Mythe et réalités la transformation digitale

Mythe et réalités la transformation digitale

Cela fait plusieurs années que de nombreux articles paraissent, notamment sur les réseaux sociaux, mais aussi sur les supports plus classiques de la presse technologique et économique sur le sujet. Le discours sur est plutôt homogène, et je le regrette avec assez peu de positions critiques. La question n'étant pas tant, les choses sont-elles en train de changer, car cela ne fait aucun doute, mais n'y-a-t-il qu'une réponse à apporter?

Nous sommes probablement comme beaucoup le clame à un moment charnière où, un changement de rupture va se produire. Mais quelle en est la nature exacte? Est-ce juste une rupture technologique? N'y-a-t-il pas un changement plus profond, de l'ordre d'un changement social? N'est-ce pas un mythe de penser que seule la transformation digitale de nos entreprises est la réponse essentielle à leur survie

Ce sont ces questions qui me donnent envie de prendre le temps de la réflexion, de décalage du regard sur ce moment que l'on vit.

Les changements technologies

Il est indéniable que depuis une vingtaine d'années nous assistons à de profond bouleversement des technologies de l'information qui sont portées principalement par une amélioration exponentiel des performances du "hardware" sur les aspects de stockage et de puissance de calcul (smartphone, pc, servers) et des capacités du réseau, permettant le transit e flux de données de plus en plus gigantesque.

La conjonction de ces deux éléments à permis de créer de nouveaux usages, accroissant la mobilité et la facilité de communication. On est dans le "à tout instant", "n'importe où"... L'autre impact direct est une accumulation de données phénoménale qui découlent de cet ensemble de nouveaux usages et des moyens de traitement accrus compte tenu du phénoménal accroissement de la puissance de calcul.

Ces facteurs permettent de revoir mis aux goûts du jour des concepts qui datent de plus de 20 ans, comme l' Intelligence Universelle construite sur l'utilisation d’algorithmes dont l'utilisation passée était limitée par rapport à la puissance de calcul/traitement.

Ma conclusion sur cette partie technologique, que les changements existent mais ce ne sont pas les plus visibles à ce jour, l'impact se trouve plus au niveau des usages.

Les changements sociaux/sociétaux

Ce qui sous tend cette transformation de notre société et de nos entreprises sont des changements de comportements individuels et collectifs pas forcément liés aux transformations technologiques mais pouvant être potentialisés, renforcés par ces derniers.

Quelles sont ses grandes tendances, qui à mon sens sont caractéristiques de la fin du siècle passé, et surtout la marque de ce début du siècle.

1- L’instantanéité: L'information là maintenant, brute sans analyse. Une information ou plutôt une "donnée" poussée par une autre plus immédiate. Une ode à la rapidité, cette dernière bien souvent confondue avec efficacité. Une perte totale de la capacité à penser à long terme.

2- L'individualisme: L'individu est plus important que le groupe. Son intérêt propre est plus important que le collectif. Ce trait est encouragé notamment au sein de nos entreprises par les systèmes de mesures de la performance et de gratification...

3- Le plaisir: Tout nous tourne autour de la satisfaction de nos plaisirs de la façon la plus immédiate. Pourquoi attendre. Ce sont les effets pervers de notre société de consommation poussée à son paroxysme. L'une des conséquence de cette fuite en avant est une perte du sens...

4- L'uniformisation de nos sociétés: Une seule façon de concevoir les choses, une seule façon de concevoir le fonctionnement de nos entreprises, une application uniformisée de recettes (méthodologies: Lean, Agile, Design Thinking...), de mesure de la performance. Ce qui pose quelques questions, sur la prise en compte réelle das différences culturelles dans un monde de plus en plus "globalisé", mais aussi un questionnement sur la capacité de résilience de nos sociétés face à un événement impromptu...

Perceptions

Une fois posée ces quelques éléments de réflexion, ceux-ci vont me servir de filtre de lecture à ce que je peux observer autour de moi.

