Consultation Rochebonne - un autre regard
- Sujet
Consultation du public concernant le Projet d’arrêté portant ouverture de la pêche au chalut pélagique sur le plateau de Rochebonne entre le 1er décembre 2019 et le 31 janvier 2020.
- Contexte
Issue des accords Pèlerin vieux de 40 ans, la pêche sur cette zone par la flottille des pélagiques se pratique en alternance avec le plateau de l’Ile d’Yeu une année sur deux. Elle concerne actuellement une quinzaine de paires de navires.
L’autorisation de pratiquer cette pêche est délivrée par l’administration territoriale (DIRM SA) après un processus de consultation et avis favorable non seulement des instances professionnelles mais aussi de celui des scientifiques de l’IFREMER notamment, ainsi que du Parc Naturel Marin de l’Estuaire et de la Mer des Pertuis.
Il ne s’agit donc pas d’une décision déconnectée des réalités de gestion d’une zone protégée, puisque l’avis de ceux qui en ont la charge, tant en matière de gestion d'espaces protégés que d'analyse scientifique, est déterminant.
- Le Bar
La question du Bar est aujourd’hui centrale quant à l’ouverture de cette pêche hivernale aux professionnels. S'il est avéré que la zone de fraye (reproduction) ne concerne qu’une partie superficielle de la zone concernée par cette autorisation de pêche et non la totalité de sa superficie, des incertitudes demeurent, tant sur l’état de la ressource que sur l’impact des différents usages au niveau national. La zone de Rochebonne fait à ce titre l’objet d’observations et de relevés des campagnes successives notamment. C’est pour répondre aux différentes incertitudes globales que des études sont en cours ainsi qu’une régulation stricte de la profession française. L'avis des scientifiques pour la campagne à venir montre que les connaissances disponibles sur la pêche du Bar dans cette zone n’ont a priori pas, au regard de la dernière campagne 2017/2018, d’incidence négative sur le stock si les conditions préétablies sont strictement respectées.
- Les mammifères marins
S’il est évident qu’un lien existe entre le Bar et cette pêche sur zone, les occurrences récurrentes à leur impact sur les captures accidentelles de mammifères marins ne sont à ce jour, de l’avis même des scientifiques, qu’une supposition non confirmée. Celle-ci est relayée notamment pour orienter les avis d’un public peu à même de faire le tri entre les différents niveaux d’information. En effet, des résultats montrent que les répulsifs acoustiques (Pingers) installés obligatoirement sur les engins visés par cette consultation contre autorisation de pêche sur zone, ont un "effet positif" sur les captures accidentelles, et que la flottille des chaluts pélagiques n’est pas la seule impliquée dans la capture des mammifères marins et n’en serait peut-être pas la première responsable. Beaucoup d’incertitudes persistent de façon générale sur ces captures de mammifères au sens large, ici aussi des études complémentaires doivent être menées.
- Analyse et propositions
Les acteurs de terrain, qu’ils soient scientifiques, observateurs, pêcheurs ou gestionnaires, s’accordent à reconnaître que les conflits, stigmatisations, circulation de mauvaises informations ou approximatives, ne font qu’envenimer des situations bien plus complexes qu’un simple tweet ne peut le laisser penser.
A la limite de l'injonction dans certains relais fais de cette consultation, je pense que les porteurs des enjeux océaniques, quels qu'ils soient, se doivent d'apporter des éclairages à leurs lecteurs pour que chacun puisse agir en conscience.
En réponse à cette consultation je proposerai pour ma part un suivi au plus près de ces pêcheries (avant de les arrêter si la réalité biologique et le principe de précaution l’exigent et uniquement dans ce contexte), et un accompagnement au changement de tous les usagers impliqués via le partage des connaissances de l’ensemble des acteurs. Ceci peut passer par différentes mesures dont par exemple :
- la présence d’observateurs à bord de façon régulière, comme condition à l'obtention de l'autorisation de pêche en zone protégée ;
- le déploiement d'études scientifiques menées avec les professionnels (mutualisation des moyens et des connaissances à la mer) ;
- Un travail de formation continue pour la mise en contexte, l’acquisition, et la qualité des données ;
- l’exigence que soit joints à toute consultation publique les informations disponibles pour aider à la prise de décision (soit les avis des différentes parties compétentes, les résultats de recherche, les historiques, la cartographie…) ;
- le déploiement de moyens d’action de l’État en mer et à la débarque pour assurer un contrôle des pêches au plus près (à autorisation exceptionnelle, contrôle particulier) et une surveillance de l'ensemble des acteurs/usagers de la mer engagés sur la question ;
- le suivi obligatoire d’une réunion d’information par l’ensemble des acteurs impliqués avant l’ouverture des campagnes permettant une appréhension complète des enjeux et des possibles ;
- l’inscription de tous (pêcheurs professionnels ou non, autres usagers) dans un programme de surveillance des espèces sur la durée ;
- l’adoption, si nécessaire, en concertation avec les professionnels de la pêche, de mesures biologiques (incluant seulement si nécessaire la fermeture totale ou partielle d’une zone/d’une pêcherie) et de plans de gestion pluriannuels scientifiquement validés …
Ces propositions non exhaustives répondent à des besoins ou réalités concrets sur le terrain et exigent de la part de tous une réelle implication tant en termes de moyens que de partage des données disponibles et des connaissances. Autant de voies possibles pour permettre une prise de décision et des pratiques éclairées au quotidien pour les acteurs de terrain comme pour les citoyens.
Pour contribuer (vous avez jusqu'au 22 octobre inclus) envoyer votre contribution à à consultations.daeem.dirm-sa@developpement-durable.gouv.fr en intitulant l’objet du courriel « Arrêté préfectoral portant ouverture de la pêche au chalut pélagique sur le plateau de Rochebonne entre le 1er décembre 2019 et le 31 janvier 2020 ».
Sarah Lelong
Dr. En droit et biologie océaniques,
Consultante, fondatrice de Consult’Ocean,
Coprésidente de l’association Oc&aïa,
Coordinatrice scientifique du programme Esprit de Velox.
Arrête de prospecter, fais-toi recommander ! Animateur du podcast RDV 🎙
5 ansBonjour Sarah, un peu complexe comme sujet pour un non spécialiste, j'imagine que seuls les experts du métier peuvent contribuer efficacement ?