Perspectives 2025
L’année 2025 me semble s’annoncer comme un moment charnière, un de ces tournants où le rythme des transformations technologiques semble s’accélérer à un point où il redéfinit nos manières de travailler, d’interagir et même de penser. Pourtant, derrière cette accélération, je perçois aussi des tensions, des contradictions, et des responsabilités qui ne peuvent être ignorées. Ce que j’entrevois pour cette année est donc à la fois fascinant et exigeant. Fascinant parce que les opportunités semblent infinies. Exigeant, parce que ces avancées nécessiteront une prise de recul et des choix éclairés pour ne pas céder à l’emballement.
Prenons, par exemple, l’intelligence artificielle. En 2024, Paris a ouvert la voie en parlant d’une "IA positive", une approche où cette technologie serait mise au service de l’humain et des valeurs éthiques. Pourtant, ce n’est pas cette vision optimiste qui domine toujours les discussions. Des leaders comme Sam Altman évoquent la possibilité de voir émerger dès 2025 une intelligence artificielle générale, capable de rivaliser avec, voire de dépasser, les capacités cognitives humaines. Si cela se concrétise, ce serait une révolution dans de nombreux domaines : l’automatisation des processus, les prises de décision, ou encore l’innovation dans les services. Mais une telle avancée soulève aussi des questions majeures. Quelle gouvernance pour une technologie si puissante ? Quels usages seront jugés acceptables, et qui en fixera les limites ? Ces questions doivent rester au centre de nos réflexions, car il en va de l’équilibre entre progrès technologique et respect des valeurs humaines.
Au-delà de l’IA, il y a aussi le contexte géopolitique qui pèse lourdement sur l’évolution technologique. Je pense ici à la fameuse guerre des semi-conducteurs, qui continue d’exacerber les rivalités entre grandes puissances comme les États-Unis et la Chine. Ces composants, invisibles mais omniprésents, sont essentiels à tout ce qui touche au numérique. Les perturbations dans leur production ou leur distribution affectent directement nos entreprises. Dans un monde où l’interconnexion des chaînes d’approvisionnement devient une vulnérabilité, je vois une opportunité pour les entreprises québécoises : renforcer leur autonomie technologique, ou au moins diversifier leurs sources d’approvisionnement pour minimiser les risques.
L’année 2025 pourrait aussi être celle où l’informatique quantique passe du laboratoire à des applications concrètes. Ces technologies, avec leur capacité à résoudre des problèmes jusqu’ici insolubles, pourraient redéfinir des secteurs comme la logistique, la cybersécurité ou encore la recherche scientifique. Mais là encore, je suis prudent. Ces avancées risquent d’accentuer ce que l’on appelle la dette technologique : cet écart croissant entre les infrastructures numériques existantes, souvent vieillissantes, et les exigences des nouvelles technologies. Pour y faire face, les entreprises devront être stratégiques et anticiper ces transitions avec soin.
Mais toutes ces innovations, aussi prometteuses soient-elles, ne signifient rien sans l’humain. C’est, à mes yeux, le véritable défi de 2025 : placer l’humain au centre de cette révolution numérique. Les entreprises doivent reconnaître que ce sont les talents qui permettent à la technologie de déployer tout son potentiel. Pourtant, le Québec, comme bien d’autres régions, fait face à une pénurie de compétences numériques. Si nous voulons suivre le rythme des avancées, nous devrons investir massivement dans la formation, et pas seulement pour des compétences techniques. Des qualités comme la créativité, la collaboration ou encore la capacité d’adaptation deviendront essentielles dans un monde où la technologie occupe une place croissante.
Il y a aussi une question d’éthique qui ne peut être éludée. Plus que jamais, je crois que les technologies que nous développons et utilisons doivent refléter des valeurs universelles. Transparence, équité, respect de la vie privée : ces principes ne sont pas optionnels. Si 2025 voit l’intelligence artificielle générale émerger, elle devra être accompagnée de garde-fous solides pour éviter que cette innovation ne devienne une source d’inégalités ou de conflits.
Par ailleurs, je pense que nous devons accorder une attention particulière à la gestion du changement. L’adoption de nouvelles technologies ne peut réussir que si elle s’accompagne d’un véritable travail d’accompagnement humain. Il ne s’agit pas seulement de déployer des outils, mais de faire en sorte que les employés se sentent impliqués et soutenus dans cette transformation. Ce sera, selon moi, un enjeu central pour les entreprises qui souhaitent prospérer en 2025.
Un autre aspect qui ne peut être ignoré, c’est l’environnement. Le numérique, s’il est mal géré, peut devenir un problème majeur pour la planète. Certaines projections suggèrent qu’il pourrait devenir le principal émetteur de gaz à effet de serre d’ici 2050. En 2025, les entreprises québécoises, mais aussi les gouvernements, devront accélérer leur transition vers un numérique responsable. Cela implique des choix concrets : des centres de données plus écologiques, des solutions pour limiter la consommation d’énergie des algorithmes, ou encore l’adoption de modèles économiques favorisant l’économie circulaire.
Sur ce sujet, je trouve les initiatives européennes inspirantes. Elles montrent qu’il est possible de combiner innovation et réglementation pour orienter le numérique dans une direction plus durable. Mais le numérique ne doit pas seulement être vu comme un problème à résoudre : il peut aussi être une solution. Avec ses ressources en énergie renouvelable, le Québec a une carte à jouer pour devenir un leader mondial de l’innovation verte, en utilisant la technologie pour optimiser l’efficacité énergétique ou pour gérer intelligemment les ressources naturelles.
Quand je pense à 2025, je vois une année où tout est possible, mais où rien ne peut être pris à la légère. Les entreprises québécoises, comme leurs homologues partout dans le monde, devront faire preuve d’audace, mais aussi de responsabilité. Investir dans des infrastructures modernes, placer l’humain au centre de la transformation, et adopter des pratiques durables : voilà, à mon sens, les clés pour naviguer dans ce futur incertain.
Si je devais résumer en un mot ce que 2025 représente pour moi, ce serait probablement "équilibre". Un équilibre entre l’audace d’explorer et la prudence nécessaire pour respecter nos valeurs et protéger notre avenir. C’est une année qui s’annonce exigeante, mais aussi riche d’opportunités pour ceux qui sauront faire les bons choix. Ce sera à nous, dirigeants et décideurs, d’être à la hauteur des défis qui nous attendent.
Présidente Pro Gestion - Stratégie, innovation, crédits d’impôt RS&DE, équité salariale
2 j.Merci Stéphane pour ces réflexions très inspirantes.