Tout d'abord un monde professionnel en agitation permanente, bouger ou mourir telle est l'impression qui se dégage de cette frénésie d'action. Peu, ou pas de temps consacré à une vrai réflexion... Sur cet aspect les nouvelles technologies : le mail qui a remplacé le courrier postal, puis la messagerie instantanée et maintenant l'avènement (espéré, voulu...) des réseaux sociaux d'entreprises, comme Yammer qui pousse une information après l'autre... Ceci en conjonction de l'arrivée d'une nouvelle génération dite 'millenials' (à chaque cycle on trouve une raison d'opposer les générations...) une habituée du zapping, des "likes" et qui comme le font remarquer certaines personnalités comme Simon Sinek (Millenials on Workplace) n'ont pas l'habitude de gérer leurs frustrations et nous ne leur apprenons pas ou si peu...

Toujours aller plus vite, changer, telle est l'injonction, déshumanisant les organisations, les employés sont considérés comme une source de coûts avant d'être considérés comme la richesse de l'entreprise et ce quelque soit le discours officiel. Quand je parle de déshumanisation d'aucun pourrait penser que je pousse le bouchon loin, cependant quelques éléments pour appuyer cette affirmation:

  • Des organisations qui change tous les six mois, alors qu'il est admis qu'il faut en moyenne 18 mois pour qu'un changement d'organisation permette une amélioration des performances. Hors les périodes de stabilité des organisations chutent drastiquement avec deux effets majeurs: perte de performance et d'engagement...
  • Penser que l'on peut communiquer, transmettre des informations que par des moyens technologiques, tout en étant sûr que le message a été bien compris (conférences téléphoniques, skype, webex, bluejeans, etc...) alors que les travaux d'Albert Merhabian ont mis en évidence la règle des 7%/38%/55% en communication reste une utopie

Comme si cela ne suffisait pas, une volonté de normer les pratiques, appliquer les mêmes indicateurs pour mesurer la performance. Penser que des solutions qui fonctionnent bien ailleurs, à titre expérimental ou plus établit va fonctionner partout est un leurre. Cette croyance se retrouve tant en entreprise que dans le choix de grandes orientations politiques. Mais il est important de prendre en compte la culture du milieu dans le quel nous voulons mettre en oeuvre ces nouvelles pratiques... Peut-on espérer que des réussites d'organisation parfaitement adaptée à une culture anglo-saxonne fonctionnera de façon toute aussi performante dans un environnement de culture latine? Peut-on penser qu'une population de Millenials sera aussi performante que ses aînés, mais la réciproque est vraie aussi...

Conclusions

Il est temps de remettre un peu de bon sens dans nos approches, oui il faut se transformer, s'adapter à notre nouvel environnement. Mais il faut le faire intelligemment, pour s'assurer de la valeur ajoutée non pas dans l'immédiat, mais aussi sur le temps long. Réapprendre qu'il n'y a pas toujours un seul chemin pour arriver à l'objectif et qu'il y a plusieurs façons d'être efficaces.

Mais pour une entreprise comme pour une société, les clés de la performance ne sont pas dans l'uniformité mais dans la diversité, diversité des cultures, des sexes, des âges, valides/handicapés... Cette diversité de nos organisations, miment la biodiversité présente dans la nature, assurant une meilleure résilience de la vie sur terre, et de la survie de nos organisations et cultures. Cette absence de diversité qui existe de mon point de vue se traduit par une sensibilité accrue de notre tissu économique aux différentes crises que l'on peut observer.

Le mythe que j'évoquais dans le titre est celui que la transformation digitale sera pleine de bienfaits et heureuse. La réalité, c'est qu'elle est là ni bonne, ni mauvaise. Que plein de nouveaux outils: technologies, méthodes sont là, il ne reste plus qu'à se poser la question de leurs mise en oeuvre pertinentes pour le bénéfice de tous.


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