Performance globale et engagement

Performance globale et engagement

Les leviers de performance de l'organisation par l'engagement des salariés

Dans le cadre de ma thèse professionnelle, rédigée pendant mon M2 de management des relations sociales (soutenance orale Septembre 2017), j'ai eu la chance de réunir beaucoup d'avis, de toutes part, sur les conséquence de l'engagement (ou du non-engagement) des salariés sur la performance de leur organisation.

Constats et problématiques

Nombreuses sont les entreprises confrontées au turnover, à une accidentologie élevée, ou encore à des problématiques d'attractivité et de rétention du personnel. Ces difficultés se concrétisent par des opérations de recrutement répétées, des taux AT/MP en hausse, voir même du sous-effectif et des difficultés à mettre en œuvre les engagements auprès des clients ; soient des surcoûts et manques à gagner pour les opérations, et donc une rentabilité moins optimale qu'elle ne pourrait l'être. Il apparait dont primordial, vu les conséquences de ces difficultés, d'agir pour prévenir ces risques. C'est là que les services des ressources humaines peuvent apporter une valeur ajoutée conséquente...

Quelle stratégie de développement de l'engagement du capital humain adopter afin d'améliorer les performances individuelles et collectives ?

Après un contexte de crise (2008), le marché du travail reprend son envol et se tend, rendant plus difficile encore l'acquisition et la rétention des compétences (et profils) cibles pour les organisations, quelles qu'elles soient.

Ces tensions sont renforcées par l'évolution des générations : les X et les Y prennent une part de plus en plus importante dans la proportion d'actifs en France. Avec cette évolution de génération, vient également une évolution des mentalités et surtout une évolution du rapport à la valeur "travail".

Afin de répondre à la problématique, j'ai choisi de croiser certaines études/littératures avec des entretiens et sondages de personnes directement impliquées dans le marché du travail. Voici les résultats de ce croisement :

I. Un lien réel existe entre le niveau d'engagement des collaborateurs, leur propre performance et celle de l'organisation. En effet, un salarié engagé aura un comportement plus actif et impliqué dans ses missions au sein de l'organisation. La performance financière de l'organisation étant (grossièrement) la somme des performances individuelles, si chacun fait plus, le total est plus important ! Ce postulat se vérifie à tous les niveaux hiérarchiques et est confirmé tant par les littératures, que les salariés, les managers ou directeurs ayant répondu aux questionnaires.

II. Avant de parler de l'engagement, il faut surtout éviter la démotivation. Ci-après, quelques pistes de facteurs à mobiliser pour préserver ses équipes de la démotivation : en effet, l'engagement est l'aboutissement des comportements d'implication et de motivation. En cas de démotivation, l'individu peut devenir un frein pour son organisation et la performance de celle-ci...

  • Afin de l'en préserver, il faut donc commencer par pourvoir à ses deux besoins de base, selon la pyramide de Maslow, soient physiologiques et de sécurité. Ces besoins sont liés notamment à la rémunération (en €uros ou avantages sociaux) et seront considérés comme rassasiés lorsque l'individu n'aura plus d'inquiétudes sur sa capacité à payer son loyer/emprunt et à étancher sa faim et sa soif.
  • Vient ensuite la perception de la justice au sein de l'organisation : sociale, rétributive ou organisationnelle. Elle est relative à l'impression de justice ou non lorsque l'individu se compare à ses pairs, ou aux autres fonctions de l'entreprise, et est très personnelle et subjective. S'il estime que le ratio est en sa défaveur (différence de rémunération entre homme et femme à même profil et même poste par exemple), celui qui s'estime lésé aura tendance à ralentir le pas voir freiner sa propre performance et celle de son collectif.
  • Le management directif ("Si ... Alors...") est à proscrire pour les tâches complexes ! Il crée un sentiment d'ennui et d'inutilité et prive l'individu de sa dimension humaine, et de sa fierté de créer, analyser... Il est assimilé à une machine et n'a aucune latitude d'action. Il faut privilégier des managements plus participatifs, qui bien sûr ne fonctionnent qu'avec des individus compétents...
  • Enfin, le climat social et les relations humaines ont une importance capitale pour éviter la démotivation. Lorsqu'ils deviennent malsain, ce climat social et ces relations humaines augmentent les RPS, la réalisation de ce type de risque, et créent donc des surcoûts (accidentologie, absentéïsme, turnover, risques prud'hommaux, etc.)... En parallèle d'une baisse de créativité et de rendement ! Soit un double jeu perdant...

