METTRE L'INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE AU COEUR DE LA COMPETITIVITE DES ENTREPRISES
Depuis les années 80, les entreprises évoluent dans un contexte général, dynamique et complexe qualifié par Levitt (1983) de "globalization ou markets ou mondialisation", un monde nouveau caractérisé par un environnement d’hyper-compétition dans toutes ses composantes selon D’Aveni (1994).
Cette société globalisée est marquée par l'intensité concurrentielle, l'émergence de technologies de l'information et de la communication (TIC), l’évolution et la transformation d’habitudes de consommation et d'autres facteurs qui mis ensemble, donnent naissance à des mutations sur les plans technologique, économique, réglementaire … et obligent les organisations à innover, à anticiper pour agir et prendre de bonnes décisions tout en limitant les risques.
C’est ainsi qu’avec la globalisation de l'information et le développement furtif des outils technologiques pour y accéder, la gestion de l’information est devenue fondamentale dans les entreprises.
Aussi, Stephen Harper (2000) déclare que "bien gérer l'entreprise, c'est gérer son avenir et gérer son avenir, c'est gérer son information." Par voie de conséquence, un bon système d'informations permet de piloter l'entreprise avec succès.
Dans ce contexte, le besoin d’informations devient une préoccupation majeure du dirigeant-managert. L'information, perçue il y a encore une décenie comme une ressource ordinaire voire banale, se mue aujourd’hui en ressource stratégique déterminante pour l'avenir. L’utilisation de l'information comme facteur clé de succès (FCS) des organisations est tout aussi indiscutable !
Dès lors, seules les organisations capables de rechercher, collecter et gérer un flux massif d’'informations seront à même d'anticiper les changements des principaux acteurs de leur écosystème. Toute organisation soucieuse d’acquérir et de garder une longueur d’avance sur ses concurrents se devra, au moins périodiquement, de méner des activités conduisant à l’augmentation de son niveau de connaissance des acteurs clés évoluant dans son périmètre immédiat ainsi qu’en identifiant les mutations profondes, les tendances lourdes, les évolutions, fussent-elles incrémentales, déceler les contraintes nouvelles, bref tout ce qui impactera ses activités et influencera sa compétitivité à long terme (L.T).
Toute chose égale par ailleurs, l’intelligence économique est une activité qui va bien au-delà de la simple veille stratégique. Dans le contexte de la mondialisation éconolique, l’information (I) est devenue un élément aussi primordial que la matière première, l’énergie. Elle est considérée par certains économistes comme le troisième facteur de production au même titre que la main d’œuvre (L) et le capital (K).
Être à l’écoute de son environnement pour le connaître, le comprendre et pouvoir l'influencer le moment venu est une attitude fondamentale dans le positionnement stratégique, dans le processus managérial de prise performante de décisions qui passe par ces trois (03) étapes essentielles :
1) Agir : Il s’agit de construire des analyses débouchant sur des arguments de décision stratégiques ou opérationnelles au sein d’une organisation. Il s’agit de la prise de décision telles que: développer ou non un nouveau produit, exporter ou non sur un nouveau marché, diversifier ou non ses domaines d’activités stratégiques (DAS), moderniser ou on non son outil de production, améliorer ou non les relations avec ses distributeurs, etc.);
2) Anticiper : Il s’agit appréhender les évolutions et les changements futurs de l’environnement externe de l’organisation - à partir de la détection de signaux faibles ou d’indices - afin d'identifier les nouvelles Menaces ou les Opportunités qui se profilent à l’horizon et, ce qui permettraa d’alimenter une réflexion stratégique prospective;
3) Réagir : L’organisation doit être alertée en temps opportun des événements importants auxquels elle se doit de réagir rapidement.
Au-delà d'une simple écoute du marché, de ses acteurs clés et d’une simple collecte mécanique de données et d'informations, l'intelligence économique devrait être une activité volontaire, assumée par le top management de l’organisation dans une perspective de positionnement stratégique, une vraie activité d'intelligence impliquant in fine un plan d'actions opérationnel.
Il ressort de tout ce qui précède une question importante : Quelles sont les étapes critiques d'une démarche efficiente de veille économique ?
