Newsletter tourisme durable au Vietnam - aout 2024

Newsletter tourisme durable au Vietnam - aout 2024

De l’influenceur au Travel Planner : compatible? 🤔


Des influenceurs qui essaient de débarquer dans le tourisme, j’en connais une quinzaine. Ceux qui ont vraiment réussi la conversion sont très rares. Pourquoi?

 

À l’image de la bouffe, ce n’est pas parce que vous cuisinez souvent que vous devenez le chef cuisinier. C’est la même chose dans le domaine du voyage (merci à Joelle pour phrase 👍)

 

J’ai eu l’occasion de collaborer avec eux sous plusieurs angles

 

➡Demandes de voyage sur mesure FIT

➡GIR sur une thématique précise

➡Voyage de repérage en vue de monter un circuit groupe

 

Force est de constater qu’ils sont très déconnectés du métier du voyage 😮💨.

 

Les influenceurs sont d’excellents communicateurs. Toutefois, l’organisation d’un voyage professionnel demande d’autres aptitudes et compétences qu’ils n’ont pas. Ça prend la volonté de changer de mindset. Voici les défis communs qu’ils ont  

 

1️⃣Backpacker Vs prestataire de service

Ils sillonnent les pays avec un budget serré, comme tous les jeunes backpackers. Ils conservent cette habitude de backpacker en proposant des circuits à leur image. Le problème : le backpacker est écocentrique à la base. Alors que le métier du voyage demande l’empathie.

 

2️⃣Voyage solo vs voyage en groupe

L’influenceur a l’habitude d’organiser des trucs pour lui, tout seul. Le voyage en groupe demande un autre réflexe et une logistique beaucoup plus disciplinée. C’est un peu quand t’es parent marié avec deux gosses, mais tu fais les courses que pour toi. Je me souviens de Helena (italienne) qui m’a demandé de réserver un guesthouse qu’elle avait testé pour son groupe de 16 humains. Le problème : la capacité est 02 chambres.

 

3️⃣Superficialité instagrammable vs profondeur intellectuelle

Les voyages qu’ils font au Vietnam sont tous pareils : enchaînement des sites connus. Un check-list qu’il faut respecter pour démontrer qu’on «connait » le pays. Sauf que le Vietnam ne se visite pas. Le pays se vit. Ainsi, la façon dont ils conçoivent les voyages pour leurs clients manque de contact humain. Parfois, j’ai l’impression qu’ils sont incultes.

 

4️⃣Consommation instantanée vs slow travel

La culture de check-list oblige de voyager dans un timing serré. Ainsi, ils me demandent des circuits Vietnam en 10 jours avec des kilométrages de malade. C’est peut-être adapté à un gamin de 20 ans, mais pas à un couple de 70 ans ou une famille avec enfants.

 

5️⃣Expérience figée vs apprentissage continu

Erreur fatale : s’appuyer sur les acquis du passé sans tenir compte de la réalité contemporaine. Pour Tony, c’est le Vietnam de 2018 qu’il propose. Pour Marion, c’est 2016. Pour Rachel, c’est 2012. Le Vietnam n’est pas un livre de CM2. C’est une culture vivante qui évolue comme toutes destinations.

 

Pour réussir la conversion, les influenceurs devraient reconsidérer d’abord le rôle du réceptif que je suis. Ils doivent admettre que l’expert du pays, c’est moi, pas eux.



Sincérité dans l’authenticité : étude de cas 📓

 

Dans son mémoire de fin d’études, Damien m’a demandé le rôle de la sincérité. Comment peut-on assurer cette composante dans la fabrication de voyage?

