L’immeuble de bureau, un nouveau champ des possibles
Google à Londres Promoteur : BNP Paribas Real Estate – Architecte : Jean-Michel Wilmotte - Photographe : Edmund Sumner

L’immeuble de bureau, un nouveau champ des possibles

L’émergence de nouveaux modes de travail comme le coworking, le nomadisme, le télétravail, bouleverse les codes du secteur de l’immobilier de bureau. A tel point que certains se posent la question de l’utilité du siège social : tend-il à disparaître ? Va-t-il se dématérialiser sous l’impulsion de l’ultra-connectivité induite par la généralisation des nouvelles technologies ? La réponse est non. Le siège social incarne l’ADN d’une entreprise. Il est le vecteur incontournable de ses valeurs et de son image. Je dirais plutôt que face à ces changements, l’immeuble se transforme, s’individualise en misant sur toujours plus de flexibilité, d’agilité. Aujourd’hui, l’immeuble ouvre ses perspectives et devient évolutif en termes d’usages et même de programmes.

Répondre au lifestyle de l’entreprise…

L’immeuble d’aujourd’hui reflète à la fois la culture d’entreprise, son mode de management et son environnement de travail. A la manière des grandes enseignes de distribution qui développent leurs flagship, les entreprises capitalisent de plus en plus sur l’immobilier pour renforcer leur image et notoriété. Et l’arrivée des Millenials sur le marché du travail a fait encore plus bouger les lignes dans ce sens. L’immeuble devient outil de communication, de recrutement, de commercialisation, de relation, d’innovation, de transformation et surtout de différenciation.

Ce choix de différenciation se traduit notamment par le concept du ‘sur-mesure’. Le modèle unique n’existe plus. En tant qu’interlocuteur privilégié des investisseurs et des utilisateurs, je dois prendre en considération la stratégie de toutes ces parties prenantes pour livrer un immeuble adapté à leurs valeurs et à leurs attentes. J’ai mené le projet du siège de Google à Londres, situé dans le quartier de King’s Cross. Le mot d’ordre de ce géant du web était de mettre en avant le collaboratif et le bien-être de leurs salariés. Ils ont fait le choix d’installer leurs espaces de restauration sur les derniers étages, endroit consacré habituellement à la Direction, pour que leurs salariés bénéficient d’un cadre exceptionnel pendant leurs pauses déjeuners. Sur les terrasses, ils ont aménagé des espaces collaboratifs destinés aux employés. Ils ont également privilégié les escaliers rendus plus accessibles dans le hall d’entrée plutôt que les ascenseurs, situés dans des endroits plus reculés, pour inciter à l’exercice physique et ainsi favoriser le bien-être.

De Londres, à Rome où nous avons réalisé le siège de la Banca Nazionale del Lavoro, en passant par Francfort où nous lançons le projet 99 West Tower ou par Lisbonne où nous développons un projet mixte situé dans le quartier de LX Factory, toutes ces expériences internationales nous prouvent qu’il faut désormais comprendre et anticiper les usages des espaces de travail de toutes les entreprises. Aujourd’hui, le monde de l’immobilier vit une révolution. Chaque expérience est une opportunité extraordinaire de challenger nos habitudes et par là même, d’innover.

…avec un responsive building…

A l’heure où les attentes des clients et donc les enjeux business évoluent de plus en plus rapidement, les entreprises se doivent d’être de plus en agiles. Les modes de travail et les usages suivent ce mouvement intimant à l’immeuble de s’adapter aussi vite que le contexte le nécessite. L’un des challenges majeurs de notre métier de promoteur est de penser l’immeuble comme un lieu évolutif. Aujourd’hui, les espaces de travail ne sont plus figés dans leur fonction initiale. Ils doivent rester reconfigurables avec la possibilité d’ajouter des plateaux supplémentaires ou de bouger des cloisons à l’envi en fonction des besoins fluctuants des métiers ou de l’évolution des effectifs. Désormais, l’immeuble s’adapte à l’entreprise pour devenir le plus user centric possible et répondre ainsi au plus près aux attentes de ses utilisateurs.

La flexibilité est, selon moi, le maître-mot pour défier l’obsolescence de l’immeuble non seulement d’un point de vue utilisateurs mais aussi investisseurs. Les bâtiments qui savent répondre au spectre d’usages le plus large génèrent plus de valeur en démontrant leur capacité à répondre au changement. Il est donc primordial dans notre métier de miser sur la modularité dès la conception d’un bâtiment. Cette nouvelle approche nous incite à revoir certains fondements. Il nous incombe de nous affranchir d’un certain nombre de contraintes que nous nous imposions et de repenser le bâtiment de l’intérieur.

…et une plus grande modularité

Cette flexibilité permet aussi une meilleure mixité d’usages. Un espace de travail peut facilement devenir une salle de réunion ou un espace de détente. Aujourd’hui, le bureau doit proposer autant de typologies d’espaces qu’il y a de temps de vie au cours d’une journée. Et cela vaut autant à l’échelle de l’immeuble qu’à l’échelle du quartier dans lequel il est implanté. C’est d’ailleurs ce que nous avions en tête lorsque nous avons travaillé sur le concept du projet 17 & Co, l’un des projets lauréats de Inventons la Métropole du Grand Paris. Ce programme prévoit notamment bureaux, hôtels, espaces de coliving, espaces dédiés aux loisirs et auberge. A titre d’exemple, 17&Co abritera un karaoké ouvert avec des espaces modulables qui deviendront en journée des salles de réunion connectées à l’immeuble de bureau attenant.

L’immeuble de bureaux n’est plus réservé exclusivement aux collaborateurs, il s’ouvre désormais à l’extérieur. Il est pensé comme un hub capable d’accueillir des parties prenantes ou des riverains, mutualisant ainsi les espaces et les coûts pour les utilisateurs et générant de nouvelles recettes pour les investisseurs. Et si l’immeuble s’ouvre, c’est tout un écosystème qui émerge dans le même temps conciliant plusieurs programmations pour freiner l’étalement urbain. Cet enjeu environnemental relève à mon sens aussi de notre responsabilité de promoteur. Aujourd’hui, il ne s’agit plus seulement de penser l’immobilier dans son cycle de vie mais dans celui de la ville. Le secteur de l’immobilier est particulièrement concerné par les émissions de gaz à effet de serre. Il est de notre devoir de réduire l’empreinte carbone et d’améliorer l’efficacité des bâtiments que nous concevons. De mon point de vue, la démarche RSE doit rester en pole position des préoccupations de la sphère immobilière pour se projeter dans un avenir durable pour le grand nombre.

Kader GUETTOU

DG GA Entreprise - DGA Groupe GA

6 ans

Voilà une tribune très complète et très éclairante Thomas.

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