Les clés de la transformation #6 -Tisser des liens étroits avec ses pairs

Les clés de la transformation #6 -Tisser des liens étroits avec ses pairs

Quand j'ai été nommé à certains postes, je me suis quasi instantanément senti SEUL. Seul face à mes décisions, seul face à mes équipes, seul face à ma hiérarchie, seul face à mon avalanche de problèmes ne pouvant souvent pas partager mes angoisses avec mes amis, ma famille... Et je sais pour le coup que je suis loin d'être le seul à avoir ressenti ce type de solitude...

Je l'ai particulièrement éprouvée lorsque j'ai été nommé CEO de la filiale Fioulmarket.fr. Quand j'apprends que je vais devenir "président" de cette société, c'est bien sûr un honneur. Je pense aussitôt à mon père qui était facteur et qui pensait de lui qu'il n'était pas assez ceci ou pas assez cela. Le plus dur c'était quand il disait - certes avec humour - "Je suis un raté". Il rappelait qu'il n'avait qu'un certificat d'études en poche, et qu'il avait fallu partir tôt de sa famille pour devenir facteur en tant qu'ainé de 7 enfants. Passionné de vélo, sa mère lui avait suggéré de devenir facteur. "Tu sais, ils prennent tout le monde et tu pourras vivre ta passion du vélo." Il l'aimait sa maman, de tout son cœur, et ce jour-là, avec plein de gentillesse, elle venait sans le vouloir de sceller la suite de son histoire professionnelle, et de mettre un joli plafond de verre au-dessus de sa tête.

Passer du titre de CEO à sa fonction...

Quand je prends ce poste de CEO, je suis, ce jour-là, fier d'avoir explosé ce plafond qui nous retenait lui et moi. Pour autant, je reprends vite mes esprits, je dégonfle mon égo et je liste toutes mes incompétences pour occuper ce poste. La liste est longue, affreusement longue... : le juridique, le social, le fiscal, le financier, la comptabilité... J'ai le titre de CEO, comment maintenant occuper la fonction ????

Je regarde aussi mes compétences : projets, IT, commerce et je les trouve bien insuffisantes. Tout me parait inaccessible. Mon syndrome de l'imposteur se remet brutalement en marche. C'est violent, j'éprouve une forte angoisse qui me paralyse. Je vérifie auprès de ma boss de l'époque qu'elle ne s'est pas trompée sur le titre car nous devons mettre à jour les statuts de l'entreprise. "Non, me dit-elle, tu seras le CEO de cette filiale, pourquoi ??". Tout passe dans ma tête, à la fois l'envie de démontrer que j'en suis capable et tout à la fois l'envie de fuir... très loin ! Certains me diront, "ce n'était pas ta boite et tu ne prenais donc pas beaucoup de risque personnel". C'est sans doute vrai. Mon atypisme me fera néanmoins me battre comme un lion comme si c'était le cas.

Très vite, je veux me faire une idée sur ce qui va et ce qui ne va pas dans cette jeune entreprise dont j'ai maintenant la responsabilité. Je regarde les moyens dont je dispose. Cette société existe sur le papier mais elle est restée une émanation de la grande maison, elle s'appuie sur la DSI de la branche, une assistante RH gère la paie et les problématiques sociales lorsqu'elle a le temps (~5% de son temps), la responsable marketing de Fioulmarket passe 1/3 de son temps à répondre aux appels clients, le budget me parait bien maigre et nous n'avons même pas nos propres locaux... Nous ne sommes pas nombreux (4), les clients ne semblent pas très satisfaits, l'informatique laisse à désirer, je n'ai pas en main les fondamentaux, même pas une pauvre balance âgée alors qu'il y a de nombreux impayés... Je suis le "patron" d'un bateau qui semble prendre l'eau. La comptabilité de l'entreprise m'envoie le "grand livre" des comptes. Je me revois un week-end faire mon propre tableur excel pour tenter de comprendre, ne serait-ce qu'un peu, si oui ou non, nous sommes dans les clous des budgets validés avant mon arrivée. Je vérifie moi-même les feuilles de paie, j'édite sur mon ordinateur les contrats de travail... Où vais-je bien pouvoir emmener ce navire ?

Comme si cela ne suffisait pas, mon analyse me pousse à penser que tout le site, pourtant récent, doit être refondu. Tout me pousse à penser que nous allons devoir beaucoup recruter aussi alors que les résultats sont dans le rouge vif dans un groupe qui est habitué à une grande rentabilité. Il m'est régulièrement demandé des comptes : un budget, un plan long-terme à 10 ans... Le modèle d'achat n'est pas non plus lisible. Nous avons été juste conçus comme un site internet ni plus ni moins et non comme une filiale à part entière. Tant de choses doivent être travaillées et tant d'autres doivent être repensées. Comment vais-je convaincre sur autant de critères avec la trouille au ventre de ne rien réussir ?