III. Certains leviers permettent d'agir immédiatement sur l'engagement des collaborateurs et leur participation aux différents niveaux de performance.

  • On privilégiera toujours les facteurs de motivation intrinsèques, dont l'effet est plus fort et plus durable. C'est pourquoi il faut connaitre sa population, pour mettre en œuvre des politiques et actions au plus près des attentes des collaborateurs. Des groupes de travail, ou la participation des IRP semblent indispensables...
  • Pour stimuler cette motivation intrinsèque, le collaborateur a besoin d'un cap à suivre. C'est donc à la direction que revient cette tâche : définir vision, stratégie, objectifs globaux et appropriables par les équipes. Une vision fédératrice, porteuse de sens pour les salariés de l'organisation suscitera plus de motivation, si elle peut être retranscrite en stratégies RH, commerciales et financières, et apportera de la cohérence entre les actions des différentes équipes. Cette cohérence (entre les discours, entre les actes, et entre les discours et les actes) pourra participer à développer le sentiment d'appartenance des collaborateurs, et peut-être de susciter des comportements "intra-preneurs", comportements créatifs et productifs.
  • La communication de ces valeurs, des enjeux et des résultats permettra de stimuler encore plus ce comportement intra-preneur. En interne, elle est indispensable pour fédérer et émuler autour d'objectifs et d'enjeux, et à l'externe, il est à noter qu'elle participe largement à la construction de l'image de l'organisation et à la fierté des individus d'appartenir à l'organisation...
  • Lorsque nous avons réuni les conditions internes de la performance, c'est sur chacun des individus qu'il faut commencer à travailler ; il faut les rendre encore et toujours meilleurs. Communiquons leur les informations nécessaires, développons leurs compétences et capacité (plan de développement des compétences, mentorat, tutorat...) ; mais surtout, donnons le droit à l'erreur. La crainte de la sanction est bien plus paralysante qu'un échec ne peut l'être. Le feedback régulier (type entretien professionnel, mais surtout pas que) permet aussi aux individus de se réguler et de mieux se situer par rapport aux standards de performances souhaités. Il permet aussi au collaborateur de se sentir estimé.
  • Enfin, un individu compétent sera plus autonome, plus créatif, plus débrouillard... et plus sensibilisé à ce qu'il fait. Il pourra ainsi participer à l'orientation de sa carrière et de ses missions, et s'il travaille sur des sujets qui l'intéresse, l'individu aura tendance à s'impliquer davantage. Le développement personnel et professionnel, en accord avec les aptitudes et envies des individus, permettra donc d'obtenir une somme d'individus plus épanouis et plus performants. L'aboutissement de ce développement de l'individu se concrétise par sa capacité à orienter son parcours, et c'est là qu'il peut alors se positionner comme ambassadeur de son organisation (savoirs et savoirs-faire, autonomie, réactivité, fierté, envie de convaincre... et plein d'autres avantages pour l'image de l'organisation, et donc son attractivité...). Si l'on pense souvent à l'expérience pour la transmission des savoirs et savoirs-faire, il ne faut pas non plus négliger la valeur ajoutée que peut apporter la plus jeune génération sur l'utilisation des technologies par exemple. Les tutorats peuvent s'inverser !

IV. En Bref...

Il faut permettre à chaque individu qui compose l'organisation de comprendre et cerner le cadre dans lequel il évolue :

  1. Créez une vision fédératrice, transposée en objectifs clairs et transparents, et que ceux-ci soient soutenus par des actions cohérentes émanent de la direction et du management ;
  2. Faites émaner une culture d'entreprise forte, en diffusant la vision et les objectifs, en parallèle de la transposition de cette vision en politiques pour chaque fonction. On permet alors à chacun de s'approprier les valeurs et ambitions de l'organisation, en comprenant en quoi il participe à l'avancement de l'organisation (sentiment d'utilité et d'attachement !). Les entretiens, le feedback, les réunions... permettront de développer et entretenir ce partage des valeurs et de faire connaitre la réalisation des objectifs... et le cas échéant d'en créer de nouveaux ou de les réajuster !
  3. Communiquez ! Les salariés, quel que soit leur niveau hiérarchique ou de formation, veulent savoir pourquoi ils font ce qu'ils font : le sens est primordial pour la motivation et l'engagement ; et sans retour qualitatif, pas d'amélioration possible... Communiquer crée aussi la possibilité de comprendre ce que fait chacune des fonctions de l'entreprise, et de réduire les éventuelles jeux de pouvoirs ou compétitions parfois malsaines entre les différents secteurs de l'organisation ; on recrée ainsi une unité au sein de l'organisation, qui peut alors avancer comme un seul homme.

