"Les telecoms dans 10 ans ..."
Je suis cordialement invité par SDCT, cabinet de consultant connu et reconnu dans le nord, à intervenir lors du dixième anniversaire de sa création. Dix ans, déjà! J'ai immédiatement accepté puis j'ai ingénument demandé quel était le thème ?: "Les telecoms dans 10 ans" m'ont répondu Eric Martel et Stéphane Delahaye avec enthousiasme !
Bigre. Une projection à 10 jours, 10 mois ou même 5 ans ne pose aucun problème. Mais 10 ans... c'est un challenge et autant le dire franchement: personne ne sait vraiment quelles innovations vont réellement s'imposer. Je parlerai donc de convictions et de grandes tendances marché.
Tout d'abord, où en sommes nous ? le cabinet OVUM annonce dans sa dernière étude que 2016 marque l'entrée dans le second cycle de la transformation digitale. Permettez-moi une analogie : Nous étions dans l'age du bronze et nous venons d'entrer dans l'age du fer. Pourquoi l'âge du bronze ? parce que en dehors de quelques secteurs profondément impactés (vente en ligne, médias, télécommunication), la grande majorité est restée à l'âge de pierre et n'a pas encore rencontré la technologie de la "métallurgie": aucun doute que ce profond bouleversement se passera au cours des dix prochaines années, y compris pour les secteurs sensibles de l'éducation et de la santé. Parions que les postes de CDO (Chief Digital Officer) vont fleurir dans les entreprises (moins de 40% du CAC40 a un CDO en 2015). Cette seconde vague de la transformation digital va impacter plus profondément la structure des entreprises industrielles que les utilisateurs eux-même pour lesquels nous allons plus parler d'évolution que de révolution. En effet, l'individu a été au cœur de la première vague digitale. Mobilité, réseaux sociaux, collaboration, vidéo, accès banalisé et haut débit à internet : un foisonnement d'innovations qui ont dessiné l'homme digital 2.0. Les 10 prochaines années en feront une réalité.
Et les telecoms dans tout ça ? Nous venons de vivre 10 années de folie innovatrice : l'IP n'est plus une question, la voix est un média de communication parmi d'autres, la mobilité est universelle, les applications sont virtualisées et cloudifiées et le haut débit filaire et Wifi est devenue la norme dans les entreprises. Que nous reste t'il à accomplir au cours des 10 prochaines année? L'avènement de l'humain 2.0 au cœur de son environnement de travail virtuel. Cette évolution du "télétravail" vers le "bureau virtuel" va générer une incroyable pression d'ouverture et de qualité de service sur les services de communication. Pour ma part, je crois en 4 évolutions majeures : "l'humain au centre", "une communication omni-media", "des applications agnostiques" et "un neo-utilisateur consommateur".
1 - L'humain plus que jamais au centre. C'est sur cette idée qu'a été développée une vision du type "personal cloud". La "communication" téléphonique traditionnelle s'arrêtait au terminal? la "conversation" multi-media irait donc un cran plus loin pour fournir une expérience unique à l'utilisateur quelque soit le terminal de son choix. L'utilisateur 2.0 n'acceptera plus aucune contrainte pour ses usages professionnels. Les prochaines années seront donc résolument focalisées sur la simplicité d'utilisation et la qualité des communications où que l'on soit. Oui, SnapChat est une application fantastique et la tentation de l'utiliser est grande, mais qui va prendre le risque de l'utiliser pour appeler un client final pour une négociation ou une escalade? L'utilisateur 2.0 sera en totale maitrise de son environnement, de son niveau de confidentialité et des applications qu'il a décidé d'utiliser. A charge aux entreprises de fournir le bon nouveau de service grâce à la mise en oeuvre des API permettant la connexion native des applications génériques aux services professionnels.
