Les injonctions paradoxales de la réforme des Retraites

Les exigences contradictoires de notre société sont-elles insurmontables ? Elles trouvent leur place dans notre quotidien où la création de besoins et notre volonté de consommer vient parfois s'opposer au développement durable. On peut les retrouver aussi dans l'organisation du travail où collaborateurs et managers opérationnels peinent à répondre aux gains de productivité demandés tout en maintenant la qualité de la production ou de service rendus. Au final, nous en sommes parfois à l'origine, parfois les victimes mais toujours les acteurs.

Le système de retraite n'échappe pas à la règle. Nous attendons de nos dirigeants qu'ils garantissent un niveau de pension suffisant à chacun et cela sans pour autant que les contributions au système soient véritablement équitables tout en rejetant le débat sur le financement et le fonctionnement de ce dispositif de solidarité entre les générations.

Nous paraissons comme tétanisés devant l'étendue des déficits accumulés et à venir ( + de 10 milliards d'euros par an en tendance sur les 25 prochaines années ) selon les projections du Conseil d'orientation des retraites (COR) et par les inégalités de traitement générées par des caisses et des règles multiples . Partenaires sociaux et Gouvernement éprouvent les pires difficultés, non pas pour définir une stratégie de consolidation et de transformation de notre système ce qui serait compréhensible à ce stade, mais simplement pour se mettre d'accord sur la réalité de la situation actuelle. C'est pourtant le rôle du COR et du Comité de Suivi des Retraites que d'éclairer ces acteurs. La loi de 2014 venant donner tout son sens aux travaux du COR en créant le CSR dont la mission est d’assurer un suivi annuel d’indicateurs clefs décrivant l’état et les perspectives du système de retraite et de formuler des propositions pour ramener le système sur une trajectoire conforme à ses objectifs s'il devait en dévier.

L'avis du CSR est explicite. Il souligne que les prévisions du COR de 2022 sont plus inquiétantes que celles de 2021. Que l'excèdent de 2021 ne doit tromper personne et que la tendance pour 2022 et 2023 pourrait être même pire qu'annoncé au regard des risques que font peser sur la croissance la crise énergétique et les tensions internationales.

Alors, oui rentrons dans ce débat sans apriori ni préjugé et regardons objectivement la situation de notre système de retraite ! Complexe au possible, il est devenu le pré carré d'experts portés par des convictions antagonistes qui débattent sous le regard incrédule et inquiet de nos concitoyens. Un système en équilibre sera profitable pour tous et nous ouvrira la voie d'une transformation profonde. Nous pourrons alors construire un système qui donnera toute sa place à la retraite progressive, à l'individualisation de l'âge de départ en fonction du parcours professionnel et de l'état de santé et permettra la refonte des droits familiaux et conjugaux.