Quand le cadre est posé et connu, il faut professionnaliser le management !

  1. Oubliez le management paternaliste et essayez la fonction de facilitateur ! Votre équipe de management doit se mettre à dispositions de vos activités et donner les moyens à chacun des individus composant votre organisation de devenir encore plus performant. Une bonne organisation permettra à vos managers de libérer de leur temps pour remplir cette "nouvelle" fonction : connaitre sa population, et, en accord avec elle, créer des parcours de développement.
  2. Formez vos managers ! En effet, beaucoup de managers occupent ces postes car ils étaient d'excellents techniciens... Mais si cette excellence crée la légitimité, n'oubliez pas que ce n'est plus le même métier ! Donnez leur les bases du management, formez les à communiquer de façon positive et constructive, formez les à intégrer et accueillir vos nouvelles recrues pour augmenter vos taux de survie, donnez leur des bases sur les possibilités liées à la formation, le droit social et les IRP. Ce bagage permettra au manager d'orienter ses subalternes et de réagir aux éventuelles problématiques, les équipes elles, apprendront à avoir toujours plus confiance en leur responsable, et s'impliqueront davantage.
  3. Arrêtez de vouloir tout contrôler. Si l'entreprise libérée parait une belle utopie, certaines pratiques sont très valorisantes pour les individus. En arrêtant les pratiques trop directives et paternalistes, vous rendez à chacun la responsabilité de son travail et de sa qualité, au sein d'un cadre bien défini. Optez pour des actions plus participatives (au degré qui vous conviendra, pas à pas) permettant aux individus de s'approprier les décisions qu'ils auront participé à élaborer. Un management bienveillant et un droit à l'erreur assumé permettront aux individus de se sentir en confiance et faciliteront les échanges et retours d'expériences entre individus et managers... Le droit à l'erreur est important, car stigmatiser l'erreur empêche toute prise de risque ou créativité et ralentit le développement de votre organisation. N'hésitez pas à mettre en œuvre des pratiques de conduite du changement pour amorcer ce virage.

Votre (nouveau) management aura ainsi de nouvelles clefs pour soutenir et orienter la performance de l'organisation :

  1. Il s'appropriera votre vision pour ramener de la cohérence avec les actions et objectifs qu'il demande à son équipe, et pourra également se tourner vers un management socio-économique (excellent ouvrage du même nom, de l'ISEOR, rédigé par Henri SAVALL et Véronique ZARDET) où l'organisation et les individus pourront trouver leur compte : méthodes plus humaines pour réduire tous les coûts cachés divers et variés.
  2. Connaissant mieux sa population, le manager sera plus à même de proposer un système rétributif en lien avec les attentes de sa population (mobilités, rémunérations, avantages divers...) et de ramener un meilleur sentiment de justice dans l'organisation (sociale, rétributive, organisationnelle). Vous créez ainsi un cadre plus intéressant, plus attractif et avec une meilleure capacité de rétention de votre personnel.
  3. Votre nouvelle communication permettra de diffuser les visions et valeurs, mais aussi d'anticiper les changements nécessaires, pour que tout un chacun puisse y participer plutôt que de le subir ! Les positionnements en tant qu'acteur du changement et ambassadeurs seront grandement facilités, avec tout les avantages que cela représente pour l'organisation en terme d'image ou de coûts.

Après votre management, renforcez votre base de performance :

  1. Cartographiez vos compétences en place et vos compétences cibles (= souhaitées à moyen/long terme), puis dessinez des parcours de développement des individus alliant capacités et envies avec les ambitions de l'organisation. Vous éviterez ainsi de subir la transformation et de devoir mettre en œuvre des plans de licenciement massifs à l'arrivée de nouvelles technologies par exemple, et de payer des indemnités de licenciement en parallèle de votre nouveau plan de recrutement.
  2. Vos actions concrètes de réduction des écarts créeront une émulation : chez vous on ne stagne pas, on progresse ! D'énormes bénéfices en terme de capacité de production, mais aussi en terme d'image pourront être très vite constatés. Formez, tutorez, mentorez, mettez en place des polyvalences ou des transferts de compétences internes entre les différentes générations... Les typologies d'action sont multiples et s'articuleront les unes aux autres, et n'oubliez pas que les salariés sont maintenant acteurs de leur parcours (CPF ? attention aux changements en 2019...). Les régions ou branches peuvent aussi soutenir des projets spécifiques.
  3. Vous développez ainsi un cercle vertueux : une entreprise en bonne santé permet à ses salariés de progresser. Ce constat permet aux individus de se ré-impliquer et de s'engager auprès d'une organisation dont la performance rejaillit sur eux (opportunités d'évolution, progression salariale, avantages sociaux, etc.).

