OUI IL EST POSSIBLE ET SOUHAITABLE DE SUBSTITUER LA SYNTHESE EN PARFUMERIE

réponse à l'article OUI LA SYNTHESE EST NECESSAIRE EN PARFUMERIE. (interview de Xavier Fernandez - enseignant/chercheur passionné, de renom que j'apprécie beaucoup par ailleurs!)

tout cela est à nuancer tout de même cher Xavier!

certes les molécules de synthèse sont plus faciles à identifier et à donc à contrôler en terme d'innocuité ou d'impact sur l'environnement, cependant le problème vient le plus souvent des routes/processus de chimie qui mènent à la fabrication desdites molécules et qui contreviennent trop souvent à toutes les règles de l'éco conception...ce n'est pas pour rien que la fabrication de ces desdites molécules de synthèse est en grande majorité sous traitée en Chine ou en Inde, pays peu regardants sur les normes environnementales/sécurité des employés/etc..

Concernant les ingrédients naturels, la première erreur à mon sens est d'avoir intégrer ces substances complexes dans le processus REACH (système d'évaluation et enregistrement des molécules chimiques mis en place par l'EU) car autant l'évaluation est relativement simple pour des molécules chimiques, autant c'est une tâche extrêmement complexe voire impossible pour des extraits naturels dont chacun est composé de centaines de molécules dont les interactions sont encore inconnues, et donc difficilement quantifiables.

Résultat des courses, les parfumeurs se voient obligés de retirer par différents procédés certains allergènes notamment des extraits naturels...qui au demeurant n'ont jamais posés aucun problème d'allergies à la majorité des consommateurs.

Au final on rend les formules encore plus synthétiques du fait que ces extraits naturels "épurés" deviennent inutilisables souvent pour des questions de coût: un sacré paradoxe quand l'UE cherche à rendre l'industrie plus verte et écologique, et inciter le développement des produits dits plus naturels...

Concernant l'exemple du Santal ou de toute autre filière de naturel pour la parfumerie d'ailleurs, il est inexact de dire que sans la synthèse ces filières auraient disparu!

Le santal au même titre que le jasmin ou la rose sont depuis toujours des extraits extrêmement couteux, inaccessible (sauf en quantité infinitésimales) pour les parfumeurs qui créent des parfums pour les grandes marques disponibles par exemple chez SEPHORA, DOUGLAS and co...fabriqués et vendus en millions de flacons; ceci pour la simple et bonne raison que le budget de création alloué par la marque au parfumeur est de plus en plus bas et ne permet donc pas d'utiliser ces extraits précieux.

Un parfumeur qui formule pour la parfumerie dite "fine" travaille aujourd'hui avec un budget matières autour de 50 euros/kilo, il est donc assez simple de calculer qu'il est impossible d'intégrer des extraits précieux qui coûte 50 à 100 fois plus cher...et on ne parle même pas des fragrances créées pour les produits de consommation courantes (toilette, détergents etc..).

En conséquence le marché s'auto régule de lui même, et ces extraits précieux, inutilisables pour les parfums de masse, ont une utilisation limitée à quelque marchés de niche...ce qui fait d'ailleurs tout à fait du sens.

Il est toujours utile de rappeler que ces filières (dont le santal mais pas que...) sont de véritables filières de vie qui contribuent au bien être et à la survie de centaines de milliers de famille dans des pays peu développés, agricoles, et sont donc cruciales pour l'aide au développement; ces filières de plantes à parfum contribuent de façon trés efficaces à maintenir les populations à la campagne (en leur assurant des revenus réguliers et décents) et éviter ainsi l'exode rural vers des mégalopoles surpeuplées ou ces paysans déracinés vont alimenter le développement des bidonvilles péri-ubains avec les conséquences que chacun connaît. Ces filières permettent aussi de maintenir une agriculture souvent familiale, aux antipodes des filières industrielles en mono-culture qui ravagent de nombreux pays (cf le Brésil qui est le champion du monde avec le soja et la canne à sucre, ou l'Indonésie et la Malaysie avec l'huile de palme). Utiliser des extraits naturels dans des formules de fragrances (des dizaines d'extraits restent à des prix tout à fait abordables, et à des niveaux de production conséquents), créer des parfums naturels, tout cela contribue indirectement au maintien de filières agricoles qui sauvent les campagnes y compris en France d'ailleurs (cf les filières de plantes aromatiques en Provence par exemple).

La parfumerie est certes aujourd'hui victime de son succès, et il est clair qu'il serait tout à fait impossible d'offrir à la majorité de la population mondiale des eaux de toilette, des savons et des détergents aux fragrances naturelles aussi bien pour des questions de coût que de disponibilité des ingrédients.

Ceci étant dit, il existe des solutions technologiques qui permettent ou vont bientôt permettre de substituer de nombreuses molécules de synthèse par les mêmes molécules naturelles en valorisant des déchets de biomasses par exemple...y compris pour des molécules produites en milliers de tonnes par an!

Je ne prendrai qu'un exemple en conseillant aux lecteurs intéressés de consulter l'innovation technologique mis au point par la société AFYREN (française!) qui est en train d'industrialiser un procédé qui, en partant des déchets de betterave à sucre, permet de fabriquer une multitude de molécules naturelles: la capacité de la 1ère usine en construction en France sera tout de même de 16'000 tonnes par an...il ne s'agit donc plus d'une initiative confidentielle ou de niche comme chacun pourra le constater.

Ne baissons donc pas les bras, cher Xavier, en nous pliant aux diktats de certaines vérités établies, qui ne rassurent et n'enchantent que ceux qui ne souhaitent que surtout jamais rien ne change: catégorie dont tu ne fais absolument pas partie, je le sais pertinemment!

En conclusion, NON la synthèse fabriquée dans les pays à bas coûts aux normes environnementales et aux conditions de travail souvent inacceptables, et OUI à la chimie verte Made in EU; contribuons chacun à faire pencher la balance du bon côté...a minima.

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