Pour un Éloge de la fragilité – L’interdépendance (7) – Se repérer dans l’espace géo-culturel...

Pour un Éloge de la fragilité – L’interdépendance (7) – Se repérer dans l’espace géo-culturel...

25. Oui, 25 de nouveau. 25 espaces contigus. 25 zones géographiques pour une deuxième grille pantopique en quête de cette interdépendance...

(d’après quelques titres de presse...)

[Péninsule arabique] Report du pèlerinage à la Mecque (hajj) en Arabie Saoudite...

[Afrique Centrale] Décès d’une des stars de la rumba congolaise, Aurlus Mabélé...

[Pacifique] Bouleversement de la vie communautaire des tribus kanaks en Nouvelle-Calédonie...

[Monde slave] Diffusion gratuite par le Théâtre Bolchoï de ses meilleurs spectacles...

[Anatolie & Caucase] Ruée sur l’eau de Cologne en Turquie...

[Asie du sud-est] Peur accrue dans les camps de Rohingyas en Birmanie (Myanmar) et au Bangladesh...

[Afrique du nord] Sortie d’un billet de banque tunisien rendant hommage à Tawhida Ben Cheikh, femme médecin du Maghreb...

[Amérique du nord] Mise en danger des producteurs de sirop d’érable au Canada...

[Inde] Illuminations sur tout le territoire indien à la grâce des bougies et lampes traditionnelles...

[Amérique du sud / Pacifique] Application du concept de « tapu » sur l’île de Rapa Nui...

... Tandis que tourne la roue du grand manège planétaire à la vitesse de la crise actuelle, on se prend presque à imaginer ce que pourrait être une reconnexion géographique à ce vaste espace qui soudain s’interconnecte – virus oblige. Non pas simplement une connexion intellectuelle, faite de savoirs cumulés et un peu froids, mais quelque chose de plus profond, de plus sensible, de plus durable... L’idée d’établir ou rétablir un pont d’humanités, d’innombrables ponts lancés à la rencontre du monde.

C’est ici que loin de composer une mosaïque inerte, cette deuxième grille se combine à la première, celle des thématiques pantopiques... 25 x 25... Histoire d’inviter au tiss’âge annoncé.

Ainsi l’eau de Cologne turque, dite « kolonya », nous plonge-t-elle à la découverte de ses origines rappelant sa mise au point par un parfumeur italien bien entendu à Cologne, au 18e siècle, puis sa venue en Turquie au siècle suivant... Et à côté des grandes marques, ‘Atelier Rebul’, ‘Eyüp Sabri Tuncer’, ‘Selin’ ou ‘Vakko’, nous nous prenons à apprécier ses variantes et saveurs régionales à base de mandarine, de tabac ou de pomme...

C’est alors qu’à côté de la prouesse de Tawhida Ben Cheikh, nous pouvons plus largement questionner la place de la femme au Maghreb et par exemple, rencontrer dans une autre dimension, celle de l’intellect, Fatima al-Fihriya (9e siècle). L’on dit souvent que celle-ci serait la fondatrice de la plus vieille université du monde encore en activité, à Fes (Maroc) : l’Université Al Quaraouiyine...

Et de la même manière pourquoi ne pas partir sur des rythmes de danse et de rumba et de ses déclinaisons africaines, retrouver son exportation cubaine dans les années 1930, son lien avec les langues, et plus particulièrement le lingala, ses attaches locales comme le « soukous »...

Et comment ne pas faire halte sur les traces de l’acériculture (exploitation du sirop d’érable), se fondre dans les savoirs traditionnels, ceux des Abénakis, des Haudenosaunee ou encore des Mi’kmaq ! Les Anishinaabe n’appellent-ils pas « la période durant laquelle la sève est recueillie la « saison des sucres », la « lune d’érable » ou « le mois des sucres » »... (thecanadianencyclopedia.ca) Comment ne pas nous sentir solidaires des plus de 10000 exploitations aujourd’hui présentes sur l’ensemble du territoire canadien...

En vérité, chaque fragment du monde contient la puissance de ses attachements multiples, variés... Chaque fragment du monde est une invitation à renforcer les ponts qui nous y mènent, non seulement pour la satisfaction d’un instant de découverte mutuelle, mais pour toute la promesse d’un dialogue universel.

Plus que jamais, la devise pantopique prend ici toute sa résonance : « Le centre du monde est partout et la périphérie nulle part. » (Nicolas de Cues) Puissions-nous le ressentir de plus en plus au fond de notre être, de nos pensées, comme de nos actes. Puissions-nous demain prendre les décisions qui s'imposeront à la lumière et dans le meilleur respect de cet enchevêtrement. La crise planétaire peut aussi permettre cela : une invitation durable à nous raccorder aux autres centres du monde, un appel à une meilleure conscience de nos interactions et de la place que nous pouvons y tenir.

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