Obligation de reclassement et consultation du CSE : la Cour de cassation pose une limite pragmatique

Dans un arrêt du 8 juin 2022 (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 juin 2022, 20-22.500, Publié au bulletin), la Cour de cassation apporte une solution pragmatique à la question de l'obligation de consulter le CSE, lorsqu'aucune offre de reclassement ne peut être formulée concernant un salarié déclaré inapte.

La petite histoire

Dans cette affaire, Madame M, salariée de la société F., avait été déclarée inapte à son poste. Le médecin du travail avait pris le soin de préciser dans son avis, que l'état de santé de Madame M. faisait obstacle à tout reclassement.

La cour d'appel avait néanmoins retenu que la société F., tout en étant dispensée de formuler une offre de reclassement, demeurait tenue de consulter les représentants du personnel.

La question posée

Le droit, c'est du bon sens ! Certes, mais en matière d'obligation de reclassement, toutes les cours n'allaient pas dans la même direction... Un arrêt de la Cour de cassation, répondant clairement (et définitivement ?) à la question de savoir si l'employeur est tenu, ou non, de recueillir l'avis du CSE lorsqu'il est dispensé de toute recherche de reclassement, était donc bienvenu.

La nouvelle donne

La Cour de cassation juge que "l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.

Il s'ensuit que, lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi, l'employeur, qui n'est pas tenu de rechercher un reclassement, n'a pas l'obligation de consulter les délégués du personnel."

On rappellera que la décision a été rendue au visa des articles L.1226-10 et L.1226-12 du code du travail, dans leur version antérieure au 1er janvier 2018. Depuis, la consultation du Comité Economique et Social (CSE) a remplacé l'avis des délégués du personnel. On ne voit toutefois pas ce qui guiderait une solution différente s'agissant de la consultation du CSE.

Il s'agit en l'occurrence, d'une solution pragmatique et respectueuse de l'intention du législateur. La consultation du CSE ne doit en effet pas consister en une simple obligation formelle, qui viendrait inutilement alourdir les contraintes de l'employeur lorsque ce dernier n'a d'autre choix que de licencier le salarié déclaré inapte, et dont le médecin du travail estime que son état de santé ne permet aucun reclassement dans l'entreprise.

On veillera néanmoins à ne pas donner à l'arrêt du 8 juin 2022, une portée qui excèderait les mots de la Cour : la solution dégagée ici ne concerne, a priori, que l'hypothèse d'une dispense de recherche de reclassement, à l'exclusion du cas dans lequel l'employeur n'a aucune proposition à formuler.

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