Mondialisation, COVID19 et… lotissement de projet
La période que nous traversons aura au moins une vertu : nous allons apprendre beaucoup plus qu'en temps normal. C'est d'ailleurs très souvent le cas quand, à titre individuel, nous traversons une de ces épreuves de la vie qui combine douleur, certes, mais aussi apprentissage; dans la lignée du dicton : "ce qui ne me tue pas me rend plus fort".
L'enrayement actuel de la machine mondiale trouve sa cause immédiate dans le COVID. Certes. Mais en analysant un peu l'arbre des causes se pausent les questions de taille critique et d'interdépendance. Sujets que nous traitons constamment en management de projet en particulier lors du lotissement des projets.
A partir d'une certaine taille, un projet doit être découpé en lots. Pourquoi ? Pour être efficace tout simplement. On va découper le projet en morceaux, à taille "humaine", et déléguer la gestion de ces lots à des responsables. En management de projet, "small is beautiful" ! Je rappelle que les gros projets (>1 M€) ont 10 fois plus de chance de "planter", partiellement ou complètement, que les projets plus réduits.
Ce découpage et cette délégation doivent avoir pour bien fonctionner un nombre d'interfaces le plus réduit possible entre les autres lots. Si je veux avancer mais que je suis bloqué tous les 4 matins par des données d'entrées qui tardent à arriver des autres lots, ça ne marche pas !
Nous sommes semble-t-il en train de prendre conscience avec le COVID19 que la mondialisation est un gros projet, peut-être trop gros, et qu'il serait bon de redonner une certaine autonomie aux lots-nations qui la compose. Même si chaque pays dispose de sa souveraineté, le nombre d'interfaces est tel que son autonomie est quasi-nulle ! Au-delà des contraintes de confinement, l'économie de chacun des pays est bloquée par les entrants qui n'arrivent plus : composants, matière première, énergie…
La mondialisation a même fait le contraire de ce que nous recommandons en management de projet. Elle a fusionné les pays dans un grand ensemble devenu hors de contrôle et totalement interconnecté. Avec des conséquences que nous commençons à peine à mesurer quand ça se passe mal.
Au-delà de toutes considérations ou théories politiques, c'est seulement d'efficacité dont il s'agit. Et la question se pose désormais : n'aurions-nous pas intérêt à renforcer l'autonomie de nos "lots-nations" histoire de ramener le nombre d'interfaces et d'interdépendances à un niveau gérable ? Cela concerne tous les domaines : industrie, énergie, agriculture, datas…. Les datas par exemple. Aujourd'hui, et sans en avoir complètement conscience, une très grande part de nos données personnelles et nationales sont hébergées sous le régime du "cloud act" voté par les Américains. Pour résumer simplement cette loi : "ce qui est à toi est à moi et ce qui est à moi est à moi". Voici un très bel exemple d'interdépendance qui tôt ou tard posera de vrais problèmes de souveraineté et donc d'efficacité.
Dès lors il ne faut pas s'étonner d'entendre parler de relocalisation, circuits courts, changement de modèle, non plus de la bouche d'anti-système mais de celles de prospectivistes, d'analystes et… de banquiers. Un enjeux d'efficacité vous disais-je…