Afin de nourrir la réflexion en vue de l’implémentation d'une démarche d’intelligence économique, nous proposons une démarche dynamique en cinq (05) étapes applicables à tout type d’entreprise :
1) Mise en place au sein de l’organisation d’une structure de veille économique (fut-elle légère ou embryonnaire), dédiée partiellement ou exclusivement à l’activité d’intelligence économique (dont la veille stratégique constitue le niveau initial) au sein des organisations. Il faudra mettre en place une technostructure (elle peut cependant être plus légère dans une entreprise de petite taille de type TPE ou PME dont les activités seront axées sur la recherche, la collecte, le tri, le classement selon des critères préétablis, le traitement et la mise à disposition d'informations pertinentes pour ses "clients" utilisateurs.
2) Identification des clients ou "utilisateurs internes" de l'activité de veille économique ou encore définition du périmètre des utilisateurs potentiels des informations à collecter
Il s’agit d’identifier les utilisateurs potentiels de l'activité d'intelligence économique à mener. On procédera à un inventaire des utilisateurs possibles, puis on sélectionnera les cibles clés. Ce seront eux "les clients utilisateurs" de la veille. Ce choix dépendra en grande partie de la sélection de critères à définir en fonction de la situation de chaque organisation.
3) Conduite d’un diagnostic permettant d'identifier les besoins en information de chaque "client utilisateur".
Cette étape cruciale permet de lister, comprendre les besoins en informations des utilisateurs clés de l'activité de veille économique et surtout, identifier comment est-ce-que ces informations seront utilisés. Prendre la précaution de prévoir l'utilisation future d'une information avant sa collecte permet d'en évaluer la pertinence, l'intérêt mais aussi de définir sous format final la livrer à chaque « client utilisateur».
4) Une fois que les besoins en informations des clients utilisateurs sont explicités, il faudra établir des priorités entre elles.
Information pour information n'apporte rien de pertinent. Par contre une fois que les priorités sont établis et les critères de l'information attendue définis, le standard d’information produite peut être précieuse aux utilisateurs internes de la veille. Dans cette optique, l'utilisation d'une matrice est un bon outil pour classer des informations selon les critères initiaux et obtenir une vision synthétique.
Il s'agit d'un travail harassant, un peu fastidieux mais très riche car il oblige à décortiquer les options possibles et ainsi mieux explorer les différentes facettes du sujet.
5) Elaborer un plan d'actions opérationnel
Une fois les actions prioritaires identifiées, il convient d’élaborer un plan d'actions.
Faire de la planification opérationnelle consiste le plus souvent à adopter une approche méthodologique de type « Questionnaire de Quintilien" plus connu sous l'acronyme QQQOCCP. Elaborer un plan d’actions opérationnel consiste à :
Q = Quoi ? Définir la quintessence de chaque action prioritaire;
Q = Quand ? Préciser l’horizon temporel de réalisation de chaque action prioritaire;
Q = Qui ? Nommer un responsable pour chaque action prioritaire ;
O = Où ? Désigner le lieu d'exécution de chaque action prioritaire;
C = Comment ? Etayer les moyens arrêtés pour chaque action prioritaire;
C = Combien ? Définir le coût de chaque action prioritaire,
P = Pourquoi ? Justifier le choix de chaque action prioritaire.
Les résultats finaux de la veille économique (ou de la veille stratégique) doivent donner lieu à une large communication auprès des publics cibles notamment les décideurs et les autres « clients utilisateurs ».
Toutefois, la partie non critique voire stratégique des informations obtenues pourrait être véhiculée au sein de l’organisation au travers des lettres d’informations périodiques au personnel.
L’intelligence économique (ou sa composante de base qu’est la veille stratégique) revêt les deux (02) enjeux principaux suivants :
1) Une meilleure prise de décision sur la base de données ou d’informations fiables et disponibles obtenues par un système d’informations performant
2) L’optimisation de la gestion des ressources grâce au benchmarking des informations collectées, regroupées et traitées du secteur d’activité et de l’environnement immédiat.
Au final, l’intelligence économique (ou la veille stratégique) devrait permettre d’améliorer sensiblement les performances des organisations opérant dans un environnement intégré, hyper-concurrentiel et plus compétitif que jamais.
Mots clés : Compétitivité, Concurrence, Mondialisation, Information, Intelligence économique, Veille stratégique,