Pharmaciens d'officine : accompagner l’évolution du métier [Contrat présidentiel #BLM]
"Je propose de renforcer la coordination des soins et de rémunérer les missions réalisées par les équipes de soins pluri-professionnelles. L’amélioration de l’accès aux soins dans les zones aujourd’hui en tension est une priorité." Bruno Le Maire, discours au monde de la santé, 25 mai 2016
I. POURQUOI ?
Si le nombre de pharmacies reste globalement stable, avec 22 000 officines sur le territoire, ce secteur connaît depuis quelques années des difficultés sérieuses qui nécessitent une action déterminée des pouvoirs publics : baisse régulière du chiffre d’affaires des pharmacies (1 à 2% de diminution chaque année), moindre attractivité de la filière « pharmacie d’officine » qui pose la question de la relève des pharmaciens partant bientôt en retraite, difficultés à retrouver des repreneurs, etc. Dans le même temps, la profession de pharmacien connaît un taux de chômage qui dépasse les 10%, constituant un phénomène nouveau dans un secteur longtemps épargné par la crise de l’emploi. Sous l’effet de ces tensions, le secteur de la pharmacie d’officine connaît des évolutions structurelles, principalement autour de deux mouvements qui se complètent, sans être incompatibles :
- Développement de la parapharmacie comme complément de revenu ;
- Développement des actions de santé publique des pharmaciens, afin d’améliorer le service à la population : dépistage, suivi de l’observance au traitement, éducation thérapeutique des patients, etc.
Notre système de santé est riche de ses pharmaciens d’officine, qui sont des professionnels de santé à part entière, dont le rôle de santé publique doit davantage être reconnu et valorisé. En effet, même si nous constatons partout un fort attachement et une réelle confiance des Français à l’égard de leur pharmacie, les pouvoirs publics méconnaissent trop souvent leur rôle dans le système de santé pour privilégier une approche et une régulation avant tout financière de leur activité.
Il s’agit donc aujourd’hui de porter une politique qui, tout en soutenant la mutation engagée par les pharmaciens d’officine, s’appuie sur ces professionnels de santé pour renforcer l’accès aux soins de nos concitoyens, développer les missions de prévention et de santé publique et, au final, moderniser l’organisation de notre système.
Au regard des enjeux de proximité et de renforcement de l’accès aux soins auxquels notre pays est confronté, nous porterons un projet ambitieux pour la pharmacie d’officine. Nous réaffirmerons notamment qu’avant d’être un commerçant, le pharmacien est d’abord un professionnel de santé pleinement inscrit dans son territoire, participant à la mission de service public de santé.
II. QUOI ?
Nous proposons de faire évoluer la pharmacie d’officine autour de trois axes, afin de consolider sa place de professionnel de santé accessible et disponible en permanence, tout en stabilisant son économie. Il s’agira de structurer le réseau pour maintenir l’accès, de favoriser l’évolution du métier vers la délivrance de services de santé et de faciliter la coopération entre professionnels de santé.
1) Structurer le Réseau pour maintenir l’accès
Le réseau des pharmacies d’officine s’est construit de lui-même, avec une pharmacie pour un nombre minimum d’habitants. Une règle qui a fait ses preuves mais qui devient structurellement insuffisante pour répondre aux besoins d’accès à la santé des Français. Nous proposons donc aujourd’hui de :
- Favoriser le regroupement des pharmacies dans les villes où le maillage est concentré.
- Faciliter le maintien de la présence de pharmacies dans les zones rurales où il existe un risque de désertification avec le départ en retraite des pharmaciens titulaires actuels et l’absence de repreneurs.
- Moderniser le réseau des pharmacies par une évolution capitalistique : Il est essentiel de préserver l’indépendance des capitaux des pharmacies. Nous privilégierons donc la possibilité pour les officines de recourir à des financements obligataires externes. En outre, nous autoriserons l’ouverture du capital (minoritaire) aux préparateurs en pharmacie (comme cela l’est aujourd’hui pour les pharmaciens adjoints) afin de favoriser la participation des salariés au capital.
2) Favoriser l’évolution du métier vers les services de santé
La pharmacie d’officine voit sa rentabilité diminuer, ce qui fragilise sa présence sur le territoire. Afin de diversifier son activité tout en répondant à des besoins de santé publique, nous encouragerons la diversification de l’activité officinale vers davantage de services, de conseils et d’accompagnement du patient dans sa pathologie et sa médication.
3) Faciliter la coopération entre professionnels de santé & du médico-social
Nous devons prendre conscience que la complémentarité des médecins, masseurs-kinésithérapeutes, infirmiers et pharmaciens est la clé pour l’évolution de notre système de santé et pour l’amélioration des soins aux Français. Ainsi, nous avons pu constater au gré des nombreuses rencontres sur le terrain que les Maisons de Santé Pluridisciplinaires (MSP) et les Sociétés Interprofessionnelles de Soins Ambulatoires (SISA) prennent toute leur valeur avec la présence d’une pharmacie d’officine en leur sein
III. COMMENT ?
L’évolution du rôle des pharmacies d’officine sera permise par les mesures suivantes :
- Afin de favoriser le regroupement des pharmacies dans les villes où le maillage est concentré, une régulation adaptée des pouvoirs publics sera mise en œuvre pour aider à ces regroupements : encadrement des demandes de nouvelles créations sur ladite zone afin de ne pas encourager une concurrence préjudiciable aux pharmacies, facilitation des démarches administratives et fiscales de regroupement, etc. Cela sera permis par une évolution de l’article L 5125-5 du code de la santé publique.