Je suis maintenant conscient de mes multiples incompétences... C'est bon de ce côté-là, c'est très clair ! Que dois-je faire ? A qui puis-je en parler ? Qui ne le traduira pas comme le signe d'un mec qui n'a décidément pas la taille du costume qui vient de lui être donné ? J'entretiens donc une forme de masque pour montrer un visage plus serein à l'extérieur, pour tout simplement survivre. J'essaie de me centrer aussi sur les urgences car mon agenda est plein 7 jours sur 7, 12 mois sur 12, et je ne dors alors plus que 3 à 4h par nuit. Beaucoup de mes proches me disent que je suis inconscient - ce qui ne m'aide pas vraiment - et le risque d'épuisement est réel. Epuisé et stressé, je suis très conscient de la lourde tâche qui m'attend.

Aucun texte alternatif pour cette image

Prendre le temps que je n'ai pas pour m'ouvrir aux autres...

Malgré cet agenda plus que rempli, il me vient une idée. Aller voir ce qui se passe ailleurs pour chercher de l'inspiration et de l'expertise... J'ai besoin de sortir de mon cadre habituel. Mais comment trouver cela ? Qui rencontrer ? Je m'inscris sur Linkedin, je découvre ce réseau social, et je commence à lire ce qui est publié. Je me sens encore plus incompétent. Les autres semblent bien plus experts que moi. La comparaison me paralyse un peu plus.

Je cherche des "associations", des groupes où je pourrais rencontrer des gens un peu comme moi. Cela doit bien exister quelque part des gens qui pigent pas grand-chose au digital et qui doivent pourtant faire du résultat en e-commerce... Non ? Je tombe, tout à fait par hasard, sur les "Big Boss". Je regarde les vidéos des évènement et je me dis aussitôt que ce n'est vraiment pas fait pour moi. Cela semble rassembler des fêtards, un peu attardés de beaux quartiers. Je ne suis ni l'un, ni l'autre. Je suis un mec "sérieux" (qui a dit chiant ?) qui vit dans le 9-3 et qui est issu de la classe ouvrière... je ne vais certainement pas perdre mon temps dans ces endroits où je me sentirai régresser comme dans une soirée BDE de mon école d'ingénieurs...

Ma solitude et mes carences restent ma principale douleur. Je décide finalement de me faire violence. Je me dis que cela ne coûte rien de tenter d'aller passer un week-end avec ces personnes qui ne semblent pas me ressembler. On est en Juin 2016 et me voilà parti en Crête où je retrouve ces joyeux lurons. Je découvre, étonné, qu'il n'y a pas que des fêtards et que nous démarrons sur les chapeaux de roue par des rendez-vous qu'ils appellent des "datings". Le fondateur, Hervé Bloch, donne des coups sur un gong toutes les 7 minutes et un nouveau prestataire me fait alors son pitch. Nous enchainons les rencontres et je suis frappé par la richesse des échanges. Je me sens encore très imposteur (peut-être même encore un peu plus) de découvrir toutes ces boites dont je ne soupçonnais même pas l'existence. Durant tout le week-end, je ne cesse de rencontrer dans des cas de figures très variés des professionnels du digital. Mon week-end me fait faire un bon de géant.

Je me rappelle, dans l'avion de l'aller, avoir conversé avec les patrons d'une boite qui s'appelle Testapic. Quand ils m'expliquent le service rendu par leur entreprise, je trouve cela fabuleux. Ils permettent de collecter rapidement et efficacement (disent-ils) les avis de clients en s'appuyant sur un réseau de personnes très variées qui passent du temps sur notre site et nous donnent du feed-back précieux. Je me rendrai compte par moi-même un peu plus tard que cette prestation est effectivement ultra qualitative pour gagner des parts de marché et améliorer mon précieux taux de conversion. Mais s'ils avaient su qu'à l'époque c'était le moindre de mes soucis... Je voulais déjà réussir à recruter un CTO, des PO... des devs pour construire notre nouveau site web. J'étais sous l'eau et bien loin de mettre cette prestation en priorité haute. Je ne savais pas qu'un an plus tard, les conditions le permettraient.

