PAYS LEGAL- PAYS REEL : LE FOSSE SE CREUSE
En général, les démocraties sont indirectes ou représentatives, le pouvoir s'exerçant par l'intermédiaire de représentants désignés par des élections généralement au suffrage universel On a assisté, autrefois, dans des pays devenus de grandes démocraties, au système d'élections au suffrage censitaire où le vote était réservé aux personnes qui s'acquittaient d'un impôt : le cens. C'était à partir de cette référence de suffrage censitaire que des juristes avaient forgé le concept de pays légal, (forcément minoritaire dans la population totale du pays, les riches étant toujours moins nombreux que les pauvres). Cette définition était faite par opposition aux membres du corps social, c'est-à-dire le pays réel.
Malgré le suffrage universel d’aujourd’hui, se pose en des termes plus ou moins prononcés le problème de la représentativité du pays réel (et c’est particulièrement le cas aujourd’hui en France). Cela ne veut pas dire que les représentants élus doivent ressembler en tous points au peuple, mais il est certain que le fossé entre pays légal et pays légal serait bien moins important si les élus ou membres de l’exécutif étaient tout à la fois très intègres, très honnêtes intellectuellement et très compétents
Au lieu de cela, nous avons en France un parlement dont le niveau moyen baisse terriblement et toujours pas de gouvernement ; Pire il faudra choisir pour le former parmi des profils de moins en moins attractifs au regard des enjeux de plus en plus complexes. Les démagogues racontent n’importe quoi et gagnent des électeurs alors que la faiblesse de leurs propositions aurait dû être facilement démontrée avec pédagogie et simplicité. Alors pourquoi ceux qui se prétendent sérieux et responsables n’y arrivent pas ? Sont-ils incompétents (quand bien même le niveau d’études compte, la compétence ne se mesure pas à un CV académique et gouverner n’est pas une épreuve du bac ou un oral de l’ENA ou une épreuve d’admission dans une grande école de commerce ou d’ingénieur) ? Sont-ils à ce point peu crédibles que ce qu’'ils racontent est absolument inaudible (pas de bons résultats, pas toujours une grande exemplarité pour certains) ? Sont-ils à ce point obsédés par leurs destins personnels et donc par des combinaisons de petits politiciens sans envergure ? Ou enfin sont-ils cyniques en voulant favoriser le chaos par la montée des extrêmes (Mitterrand directement en 1986 pour anéantir le PC ; Macron indirectement depuis 2017 en anéantissant LR et PS qui, jusqu’alors avaient fourni à eux deux 6 des 7 présidents de notre 5ème République élus au suffrage universel entre 1965 et 2012) ?
Recommandé par LinkedIn
Le spectacle pathétique tous partis et appareils confondus depuis quelques semaines nous conduit à penser que le pire est peut-être à venir (et c’est un optimiste de nature qui vous parle). Les moins pessimistes nous diront que finalement nous vivons une crise politique ordinaire (pas pire que 1968 ou pas pire que sous la 4ème République, pas pire que le spectacle qu’ont pu offrir de temps à autre certaines vieilles démocraties européennes comme la Belgique, les Pays-Bas, l’Italie ou même l’Allemagne). Mais nous avons (avions) un atout institutionnel que beaucoup n’ont pas : une constitution qui était censée préserver la stabilité et la cohérence. C’était bien entendu conditionné à l’existence d’hommes d’état ou de femmes d’état dans les sphères des pouvoirs législatif et exécutif
En réalité, mieux que tous les discours lénifiants sur les insuffisances de la démocratie, le fond du problème est que ce ne sont finalement pas les systèmes et constitutions qui sont bons ou mauvais mais les hommes qui les incarnent. Il nous manque tout simplement des grands hommes et/ou des grandes femmes. J’y reviendrai à l’occasion d’un nouvel article
MORY DORE