L'impôt au décès....deuxième partie....l'impact de 164 (6) de la Loi de l'Impôt sur le Revenu
Lors de la chronique portant sur la première partie de l'impôt au décès, j'ai utilisé l'exemple suivant, dans lequel on peut se retrouver avec une situation de double ou triple imposition :
- Monsieur ABC, sans conjointe, est actionnaire unique d'une société de gestion qui détient des placements pour 2 000 000 $. C'est son seul bien. Il décède et lègue à ses enfants les actions de la société. Le roulement fiscal n'étant pas de mise, il est présumé avoir vendu les actions de la société une seconde avant le décès (sans doute autour de 2 000 000 $). Cette vente présumée occasionnera un impôt approximatif de 500 000 $.
- Pour payer les impôts du décédé, nous avons proposé que la succession se déclare un dividende imposable de la société (car il n'y a pas d'autre bien dans la succession). Il y a ici une double imposition. Si les placements de la société ne sont pas liquides, on devra les vendre, sans doute payer l'impôt dans la société, verser un dividende imposable à la succession afin qu'elle paie l'impôt du décédé. Il y a ici une triple imposition.
Dans le cadre de cette chronique, j'ai mentionné qu'il y avait quelques planifications fiscales possibles afin de minimiser l'impact de la double ou triple imposition. Voici la première, le paragraphe 164 (6) de la Loi de l'impôt sur le Revenu (ci-après 164(6)).
Ce paragraphe prévoit que la perte en capital réalisée lors de la vente, un an après le décès d'une personne, d'un bien reçu en héritage de cette personne, peut être reportée à l'encontre d'un gain en capital du décédé. Voici un exemple :
- Monsieur DEF décède et lègue à son enfant un terrain d'une valeur de 10 000 $ dont le coût est de 1 000 $. Le décédé étant présumé avoir vendu le terrain 10 000 $, il réalise un gain en capital de 9 000 $ (10 000 $ - 1 000 $) et l'enfant est présumé avoir acquis le terrain pour une contrepartie de 10 000 $. Trois mois après le décès de monsieur DEF, l'enfant vend le terrain pour une contrepartie de 6 500 $ et réalise une perte en capital de 3 500 $. Par l'effet, de 164(6), comme la perte en capital est matérialisée moins d'un an après le décès de monsieur DEF, on pourra la déduire à l'encontre du gain en capital de 9 000 $ réalisée à son décès.
Revenons au cas de monsieur ABC. À son décès, il sera réputé avoir vendu les actions de sa société 2 000 000 $, il aura réalisé un gain en capital de 2 000 000 $ et la succession sera présumée avoir acquis les actions au coût de 2 000 000 $. Pour payer l'impôt découlant de ce gain en capital, nous avons suggéré le versement d'un dividende imposable à la succession. 164(6) aurait-il pu nous aider ?
Impact de 164(6)
Oui !!! Au lieu de verser un dividende, la société aurait pu "racheter" les actions de la société léguée à la succession (lui verser un montant correspondant à la valeur des actions). Le rachat des actions par la société occasionnera deux impacts fiscaux pour les actionnaires : un dividende présumé et une disposition présumée. Ainsi, en prenant l'hypothèse que le capital versé des actions soit à 0 $ (ou d'une valeur nominale...ce qui est généralement le cas), le rachat occasionnera pour la succession un dividende présumé de 2 000 000 $ et une disposition des actions pour une contrepartie de 0 $ (la valeur des actions de 2 000 000 $ moins la valeur du dividende présumé de 2 000 000 $). Comme le coût des actions pour la succession sera de 2 000 000 $, une perte en capital sera créée. Voici l'illustration :
Valeur du rachat 2 000 000 $
Moins le capital versé 0 $
Dividende présumé 2 000 000 $
Produit de disposition 2 000 000 $
Moins dividende présumé (2 000 000 $)
Produit de disposition présumé 0 $
moins prix de base rajusté (2 000 000 $)
Perte en capital 2 000 000 $
Si le rachat est effectué dans l'année qui suit le décès, par l'effet de 164(6), la perte en capital alors réalisée pourra être reportée à l'encontre du gain en capital au décès de monsieur ABC et annuler l'impôt afférent.
Ainsi, les héritiers pourront "sortir" l'argent de la société en s'imposant sur un dividende au rachat mais pourront éviter la double imposition (en se versant un dividende imposable) et pourront annuler l'impôt sur le gain en capital du parent décédé. Ce n'est pas le meilleur des scénario (car le dividende de la succession sera imposé à un taux d'impôt plus élevé que le gain en capital du décédé) mais c'est quand même mieux qu'une double imposition.
À suivre..............