Lettre de Monsieur Laurent Jacques, Maire de la ville du Tréport
Nous avons voté une motion à l’unanimité qui demande expressément au Gouvernement d’organiser rapidement sous son égide une concertation sur le rapatriement de commandes et sur toutes les mesures de patriotisme industriel entre, d’une part, les représentants des groupes français du luxe, notamment LVMH, LOREAL, YVES ROCHER principaux donneurs d’ordre de nos entreprises, et, d’autre part, les acteurs de la filière du flaconnage de la vallée de la Bresle, leurs fournisseurs.
LA GLASS VALLEE VEUT VIVRE
vis-à-vis de la filière du flaconnage de la vallée de la Bresle
La filière d’excellence du flaconnage de luxe concentre dans la vallée de la Bresle à cheval sur la Seine-Maritime et la Somme, l’une des plus ouvrières de France, plus de 7 000 emplois dans 70 entreprises exerçant les différents métiers du flaconnage, fabrication des moules, production des flacons, triage, décor… Cette glass vallée, comme on la nomme, symbole des savoir-faire ouvriers et du made in France de qualité est fragilisée par les baisses de commandes provoquées par la crise sanitaire du Covid-19, à telle enseigne que plusieurs de ses acteurs majeurs à l’instar de Verescence et Pochet du Courval envisagent l’application prochaine de plans de sauvegarde de l’emploi avec des suppressions de postes ou des accords de performance économique préjudiciables pour les salariés concernés.
On sait que les groupes français du luxe, qui font appel à la production verrière de la vallée de la Bresle effectuent également à l’étranger des commandes de verre à hauteur de 200 millions d’€, pour un différentiel de prix avec la production française de quelques centimes d’euros par flacon. Ces 200 millions d’€ de commandes extérieures représentent l’équivalent du chiffre d’affaires France de Verescence et l’équivalent du chiffre d’affaires de Pochet du Courval, les deux principales entreprises de production de flacons de luxe de notre vallée.
A plusieurs reprises ces derniers mois, le Président de la République et le Gouvernement par la voix de son Ministre de l’Economie et des Finances ont plaidé pour que notre pays recouvre une plus grande souveraineté industrielle et appelé à une forme de « patriotisme industriel ». Notre conseil municipal partage cette vue, comme probablement l’ensemble des Français.
Le retour sur le sol national de tout ou partie de ces 200 millions d’€ de commandes extérieures en flaconnage permettrait de consolider l’ensemble de la filière verrière de notre vallée et d’éviter les plans sociaux en préparation. On estime en effet que ces dépenses représentent l’équivalent de 1 500 emplois directs et 3 000 emplois indirects.
Pour avoir une idée de l’importance pour l’activité industrielle sur notre territoire qu’auraient des décisions de rapatriement de commandes, il faut s’intéresser à la décomposition du prix d’un flacon de parfum acheté par le consommateur. Pour un produit acheté 100 € dans le commerce TVA comprise, la fabrication usine ne représente qu’UN EURO. 25 € vont à la publicité et au marketing, 35 € vont à la distribution,15 € forment la marge de la marque, le packaging et le décor sont à 3 €, enfin, le jus concentré coûte entre 1 et 2 €.
Ainsi, un flacon de verre qui - au passage compte beaucoup dans l’image du parfum comme on peut le voir dans la publicité - ne représente qu’un pourcentage infime du prix final du produit et en même temps ce flacon fait vivre des centaines de salariés, leurs familles et tout un territoire.
En suivant, au titre du patriotisme industriel, l’exemple allemand ou l’exemple asiatique où la commande privilégie le cadre national et en rapatriant une part de la commande de verre externalisée, ces groupes du luxe français, internationalement connus, pourraient, à peu de frais pour leurs profits et les dividendes de leurs actionnaires, permettre à l’ensemble de notre filière du flaconnage d’amortir le choc de la crise, d’éviter la perspective de licenciements et de pertes de savoir-faire. L’affichage du made in France d’un bout à l’autre de la chaine pour leurs produits de luxe, dont l’image est largement attachée à Paris et à la France, constituerait pour ces mêmes groupes un argument commercial avantageux.
Sans nourrir l’illusion que le rapatriement d’un tel volume de commandes pourra se faire du jour au lendemain, nous savons que la glass valley dispose de l’ensemble des moyens humains, des savoir-faire, compétences et installations nécessaires pour répondre de manière opérationnelle et dans le respect des exigences de qualité des produits de luxe, dès demain, à une augmentation des commandes que ces rapatriements pourront entraîner.
Il apparaît légitime dans le contexte de crise que nous connaissons de solliciter un effort particulier de la part de ces groupes donneurs d’ordre, d’exiger d’eux une attention particulière pour leurs fournisseurs français, d’autant qu’ils perçoivent des aides de l’Etat récemment renforcées par la baisse des impôts dits de production.
Aussi, dans la continuité et en prolongement de l’appel public collectif et solennel au Président de la République et au ministre de l’Economie et des Finances publié le 23 octobre 2020 pour que soient transformés en actes concrets les appels au patriotisme industriel ;
Considérant l’importance économique, sociale, humaine pour notre territoire de la filière du flaconnage de luxe et en soutien concret à cette filière, à ses salariés et entreprises, il est proposé au Conseil Municipal sur proposition de Madame, Monsieur le Maire ;
- de voter la présente motion qui demande expressément au Gouvernement, via le Ministère de l’Economie et des Finances, d’organiser rapidement sous son égide une concertation sur le rapatriement de commandes et sur toutes les mesures de patriotisme industriel entre, d’une part, les représentants des groupes français du luxe, notamment LVMH, LOREAL, YVES ROCHER principaux donneurs d’ordre de nos entreprises, et, d’autre part, les acteurs de la filière du flaconnage de la vallée de la Bresle, leurs fournisseurs.
CEO artyMetia | consultant métiers d’art Master en Administration des Affaires (MBA)
4 ansCela me semble une solution plus sages que les groupes de luxe apportent un soutien pour votre entreprise je reste personnellement persuadé que ce n’est pas le rôle des collectivités territoriales et locales de financer. Ni aux citoyens de payer indirectement la facture. Le problème actuel serait de savoir si c’est lié à la conjoncture de la covid 19 ou c’est finalement la conséquence de nombreuses entreprises qui étaient déjà fragilisés avant et qui profitent de la situation pour récupérer des fonds en jouant sur le bassin d’emplois... Car dans ce cas si l’outil industriel reste performant pourquoi ne pas faire rentrer des actionnaires dans cette entreprise ??