Bref, sans vous noyer dans le détail, je découvre qu'en 1 week-end, j'en ai appris plus qu'en 2 ans... Je décide de me forcer à investir beaucoup de mon temps dans ce type de rencontres. Je monte progressivement à 3 diners par semaine consacrés à ce type d'échanges. Je coupe, je taille dans mon agenda qui était plein à craquer. Soit c'est une priorité, soit ce n'en est pas une. J'irai aussi au One-to-One de Monaco qui est également très qualitatif et complémentaire, j'assisterai également à tous les formats des Big Boss (diners, Winter, Summer, verticales...). De l'extérieur, j'entends des feed-backs goguenards, "tu t'amuses bien, dis-donc !". En creux, j'entends "tu n'as pas autrechose à faire que de manger des petits fours ?". Peu importe. C'est là que beaucoup va se jouer. Je deviens de plus en plus "fluent". Je deviens un passionné de SEO, d'UX, de SCRUM, Marketing Automation, de SEA... Je comprends maintenant ce que l'on me dit et a priori, je commence à être moi-aussi compris. Et surtout, j'utilise cette compétence pour accélérer chaque jour la transformation de la société que je dirige. Les semaines passent et c'est un cercle vertueux qui s'est mis en place et qui accélère ma montée en puissance et celle de mon entreprise. Les recrutements s'accroissent, les résultats s'améliorent nettement, la société prend son indépendance, les expertises se multiplient, nous marquons de plus en plus de points et nous gagnons chaque mois un peu plus en agilité. Fioulmarket devient une référence dans notre groupe avec ses 100 M€ de chiffre d'affaire et beaucoup viennent nous rendre visite pour comprendre comment nous avons réussi à ce point. Nous lancerons ensuite 2 autres sites internet et le cercle vertueux ne cessera de produire ses magnifiques effets. Comme indiqué la semaine dernière, j'ai quitté ma zone de confort pour passer la zone de peur, gagner ensuite la zone d'apprentissage pour peupler la zone de croissance. Cet investissement qui a été le mien d'aller à la rencontre des autres acteurs du digital a été le déclencheur de tant de réussites !

Aucun texte alternatif pour cette image

Rendre aux Big Boss ce qui appartient aux Big Boss

Quand Hervé Bloch me remet le prix du "Big Boss for ever", ce n'est pas le gros truc en verre, joli au demeurant, qu'il me donne qui fait que je suis très ému ce soir-là. C'est plutôt que j'éprouve une profonde gratitude pour ce que m'a apporté ce type d'évènements. J'ai aussi une profonde gratitude pour moi-même d'avoir su mettre en top priorité cet investissement en temps.

Et de manière indirecte, je rencontre mes pairs qui travaillent dans d'autres groupes et qui rencontrent exactement les mêmes difficultés. Les échanges sont parfois très sérieux et basculent parfois en mode "alcoolique anonyme" dans le sens où je m'aperçois que je vivais la même solitude que les autres, les mêmes poids, les mêmes contraintes. Nous pouvons en parler pendant des heures et cela nous fait un bien fou. S'immerger dans un monde où les autres tirent vers le haut c'est comme aller vivre 6 mois en Angleterre pour pratiquer l'anglais. Il est bon de régulièrement se rappeler un fondamental : nous sommes la moyenne des 5 personnes que nous fréquentons le plus et je sens que cette "communauté" me fat beaucoup de bien et accélère ma croissance.

Je me constitue aussi un réseau, je n'ai pas peur de le dire, d'AMIS. Des amis sincères, des combattants de la transformation digitale, des pionniers pour certains, des mercenaires pour d'autres. La puissance de ces rencontres a été multiple : me redonner de la confiance, oser faire du "test and learn" à moindre coût, passer le coup de fil qui va bien pour obtenir un bon conseil ou du feed-back.

Et je me suis retrouvé pris dans cette ambiance qui me paraissait initialement uniquement "fêtarde". Je me suis surpris à faire partie de cette bande qui aime se retrouver avec ou non l'appui de l'organisation. Car Hervé Bloch a tout compris, la convivialité est indispensable pour créer du lien, le reste c'est du sérieux ! Les prestataires le savent, rien n'est joué après ces rencontres. Tout reste à démontrer. On peut avoir trinqué près de la piscine et être recalé après un POC infructueux de 5 K€. Ce n'est pas du copinage mais bien un accélérateur de rencontres et de business. Plutôt que de répondre à des sollicitations quotidiennes par mail ou par téléphone, c'est une occasion d'aller vite détecter les prestataires qui nous feront aller plus vite et plus loin.

