Les nominations et le renouvellement des commissaires aux comptes (CAC) : application de la Loi PACTE
La Loi dite "PACTE" a été publiée au JO le 23 mai 2019. Certaines modifications en droit des sociétés ont fait couler beaucoup d'encre : tel est le cas des propositions de modifications relatives au rehaussement et à l'harmonisation des seuils de certification légale des comptes.
I. Rehaussement des seuils
1. Dorénavant donc, la désignation d'un CAC dans les sociétés commerciales est obligatoire en cas de franchissement de certains seuils fixés par décret (décret n°2019-514 du 24 mai 2019), lequel s'aligne sur les seuils européens de référence à savoir :
- CAHT supérieur ou égal à 8M€,
- Bilan supérieur ou égal à 4 M€,
- effectif supérieur ou égal à 50 personnes.
2. Par ailleurs, il est créé une nouvelle catégorie de sociétés, également tenues de nommer un CAC en fonction de leur taille : les « filiales significatives ».
Sont ainsi tenues de désigner un CAC les sociétés contrôlées directement ou indirectement qui dépassent deux des trois seuils suivants fixés par décret (décret n°2019-514 du 24 mai 2019) :
- CAHT supérieur ou égal à 4M€
- Bilan supérieur à 2M€,
- Effectif supérieur ou égal à 25 personnes.
II. Création de la mission d’audit légal des petites entreprises (ALPE)
Une nouvelle mission pour le commissaire aux comptes est créée par la loi PACTE : l’audit légal des petites entreprises.
Cette mission est limitée à trois exercices et ne concerne que les sociétés qui ne dépassent pas les seuils européens (4/8/50). Elle consiste en une certification des comptes et à des diligences de reporting (rapport sur la certification et rapport sur les risques financiers).
Le recours à l’ALPE est possible dans deux situations :
- lorsque la société est obligée de désigner un CAC car elle est tête de groupe et non contrôlée par un personne morale ayant désigné un CAC ;
- lorsque la société est contrôlée et en deçà des seuils UE mais au-dessus des seuils de « filiale significative ».
Dans ces conditions, la société concernée est tenue de désigner un CAC et peut opter pour la mission ALPE de 3 ans plutôt que de recourir à la mission classique de 6 exercices.
Enfin, toutes filiales en-deçà des seuils fixés par décret (seuil UE et seuils des « filiales significatives ») peuvent opter pour une mission ALPE sur la base du volontariat.
III. Tableau récapitulatif sur les nominations
IV. Application pour les AGOA 2019
L’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions a été fixée au premier exercice clos postérieurement à la publication du décret n°2019-514 du 24 mai 2019. En d’autres termes, ces dispositions s’appliqueront pour les exercices clos à compter du 26 mai 2019 (le décret n°2019-514 a été publié au JO le 26 mai).
Ceci étant acté, quel régime appliquer pour les AGOA tenue en 2019 sur les comptes clos en 2018 ?
La question se pose car d'un point de vue purement pratique, un grand nombre de praticiens sont confrontés au problème suivant :
"Dans le cas d'une SAS dont le mandat du commissaire aux comptes arrive à expiration lors de l'AGOA 2019, suis-je obligé de le renouveler dans ses fonctions si, au vu des nouveaux seuils de la loi PACTE, je ne serai plus tenu d'en désigner un lorsque ces seuils seront effectifs?"
L’article 20 de la loi Pacte règle la situation comme suit :
« pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2018, lorsque les fonctions d’un commissaire aux comptes expirent après la délibération de l’assemblée générale ou de l’organe compétent statuant sur les comptes du sixième exercice, que cet exercice a été clos six mois au plus avant la publication du décret mentionné aux articles L. 225-218 et L. 226-6 du code de commerce dans leur rédaction résultant de la présente loi, ainsi qu’aux articles L. 221-9, L. 223-35 et L. 227-9-1 du même code, que cette délibération ne s’est pas tenue antérieurement à l’entrée en vigueur du présent article, et qu’à la clôture de ces comptes, la société ne dépasse pas deux des trois seuils définis par ce décret, la société est dispensée de l’obligation de désigner un commissaire aux comptes, si elle n’a pas déjà procédé à cette désignation ».
Il faut donc comprendre que :
1) Si l’AG de la société où est envisagé un renouvellement du CAC se tient postérieurement à la publication du décret susvisé, soit postérieurement au 26 mai 2019, ET
2) Si l’exercice concerné a été clos moins de six mois avant la publication du même décret, ET
3) Si la société, à la clôture de ses comptes, est en dessous des nouveaux seuils fixés par la loi Pacte,
==> Elle ne sera pas tenue de renouveler son commissaire aux comptes dans ses fonctions.
En revanche, si elle ne satisfait pas aux trois conditions posées ci-avant, elle sera obligée de renouveler la mission de son commissaire, pour une durée de 6 exercices.
Les mandats en cours à l’entrée en vigueur de la loi se poursuivront alors jusqu’à leur date d’expiration. Par exception, les sociétés dont le mandat du CAC est en cours et qui ne dépassent pas les nouveaux seuils pourraient, avec l’accord du commissaire aux comptes, basculer jusqu’à la fin du mandat prévu à l’origine sur une mission ALPE.
Marnie RICHARD
Avocate au barreau de LILLE
Manager Audit and Assurance at Deloitte Côte d’Ivoire
5 ansZeinab Bamba Qu’en penses tu ? Vendre la mission ALPE sera un peu difficile à mon avis.