esprit défaitiste.
La volonté et la persévérance m’ont donné la force de retrouver un état d’esprit confiant
Au moment où je me suis effondrée ce jeudi de novembre, j’avais deux options :
- soit laisser mon état d’esprit défaitiste prendre définitivement l’ascendant et me lamenter sur mon propre sort pour revenir dans le salariat,
- soit adopter immédiatement cet état d’esprit confiant que j’avais au fond de moi et qui m’avait donné la force de devenir entrepreneur pour me donner les moyens de faire de mon projet une réussite.
Le combat est en définitive facile. Il suffit de le vouloir. Facile, mais pas pour autant simple. C’est un combat de tous les jours pour modifier sa perception de soi-même et du monde.