2 - Des applications agnostiques coté DSI: en 2016, nous pouvons d'ors et déjà utiliser un service de communication indépendant du terminal. Smartphone, telephone, PC ? peu importe et bien malin celui qui prédit, encore, la mort du téléphone de bureau. Pas de doute que la prochaine étape est de rendre la communication indépendante du système choisi par l'entreprise. Au delà du choix pragmatique d'un service hébergé et managé dans le Cloud qui s'offre aux DSI (service vs usage vs cout vs investissement), les applications utilisateur vont s'affranchir des systèmes en place pour délivrer sans contrainte et sans couture la fonctionnalité attendue, au bon moment et au bon endroit. Une première génération de services "over-the-top" verra le jour en 2016. Cette liberté va accélérer la verticalisation des applications et voir enfin l' avènement de services de communication en communautés !
3 - Une communication Omni-media : les "Communications Unifiées", reine auto-déclarée les dix dernières années, s'est bâtit sur la promesse de services nativement multi-media. En réalité, chaque technologie s'étant développée à son propre rythme, les constructeurs ont proposé une agrégation de service coté "infrastructures" grâce au SIP et à la virtualisation couplée à une unification des interfaces coté utilisateur. les prochaines années seront celles du déploiement de services omni-media natifs dans lesquels aucun media ne prévaudra sur les autres mais sera seulement focalisée sur la qualité d'un service de communication enrichi due à l'utilisateur.
4 - Un neo-utilisateur consommateur: Ce n'est plus un fossé mais c'est un gouffre qui s'est créé entre les applications gratuites d'un coté et les infrastructures propriétaires de l'autre. "Je paye ce que je consomme" est la tendance majeure des prochaines années à laquelle il faudra certainement ajouter une notion clé du type "en fonction de la valeur ajoutée que cela m'apporte". Savez vous que certains hôtels ACCOR payent aujourd'hui leur service de communication en fonction du taux d'occupation des chambres ? Cette transformation est déjà largement engagée avec des solutions de communication Cloud offrant aux entreprises de penser OPEX et Service et non plus CAPEX et infrastructure. Cette tendance lourde devient également une réalité pour les infrastructures réseaux, traditionnellement commercialisées en mode CAPEX, grâce à des innovations du type Network On Demand.
Conclusion ? Les 10 prochaines années nous réservent forcément des surprises et il est fort à parier que le vieil adage "plus vite, plus haut, plus fort" s'appliquera pleinement. Faire le choix d'un système ouvert, flexible, hybride et si possible dans un mode OPEX intégrant les évolutions futures est certainement le choix de raison pour aborder sereinement cette nouvelle décade.
Pierre-Antoine
nice read. And you, how do you think your work environnent will be impacted in 10 years from now....
Une belle préparation... qui nous promet une belle table ronde !!! vivement le 24 mars !!
Head of Chemical segment & Veolia Global Client Director - Capgemini
8 ansMerci Pierre-Antoine Thiebaut pour cet article très intéressant !
Président de l'AI ISEN (President at ISEN Alumni)
8 ansBonjour PAT, Je te reconnais bien dans le fait de te lancer dans ce défi acrobatique, visant à "lire dans le marc de café"...On ne peut guère contredire tes 4 prévisions majeures. Mais, au risque de te provoquer, je complèterais en faisant valoir que ta première affirmation "L'humain plus que jamais au centre" (une autre façon de recycler un vieux thème d'il y a... 10 ans, la "Computer Mediated Communication" ) sera probablement contrebalancée par l'essor inexorable du M2M, et du fait qu'Internet sera tout autant (voire bien plus) le vecteur de communications entre machines, objets, ou algorithmes connectés. Pour ne prendre qu'un exemple, nos véhicules (évidemment de plus en plus informatisés et écologiques) discuteront avec l'usine ou l'atelier de réparation, voire discuteront entre eux... C'est déjà le cas, de manière anecdotique.... Tes poubelles indiqueront au camion de ramassage s'il faut passer chez toi... etc... Bien à toi....