- Pour faciliter le maintien de la présence de pharmacies dans les zones rurales où il existe un risque de désertification avec le départ en retraite des pharmaciens titulaires actuels et l’absence de repreneurs, la création de succursales sera autorisée. Cela sera permis par une modification des articles L 5125-3 et L 5125-4 du code de la santé publique.
- La modernisation du réseau des pharmacies sera permise par une évolution capitalistique du secteur. Concrètement, nous privilégierons la possibilité pour les officines de recourir à des financements obligataires externes. En outre, nous autoriserons l’ouverture du capital (minoritaire) aux préparateurs en pharmacie (comme cela l’est aujourd’hui pour les pharmaciens adjoints) afin de favoriser la participation des salariés au capital. Ces mesures seront permises par une évolution de l’article L 5125-17 du code de la santé publique.
- Pour encourager la diversification de l’activité officinale vers davantage de services, de conseils et d’accompagnement du patient dans sa pathologie et sa médication, l’article 38 de la Loi Hôpital Patient Santé Territoire, du 21 juillet 2009, trouvera son application réglementaire, permettant aux pharmacies d’officine de réaliser de nouvelles missions :
- Services complémentaires à la dispensation : prolonger ou ajuster une ordonnance, prescrire un médicament sous conditions, réaliser un bilan de médication, établir des plans de prise, accompagner individuellement l’observance ;
- Services de santé : poursuivre la concertation pour permettre aux pharmaciens de vacciner, dans certaines conditions, les patients, valorisation de la télémédecine, réalisation de prévention personnalisée, etc.
- Pour faciliter la coopération entre professionnels de santé et médico-social, l'article L.6323-3 du code de la santé publique sera pleinement mis en œuvre par les Agences Régionales de Santé notamment, afin de prévoir l’inclusion des pharmaciens dans tous les projets de Maisons de Santé ou de sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires.
- Enfin, l’accompagnement de la montée en qualité des pharmacies de France sera permis par l’application d’une norme commune ISO 9001 pour la dispensation du médicament auprès du patient.
- Par ailleurs, la définition d’un nouveau rôle de santé pour les pharmaciens d’officine doit nécessairement s’accompagner d’une évolution du modèle économique de ce secteur, afin de rendre moins dépendant les pharmaciens d’une rémunération aujourd’hui essentiellement basée sur le volume des boîtes vendues.
- S’agissant d’une transformation profonde de métier, ce modèle devra être négocié avec les professionnels concernés à l’occasion des réflexions structurelles qui seront engagées en début de quinquennat.
IV. COMBIEN ?
Ces mesures, d'ordre réglementaire ou législatif, n'emportent pas de conséquence directe sur les finances publiques. Des économies sont à attendre de la simplification induite pour les patients, les professionnels et les administrations associées. Ces économies ne sont pas chiffrées en l’état et ne pourront qu’influer positivement sur l’équilibre des comptes publics.
+ Mentions de la Pharmacie dans les chantiers du programme de Bruno Le Maire :
CHANTIER N°5 : AMELIORER LA QUALITE DE NOTRE SYSTEME DE SOINS
(...) le statut des pharmacies d’officine évoluera afin de maintenir un maillage important sur l’ensemble du territoire français et reconnaître le rôle essentiel que jouent ces professionnels de santé auprès de la population (voir fiche SAN8) : Préserver l’indépendance des capitaux des pharmacies afin d’éviter toute financiarisation Permettre la création de succursales pour favoriser l’implantation de pharmacies en secteur rural Favoriser le regroupement des pharmacies dans les villes où le maillage est concentré Favoriser l’évolution du métier vers les services de santé et mieux prendre en compte ce nouveau rôle en revalorisant des honoraires versés Faciliter la coopération avec les professionnels de santé et le secteur médico-social à travers les « maisons de santé pluridisciplinaires » (MSP) et les « sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires » (SISA)
CHANTIER N°7 : RENFORCER L’EGALITE ENTRE LES TERRITOIRES
Nous renforcerons l’action de l’Etat au profit de la ruralité
(...) En outre, des mesures détaillées dans le cadre des autres chapitres, contribueront au développement rural (déploiement de la fibre optique d’ici 2025, lutte contre les déserts médicaux, développement de l’eadministration, création de « maisons du service public », ouverture de succursale de pharmacies d’officine dans les territoires ruraux, maintien de la mission de service public de La Poste…).
SOURCE
- https://www.brunolemaire.fr/pdf/BLM-contrat-presidentiel.pdf
(page 871-873)