Les limites et les échecs de la science et de la raison
Contrairement à l’enthousiasme de Giordano Bruno, troubadour-philosophe de l’infini (Ernst Bloch), ou de Johannes Kepler, Blaise Pascal fut un des premiers penseurs à percevoir les limites du discours scientifique moderne et à développer une pensée féconde de la contradiction qu’il appelle contrariété. Pour lui, la raison ne devrait pas occuper toute la place. Descartes inutile et incertain, se permet-il d’écrire, ne partageant pas l’assurance de l’auteur du Discours de la Méthode. Il voyait que la raison apparaît – s’apparaît à elle-même – comme le processus de sa propre construction (Jean Ladrière). Pour Pascal, la raison ne conduit pas à l’arraisonnement du monde, car il a compris que la pensée est affaire de conscience et non de raisonnement (Bertrand Vergely).
Du fait des découvertes extraordinaires de la science moderne naissante, Pascal contemple l’ample sein de la nature qui est illimitée en étendue, en complexité et en diversité, de l’infiniment grand à l’infiniment petit, de l’infini au vide, dont l’homme est creusé et habité, et donc angoissé, s’il maintient sa conscience ouverte. Pour Pascal, toute connaissance est perfectible, et la vérité entière échappe toujours. L’homme est grand par sa pensée et sa soif d’infini, mais précaire, un roseau, le plus faible de la nature, mais un roseau pensant, sans demeure dans l’immensité, plongé dans la solitude. Tiré du néant, néant lui-même à l’égard de l’infini, l’homme n’est plus la mesure de toute chose, rompant avec la sagesse de l’Antiquité. Sa condition est accidentelle: combien de royaumes nous ignorent ?
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