Outre le succès diplomatique de la réunion de l’OPEP. Quels dividendes pour l’Algérie ?

Outre le succès diplomatique de la réunion de l’OPEP. Quels dividendes pour l’Algérie ?

L’annonce par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), à partir d’Alger de baisser sa production, a été largement saluée. La décision, qui reste pourtant à être appliquée sur le terrain par des membres qui sont connus pour avoir déjà dépassé leurs quotas de production par le passé, est néanmoins considérée positive par nombre d’analystes.

D’abord, globalement, elle «est certainement bénéfique pour tous les pays producteurs, les entreprises pétrolières et le secteur de l’énergie dans son ensemble», estime Anisse Terai, économiste et expert en énergie. Car elle permet «non seulement d’inverser la récente tendance baissière des cours de pétrole, mais aussi d’envisager des augmentations futures du fait de la gestion active des niveaux de production de l’OPEP».

Pourtant, au lendemain de la réunion, les prix du pétrole n’ont pas connu de hausse spectaculaire même si les valeurs boursières des compagnies pétrolières ont elle rebondi. Mais qu’en est-il de l’Algérie, pays hôte dont la part dans la production ne représente que 3% à peine de l’offre de l’OPEP ? Les responsables algériens ont beaucoup misé sur le succès de cette réunion et n’ont pas hésité à qualifier ses résultats d’historiques. Dans la pratique, pourtant, «l’impact sera marginal sur le niveau de production, relativement modeste, de l’Algérie, qui est en plus dicté par des contraintes opérationnelles», explique Anisse Terai.

Au cours des récentes années, l’Algérie se débattait pour maintenir le niveau de sa production. Selon la Banque mondiale (BM), sur une production totale d’environ 1,1 million de barils/jour, l’Algérie exporte 540 000 barils/jour. Un rapport de l’OPEP montre, quant à lui, que la quantité de pétrole brut exportée par l’Algérie en 2015 s’est élevée à plus de 640 000 b/j sur une production de 1,15 million de b/j.«Retards répétés des projets, difficultés pour attirer des partenaires d’investissement, insuffisance des infrastructures et de problèmes techniques», explique la BM le déclin de la production. Un léger mieux s’est néanmoins fait ressentir en 2015 et surtout au premier trimestre 2016, la croissance du secteur ayant enregistré des niveaux de 0,6% et 3,2% respectivement, d’après les chiffres de l’ONS. Le pays devrait bénéficier «autant que les autres producteurs de l’embellie des prix du brut, qui ont aussi un impact positif sur les prix du gaz naturel, dont le pays est un des plus grands exportateurs», explique, M. Terai, notre interlocuteur.

Mais si la décision de l’OPEP se concrétisait et que les prix du pétrole augmentaient, il n’est pas dit que la hausse serait suffisamment significative pour augmenter la marge de manoeuvre du gouvernement. Le déficit public étant trop important pour être jugulé par quelques dollars de plus. Pour notre expert, «les revenus supplémentaires engrangés par l’exportation des hydrocarbures permettront de limiter le déficit de notre balance commerciale».

A moyen terme, la situation resterait critique à moins de coupes drastiques dans le budget. Or, les estimations des différents analystes du marché pétrolier situent la moyenne des prix autour de 55 dollars en 2016. Les prévisions des institutions financières internationales prédisent que les prix devraient atteindre 50,3 dollars le baril en 2017, 57 en 2018, 59 dollars en 2019 et 60 dollars en 2020. Selon la Banque mondiale, même quand la phase d’offre excédentaire s’achèvera vers 2020 et le marché retrouvera un équilibre, les prix d’équilibre ne seront compris qu’entre environ 53 et 60 dollars le baril.

Toute hausse des prix du pétrole est susceptible de relever le niveau de nos revenus issus des hydrocarbures, mais avec des importations toujours aussi importantes autour des 50 milliards de dollars et des dépenses publiques incompressibles, il est évident que le salut des finances publiques ne passera pas par le marché pétrolier. «Certes avec des recettes supplémentaires le gouvernement peut envisager l’exercice 2017 avec plus de sérénité», estime M. Terai. Pour autant, «ça ne change rien à la nécessité de réformer la gouvernance, de diversifier l’économie, de revoir la politique de subvention, de moderniser le secteur financier, d’améliorer le climat des affaires et de renforcer les PME». Ce sont, selon lui, «les seuls gages d’une économie résiliente au service du développement durable» du pays.

Extraits de l'article et des propos recueillis par Safia Berkouk, publié dans « El Watan », édition du 3 octobre 2016

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