Quand les Big Boss me font l'honneur de me choisir Président du jury, je dois monter sur scène devant 600 personnes pour l'annoncer. C'est un moment que je n'oublierai jamais. Je me reconnecte en montant les marches à mon père qui n'est plus de ce monde. J'improvise un discours et je m'étonne moi-même de parler de mon papa assez intimement devant 600 personnes. Aussi étonnant que cela puisse paraitre, un silence et même une vraie connexion s'instaurent entre nous. Au-delà de ce que je dis, je sens que nous formons une communauté de "transformers", ma vie prend vraiment du sens et ce n'est pas l'égo flatté qui le dit, c'est un sentiment plus profond de servir à quelque chose de plus grand qui nous connecte tous. Ce moment sera la graine qui germera plus tard pour me pousser à créer ma propre activité d'accompagnement.

Sans les Big Boss, je sais que j'aurais échoué. Je n'aurais pas non plus eu l'honneur de rencontrer des personnes aussi prestigieuses et généreuses que Maud Bailly. Elle me fera l'honneur de venir dans notre groupe, en plein COVID, témoigner de la manière dont elle a géré la transformation digitale du groupe ACCOR avec notamment le programme de fidélité ALL (Accor Live Limitless). Je n'aurais pas non plus ri aux éclats avec une Caroline Puechoultres tout aussi brillante, je n'aurais pas été invité pour partager sur mes expériences au Ministère des armées par la fabuleuse Valérie Dagand, je n'aurais pas refait le monde avec ma si chère Sophie Mouquet, je n'aurais pas eu l'immense privilège de rencontrer Patrycja Mothon Bloch... Ni Julien Henri Maurice, ni Arnaud Le Roux ne seraient devenus mes amis. Bref, ma vie serait toute autre et je n'aurais pas compris combien transformer nos boites passait par cette ouverture, ce partage, cette spontanéité, cette authenticité, ce "réseau", cette convivialité aussi, pour provoquer cette accélération dans l'échange puis le résultat.

Aussi, je voudrais terminer cet article en remerciant avec beaucoup de force et de sincérité mon ami, Hervé Bloch. Oui, je le sais, Hervé, que je ne serai pas "Big Boss à vie" comme tu l'avais pourtant clamé haut et fort. Néanmoins, je ferai toujours partie de cette "Big Boss family" et je t'en serai éternellement reconnaissant. Cela continuera de me guider dans ma façon de faire et de tisser des liens avec mes pairs.

A vous qui avez eu le courage de lire cet article intégralement, je ne saurais trop vous recommander d'investir du temps pour sortir de votre cadre quotidien et d'aller vous confronter à vos pairs, ainsi qu'à des prestataires de tous types, qui feront votre croissance de demain.

Olivier GUILHOT GAUDEFFROY

Directeur Digital de l'engagement client ★ Head of Digital & CRM Directeur Marketing et Digital CMO CDO ★ Expert en delivery, transformation digitale et expérience client

3 ans

Merci Stéphane Séguin pour ce beau moment de partage inspirant. Nous nous sommes rencontrés grâce à Hervé Bloch. Je me rends en ce moment dans le sud pour un événement digital cité et je penserai à toi !

Charlotte Chambaret

Facilitatrice de nouveaux possibles | Accompagnement vers la Joie et la Légèreté

3 ans

Il est top cet article. J’aime « soit c’est une priorité, soit ce n’en est pas une ». Être prêt à regarder ce qui cloche, être déterminé à le changer et se donner les moyens pour. Bravo pour le chemin ! J’expérimente aussi de plus en plus la valeur de créer des liens. Sortir de ses ornières en s’enthousiasmant de la diversité des façons de faire. 20 cerveaux au lieu d’1 !

Christelle Coutarel

Coach emploi certifiée - Praticienne en bilan de compétences avec @COM-C France - Job coaching Suisse/France 🕵️♀️ 💪 Accompagnatrice VAE - Vous accompagner à réussir votre objectif🚀

3 ans

Je viens de prendre le temps de lire ton nouvel article et j'ai bien fait! Merci pour ta sincérité et pour ce que tu transmets.

Valerie DAGAND

DELEGUEE GENERALE @ numeum | Lecturer & speaker - Leadership and governance - GameChanger

3 ans

Bravo Stéphane Séguin pour ce parcours et l’authenticité de ton témoignage C est une belle transmission de valeurs que tu livres la.

Karine BLANCHARD

Insertion & économie circulaire

3 ans

J’adhère à 100% à la démarche de partage d’expérience, toujours source d’enrichissements mutuels ! Si certains sont intéressés par la transformation digitale de la relation commerciale BtoB, partageons nos expériences !

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Autres pages consultées

Explorer les sujets