 

Le tourisme de masse contribue à la perte de sincérité dans le rapport humain. Les contextes sont nombreux :

 

❌Le guide qui vous emmène dans les boutiques attrape touriste

❌Le sentiment de se prendre pour un ATM

❌Arnaques à l’aéroport et dans les endroits touristiques

❌Sollication incessante des rameuses qui vous vendent des babioles

❌Des gens qui vous insistent sur les pourboires aberrants

 

Par définition, le mercantilisme et le tourisme moutonnier vont ensemble. Pour être rentable, il faut fabriquer des circuits standardisés. Pour standardiser, il faut utiliser des boutiques de souvenir et des sites incontournables, car c’est facile à monter. Ce process nous pousse à créer artificiellement des «locaux» qui vivent essentiellement du tourisme.

 

Quand le goût de l’argent intervient dans la relation humaine, l’hospitalité est déjà fichue 👎

 

Peut-on renverser la tendance?

 

OUI ! Avec un design autrement. Voici la méthodologie chez TTB Travel

 

🤑Rémunération juste chez lez guides.

En fonction des agences, nous incluons automatiquement le pourboire dans le devis. Ainsi, le voyageur n’aura pas à deviner quel montant à donner à la fin. ET le guide n’aura pas à «mendier» le pourboire non plus.

 

🛍Supprimer des boutiques de souvenir

Un programme très chargé qui laisse le guide aucune marge de manœuvre de traîner du monde dans le shopping pendant le tour.

 

🏷Moins sites check-list

Conception des circuits qui éliminent des sites ultra fréquentés en proposant des alternatives. Pas de sites incontournables = pas de sollicitations. Le pourboire ne fait point partie de la culture vietnamienne. C’est le tourisme qui pollue.

 

🐕🦺En finir avec l’esclavage

Réduire drastiquement la collaboration avec des «locaux» trop habitués à travailler dans le tourisme. Nous choisissons des Vietnamiens qui vivent déjà très bien de leur profession de base. Le tourisme n’est qu’un apport occasionnel pour eux. Pas de dépendance excessive du tourisme = pas de « calcul » intéressé

 

💬Sensibiliser le voyageur en amont

Le pourboire n’est pas du tout la tradition vietnamienne. Il faut arrêter de donner les pourboires n’importe comment, au risque de créer une mauvaise habitude. On parle de la pollution culturelle. Cela demande de retravailler notre fiche info pratique avec une section entièrement consacrée au pourboire.

 

📢Répéter la sensibilisation pendant le voyage

Dans le Roadbook, marteler une deuxième fois le message. À tel endroit touristique (on ne peut pas tout éviter), mentionner clairement que le faible pourboire est déjà inclus. Le guide se charge de le donner pour le compte des voyageurs.



Table ronde ATES :Tourisme de masse et folklorisation au Vietnam

 

Voici quelques notions clés abordées lors de la table ronde ATES de la semaine dernière

 

1️⃣ La massification entraîne la perte d’identité

Le paradoxe du tourisme est la consommation du patrimoine culturel et naturel. Qu’il soit tangible ou pas, le patrimoine incarné par les habitants est la matière première de la destination. Celle-ci façonne l’identité propre de chaque pays.

 

La logique industrielle du tourisme de masse veut que toutes les destinations se ressemblent pour plaire au goût des touristes. Ainsi, on propose des représentations culturelles erronées pour refléter exactement ce qui est dicté par les médias. C’est l’origine du déracinement des territoires.

 

2️⃣ La folklorisation s’opère sous différentes formes

❌Cultiver la nostalgie des traditions qui ne sont plus d’actualité

❌Mise en scène d’un style de vie à grande échelle

❌Inventer de toute pièce une icône pour faire croire que cela fait partie de la culture contemporaine

❌Disneylandisation d’un territoire pour en faire un produit à la McDonald. On parle de zoo humain

 

3️⃣ La quête d’authenticité : un champ sémantique subtile

C’est un cocktail de 7 composantes essentielles

➡Sincérité

➡Convivialité

➡Spontanéité

➡Profondeur d’échange

➡Culture vivante

➡Ancrage temporel

➡Ancrage territorial.