Profitez de cette nouvelle intelligence collective pour développer toutes les performances (humaines, financières, individuelles, collectives...).

  1. Renforcez le dialogue social et établissez un climat de confiance, la qualité des relations humaines est primordiale pour tous, surtout les nouvelles générations. Dans un climat social positif, l'entraide et l'émulation seront plus importants.
  2. Respectez et capitaliser sur vos IRP : ils ont un pouvoir de conviction parfois très important auprès de vos collaborateurs. Si vous leur en donnez les moyens, ils pourront eux-même diffuser vos idées, valeurs, ambitions, et permettre à tous les individus de l'organisation de s'y sensibiliser et de se les approprier. Les IRP deviennent alors des alliés au lieu de vous inquiéter !
  3. La symétrie des attentions pourrait vous surprendre : ce postulat du début des années 2000 mérite toute votre considération. En effet, le collectif est constitué d'individus, qui ont en commun ce trait de sociologie : on se réajuste en continu selon notre perception, et le plaisir est un moteur puissant. Si votre salarié se sent bien et valorisé dans son travail, il mettra en oeuvre les moyens nécessaires pour continuer d'accroitre ce retour positif. Il s'impliquera davantage et augmentera son engagement et sa productivité. Au contraire, s'il s'estime lésé, sous-payé, ou encore victime de discrimination, pourquoi vous aiderait-il à gagner plus d'argent ? Au contraire, on observera des comportements freinant la qualité, voire même nuisibles à l'organisation.

V. Pour conclure :

  1. Vos différences (de genre, d'âge, générationnelles, culturelles, ou autres) sont une richesse, elles créent des opportunités de partage et de retours d'expériences infinies.
  2. Vos communications structureront le cadre au sein duquel vos individus saurons alors comment évoluer. Elles vous permettront aussi de mieux maitriser votre image (interne et externe), de faire vivre le dialogue social et de créer une ambiance de travail stimulante, ou encore d'aborder et résoudre les problématiques quotidiennes en assurant la cohérence avec votre identité.
  3. Capitaliser sur l'engagement et les performances individuelles augmentera vos performances : vos individus seront plus à même d'identifier les écarts entre travail prescrit et réel, et comme vous leur aurez donné les moyens d'agir, ils deviendront vos experts terrains et participeront d'eux-même à l'optimisation (réduction des coûts, créativité...). Qualité ressentie et satisfaction de l'individu lui permettront d'augmenter son engagement auprès de votre structure. Les volontés individuelles ont une puissance énorme sur votre niveau de performance.
Impact de l'engagement sur l'individu: le collaborateur s'est approprié l'identité et la culture de l'organisation, il peut la diffuser et croit en sa capacité. Les impacts retentissent sur la performance des recrutements, de la des collaborateurs, des coûts directement liés au facteur humain (absentéisme, turnover, contentieux...). L'individu engagé montre l'exemple et convainc autour de lui, il propage son engagement à ses collègues.
Impact de l'engagement sur la performance individuelle : le collaborateur engagé s'implique au quotidien et il est motivé. Il est plus productif, plus innovant, résout plus facilement les problématiques qu'il rencontre car il est plus compétent et réalise donc un bon niveau de performance avec des coûts plus bas que la moyenne (moins de sur-temps par exemple). 100% des répondants font le lien entre leurs niveaux de performance et d'engagement.
Impact de l'engagement sur la performance globale : on assiste à une explosion de l'efficience (ratio des moyens mis en œuvre par rapport à l'atteinte des résultats). Les coûts sont rationalisés et les surcoûts réduits au maximum. Des efforts à connotation "sociale" produisent donc réellement un impact économique.

Avec tout ceci, j'espère vous avoir convaincu de l'importance de miser et investir sur votre capital humain. Même si un jour, les IA et autres robotiques remplaceront partiellement l'humain, ce sera toujours lui qui fera votre image, indispensable pour placer vos produits ; et l'humain restera encore de nombreuses années le cœur de vos organisations et un centre de coûts important. Faites en votre allié plutôt que votre ennemi... pour créer toujours plus de valeur.

Manon LAPIERRE

Prendre contact avec l'auteure

Ouvrages et références multiples, connotant la QVT, le facteur humain, le management socio-économique, le management bienveillant, l'engagement, etc. Prenez contact pour les obtenir.

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Autres pages consultées

Explorer les sujets