Les migrations internationales
Le 20 juin 2016 était la journée mondiale consacrée aux réfugiés. Cette date coïncide avec l’adoption de la Convention de 1951 relative à leur statut.
Les medias qui s’y sont intéressées en ont parlé de manière diverse avec toujours un peu d’approximation dans les mots. Réfugiés, déplacés, déracinés, migrants…
Par ailleurs les commentaires sur ce qu’il convient de faire ou pas relaient des positions de fermeté affichée, à l’expression d’un « devoir moral » pour les accueillir.
Essayons avec cette note de contribuer à clarifier un peu ce sujet complexe, en nous penchant aussi sur l’action à mener, et par qui.
Introduction sémantique : Des migrants économiques, et des réfugiés de guerre ou fuyant une persécution individuelle.
- Les premiers, souvent résumés ou qualifiés de migrants irréguliers sont relativement stables en terme de chiffres ; environ 235 millions dans le monde. Liés à mondialisation, à l'évolution démographique, aux inégalités de revenu ou encore au changement climatique,
- Les seconds s’accroissent au regard de l’absence de règlement politique des conflits, qui s’additionnent, et des menaces directes pesant sur certains au regard de leurs opinions, genre, etc... Ils sont plus de 62 millions et nous atteignons un record jamais atteint depuis la seconde guerre mondiale. Près de 39 millions sont déplacés dans leur pays, 20 millions ont quitté leur pays (ils sont réfugiés), dont 5,1 palestiniens, et environ 2 millions sont demandeurs d’asile (réfugié qui n'a pas encore obtenu de réponse d’asile du pays où il a trouvé refuge).
Qui accueille qui :
- Avec 4 millions de réfugiés et 7,6 millions de déplacés internes, la Syrie est en 1ère position des pays d’origine des réfugiés. Suivi par l’Afghanistan, la Somalie, le Soudan et le sud-Soudan, la RDC, le Myanmar, la RCA, l’Irak et l’Erythrée.
- La Turquie est le 1er pays d’accueil des réfugiés (1,6 millions) , suivi du Pakistan (1,5 million) et du Liban (1,15 million). Mais Turquie et Pakistan sont en mesure de prendre en charge les réfugiés, tandis que le Liban, la Jordanie et l’Irak ont besoin d’une aide extérieure. 95 % des réfugiés syriens vivent dans les pays limitrophes, Liban, Jordanie, Turquie, Irak, Egypte.
- Le Liban est le 1er pays d’accueil si on considère le ratio par rapport à sa population et son PIB : 232 réfugiés pour 1000 habitants. (Turquie 21 réfugiés pour 1000 habitants).
- Les 28 pays de l’UE accueillent en moyenne 1,1 réfugié pour 1000 habitants. La France en accueillant 0,9 demandeurs d’asile pour 1000 habitants se classe à la 19ème place de l’Union européenne.
Migrations économiques : Aider là-bas en priorité, pour répondre aux souhaits des personnes de vivre chez elles, et de contribuer au développement de leur Nation.
Concrètement, les Etats de l’Union européenne se sont réunis aves les Etats africains, à Malte, en novembre 2015. Ce Sommet de la Valette a entériné la création d’un trust fund de 1.8 milliard d’euros, financé par l’Union européennes, pour financer des programmes de stabilisation des candidats à la migration provenant d’Afrique (migrations irrégulières), lutter contre les causes structurelles de la migration irrégulière (booster le développement socio-économique), et contre les trafics, et améliorer la gouvernance des Etats.
Il s’agit à la fois de poursuivre l’aide publique au développement (santé publique, etc...), mais aussi et surtout d’intensifier l’aide économique : cela passe par l’emploi. Quelques exemples :
- Aider les TPME, (exemple du Sénégal où une agence des TPME a été créée)
- Soutenir une agriculture familiale vivrière, secteur n°1 d’emploi à haute intensité de main d’œuvre, menacé par les aléas climatiques, l’insécurité mais aussi les spéculations sur les terres, et les subventions aux agricultures du Nord.