 

4️⃣ La touristification et les gradients d’authenticité

Il n’y a pas d’authenticité pure à 100% dans une offre touristique. À l’image du jus d’orange, il a automatiquement la perdition dans le processus de touristification. La question si se pose est le curseur qu’on place.

 

↪Fanta : authentique 10%

↪Tropicana : authentique 30%

↪Jus d’orange pressé au resto : authentique 60%

↪Jus d’orange pressé par soi-même : authentique 80%

↪Manger l’orange en entier : authentique 100%

 

Si le taux d’authenticité est inférieur à 30%, on entre dans la zone de folklorisation (trop d’artifices).   

J’espère que le cas du Vietnam peut servir aux participants d’horizons diversifiés

·       Les enseignants des écoles de tourisme comme Stéphanie peuvent utiliser les études de cas concrets pour les étudiants

·       Les réceptifs comme (Nature France), Brésil, Tobongo, peuvent s’inspirer des outils pragmatiques pour leur activité

·       Les agences de voyages comme Ségolène, Magellan, TDS, peuvent  réutiliser notre méthodologie pour peaufiner leur production


Cet article fait partie de la grande thématique du tourisme responsable au Vietnam. Aux antipodes de la pensée occidentale, on vous apporte un regard inusité de l’Asie sur le sujet de durabilité. Certains points de vue sont complémentaires, d’autres sont plus divergents.



Gil Giuglio

Photographe Multimédia, pigiste et président AJT (Association Journalistes de Tourisme))

4 mois

Belle analyse assez complète et réaliste. La même sur les journalistes de la presse tourisme qui s'essayent au montage d'un circuit serait tout aussi intéressante 😉 . Bravo !

Philippe SIRECH 🌎 📲

COO at SPOTYRIDE | Digitize your Sport Outdoor business in just 15 minutes with SPOTYRIDE ⏱ | Wakeboard World Champion 🏆 | Sports Tourism Mentor 🏄 | Winner of the 2023 Occitanie Small Business Award 🏆

4 mois

Bien analysé , clair et sans équivoque . Il y a peu de temps j’ai reçu un appel d’une voyageuse dont un influenceuse lui avez organisé son circuit au Mexique et qui était en difficulté par une logistique douteuse qui l’obligeait à conduire plus de 10h … et bien sûr impossible pour elle de trouver l’influenceuse… abonnés absents… Nous lui avons sorti une épine du pied grâce à notre présence in situ, et nous continuons à la soutenir par whatsapp !

Thierry PRENGERE

Président chez LAHLANHLA Voyages Privés SAS Membre Serandipians 1st Grand Travel Gold Agent 2023, 2024, 2025

4 mois

Bonne analyse comme à chaque fois !

Julia Couturas

✈️ Créatrice de séjours sur mesure | Votre rêve, mon inspiration pour les explorateurs exigeants | voyages hors des sentiers battus

4 mois

Je comprends tes réserves sur certains influenceurs voyages dont le comportement manque parfois de professionnalisme. Cependant, j’aimerais nuancer ton propos et clarifier certains points. Ton titre associe les "travel planners" aux influenceurs voyages, ce qui est inapproprié et trompeur. Il faudrait définir ce qu’est un travel planner, car ce métier est très différent de celui d'un influenceur. Nos missions, compétences et approches ne sont pas les mêmes. Il est vrai que le secteur du tourisme est varié, mais je connais des travel planners et influenceurs qui font un travail exceptionnel, bien au-delà de ce que l’on trouve en agence de voyage. Critiquer ces professions sur la base d’une minorité est dommage. De nombreux travel planners s'efforcent de promouvoir un tourisme durable et immersif, loin du tourisme de masse et des "packages pour touristes". Nous valorisons l’économie locale, préservons les cultures et créons des expériences authentiques. Il aurait été préférable de refléter cette diversité et richesse, plutôt que de réduire ce métier à une simple comparaison avec les influenceurs, ce qui ne rend pas justice à notre travail.

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