manager en univers incertain
Bonjour,
Benoit DE SAULCE (Team Decide) – Didier CORBOLIOU (D2A Consulting) – Pascal BOQUET (ARUM AcCESs) ont créé le « CLUB 3C : Club des Consultants Confinés mais Confiants », un Think Tank pour passer et dépasser ce que nous impose la lutte contre le virus.
C’est donc maintenant dans un travail à 6 mains que nous vous proposerons régulièrement une prise de hauteur, des approches pour transformer votre organisation et des bonnes pratiques pour agir différemment dans cette période hors norme.
Managers : Comment s’engager sans promettre, et donc sans rassurer ?
Le futur est incertain par essence. La guerre que nous menons face au Covid19 renforce cette caractéristique et démontre à quel point, sans éluder les projections et les intuitions, il est nécessaire d'observer chaque situation au plus près de l’action et de la réalité, pour repenser « en live » sa stratégie et adapter les plans d’actions. A se repenser dans son organisation et agir avec célérité en acceptant de se tromper, en acceptant de ne pas s’inscrire dans le moyen terme.
Adapter l'organisation en cours d'action, accepter de se tromper, admettre de n'avoir qu'une prise relative sur les événements, c’est contraire aux habitudes de l’entreprise, qui s’appuie sur des règles établies, des tableaux de bord, des forecast (prévisions), des simulations statistiques, … pour tenter de réduire au maximum l’incertitude du futur.
Cette incertitude, de l’instant comme du futur, que nous impose la gestion de crise provoquée par la lutte contre le virus, exige de chacun une dose d'agilité. Cet impératif s'impose à tous, qu’ils soient dirigeants, managers intermédiaires, opérationnels de proximité ou responsables de projet.
Cette exigence peut, au pire faire peur, a minima susciter l'inquiétude de ceux, nombreux, qui considèrent qu'un manager a le devoir de rassurer
Donner des informations, des consignes, des instructions pour le moyen terme, en assumant qu’elles pourront être invalidées à tous moments, demande courage et leadership afin qu’elles soient effectivement mises en œuvre par ceux qui les reçoivent.
Cela est d’autant plus puissant que les voltes face, retournements de décisions, stop and go , … émoussent l’envie d’y croire et la motivation des collaborateurs. Ceux-ci finissent par penser qu’il n’y a personne à la barre.
Nous avons en France « l’amour de la belle ouvrage ». Celui-ci s’oppose souvent à la décision de stopper un projet, même mal parti, avant qu’il soit terminé pour passer à autre chose. Ce manque de pragmatisme conduit à continuer d’investir du temps et de l’énergie dans le projet stoppé plutôt que de se mobiliser totalement sur le nouveau.
Le manager est fréquemment identifié comme le "sachant", qui doit absolument apporter des réponses ou des solutions, de préférence pérennes.
Mais la compétence managériale est différente de la compétence technique. Ce que nous vivons aujourd’hui met à l'épreuve la compétence managériale et relationnelle pour mobiliser nos équipes sur des projets et des modes de fonctionnement, sachant que nous pouvons dénoncer l’un et l’autre à chaque instant.
Naviguer à vue ne signifie aucunement ne pas avoir de cap. C’est savoir en permanence, sans perdre de vue le but, diriger le navire en évitant les écueils.
En bon marin breton, dans le brouillard, tu réduis la voilure, la vitesse, et tu mets des matelots à la proue, sur chaque bord et dans la hune pour distinguer les éventuels obstacles. Le Commandant du Titanic avait certainement oublié ces principes élémentaires de navigation.
Et parfois il faut être prêt à tirer des bords pour rallier le port.
Et si les vents et la mer sont contraires, être prêt à rejoindre un autre abri.
Manager dans l’incertitude, c’est faire alliance avec l’adversité quand on sait que l’instant ne nous est pas favorable. C’est prendre des décisions avec un minimum de repères, c’est accepter de dire : « Je ne sais pas », « Je me suis trompé », « qui peut m’aider ?»
Et ne pas se projeter dans le futur à moyen/long terme sans souplesse et avec obstination.
C’est faire preuve d’humilité pour pouvoir rebondir et comme le disait Napoléon Bonaparte : « Il faut savoir rire aujourd’hui des bonnes idées que nous avons eu hier ! ».
Manager dans l’incertitude, c’est être conscient que la liane que nous prenons pour nous jeter dans le vide (l’action) est peut-être mal fixée, ne va pas complètement dans la direction choisie. Il n’y a que les films de Tarzan pour nous faire croire le contraire.
Manager dans l’incertitude suppose un véritable leadership pour mobiliser et pousser à s’engager sans promesse.
« Certains voient des choses et disent « Pourquoi ? ». Moi je rêve à des choses qui n’existent pas et je dis « Pourquoi pas ! » » - Mark Twain
Manager dans l’incertitude c’est accepter que « je n’aie pas le monopole de l’intelligence » pour faire lever l’auto-censure, libérer l’expression des idées même si certaines peuvent sembler étranges (les suisses disent parfois « je suis déçu en bien »), favoriser l’expérimentation (qu’avons-nous à perdre de plus !) et l’empowerment pour transformer l’organisation et les pratiques.
Espérons que ce nous vivons aujourd’hui contient les graines pour faire demain, dans un contexte plus positif, des entreprises plus agiles grâce aux managers et collaborateurs qui auront développé cette aptitude.
Benoît, Didier & Pascal
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