- Travailler avec les grandes entreprises (Le MEDEF International a signé une charte avec les patronats de 64 pays africains de façon à améliorer l’environnement économique où le secteur privé a du mal à faire entendre sa voix).
- Création d’emplois dans le privé mais aussi protection des salariés dans le public : protéger les fonctionnaires qui ont un emploi mais n’en vivent pas.
Migrations « sécuritaires » : aider là-bas et accueillir ici : une responsabilité conventionnelle. En effet et pour faire écho à notre introduction, il ne s’agit pas d’un « devoir moral » mais d’une « obligation conventionnelle » portée par les Etats qui ont signé la convention de Vienne de 1951. Le devoir moral intervient ensuite pour décider du nombre de personnes à accueillir et surtout de la qualité de l’accueil et de leur intégration dans nos sociétés.
- Aider là-bas par une action militaire et diplomatique sur le terrain du conflit. Les populations prises au piège de leur conflit ne demandent que ça, en tout première priorité. Un règlement du conflit pour que les armes se taisent, que l’Etat de droit ou à tout le moins la paix s’installent, et qu’ils puissent rester chez eux.
- Aider là-bas par une action humanitaire et d’intégration dans les pays périphériques :1 premier trust fund de 4 milliards d’euros a été décidé en 2014, financé par l’Union européenne, pour aider les pays périphériques hôtes des réfugiés syriens. L’enjeu est de garder le plus possible ces personnes dans leur environnement régional pour favoriser un retour à terme. En effet, dès lors que les réfugiés auront franchi cet anneau géographique, pour se lancer dans la longue et périlleuse route de l’exil, c’est pour la très grande majorité d’entre eux, sans idée de retour.
Il s’agit donc d’apporter une aide humanitaire (alimentation, santé, abris...) mais aussi une aide structurelle aux pays (système de santé, hébergement durable etc..), en priorité dans les centres urbains : la moitié des réfugiés et près de 33 millions de déplacés sont installés dans des zones urbaines. A ces deux piliers vient s’ajouter un troisième, pas assez développé pour favoriser une intégration économique (soutien aux entreprises locales, et implantations d’entreprises internationales pour booster l’emploi des ressortissants locaux, et des réfugiés).
- Chez nous, d’abord une obligation conventionnelle : Pour ceux qui ont pris la route, l’accueil est aussi une obligation pour les pays signataires de la convention de 1951. En France, 30 000 places d’accueil ont été décidées en 2015 pour accueillir des réfugiés syriens. 400 sont arrivés aujourd’hui. Cette réticence peut s’expliquer par la méconnaissance du français pour des arabophones anglophones, l’absence de relais de diasporas. Mais aussi peut-être une lenteur dans la procédure de droit d’asile, un hébergement insuffisant (14 512 personnes ont été reconnues réfugiées en 2014 en France, pour 1600 places en Centre Provisoire d’Hébergement, dédiés aux réfugiés), et des difficultés à organiser la relocalisation des réfugiés sur le territoire national.
- Et aussi une intégration socio-économique : A nouveau, cela passe par l’emploi. Une action peut se conjuguer entre l’Etat, les entreprises, les organismes de formation.
Quelques exemples :
- Etat : Les demandeurs d’asile n’ont pas le droit de travailler pendant la procédure de traitement de leur demande : dispenser des cours de français et ne pas laisser les réfugié-e-s dans un isolement linguistique
- Entreprises : une réflexion du MEDEF sur un cadre de bilan de compétences. Un travail est en cours avec le Ministère de l’Intérieur pour permettre d’embaucher rapidement les personnes qualifiées..
- Formation : Un travail est en cours au niveau des universités pour apporter un complément de formation ou poursuivre leurs études. Une initiative de Validation des Acquis est en cours à Paris Sorbonne.