Pourquoi faut-il soutenir les démocrates de Hong-Kong ?
HONG-KONG 2019

Pourquoi faut-il soutenir les démocrates de Hong-Kong ?

article rédigé en décembre 2019

Depuis quelques années, un large mouvement social secoue le territoire autonome chinois de Hong-Kong. Comprendre les enjeux et les défis de ce territoire permet d’analyser à la fois la politique chinoise mais aussi les effets d’une mondialisation qui nécessite toujours des régulations.

Pourquoi ces manifestations très dures ?

Très peu de temps après le départ des britanniques en juillet 1997, l’inquiétude a monté dans la population du territoire. Anson CHAN chef de l’administration publique démissionne en 2001 car elle perçoit la volonté de Pékin de remettre en cause l’application de certains principes de l’accord de 1984.

Le contrôle par le pouvoir communiste se renforce. Il faut rappeler que le dernier gouverneur britannique Chris PATTEN a instauré une part de démocratie réelle par vote direct d’une partie modeste des élus du Conseil Législatif (LEGCO). Mais le Royaume-Uni n’a pas été jusqu’à réaliser l’élection complète par suffrage direct de tous les élus. Chris PATTEN défendait aussi la vitalité de la vie démocratique ainsi que les organisations économiques et sociales notamment les syndicats HKCTU et HKTUC. Les dirigeants syndicalistes et leurs adhérents sont très souvent investis dans les associations et mouvements démocratiques du territoire.

Ces dernières années, la Chine a montré une stratégie délibérée pour accélérer la transformation de Hong-Kong en réduisant les libertés d’expression de tout ordre, notamment par la disparition de libraires et éditeurs par kidnapping qui sont réapparus incarcérés en Chine continentale.

La « révolution des parapluies » en 2014 fut aussi une réaction très vive des hongkongais contre la mainmise dangereuse de Pékin.

La corruption endémique en Chine populaire semble s’étendre encore assez modérément à Hong-Kong. L’une des forces du territoire a été pendant longtemps une administration exemplaire en matière éthique à l’image du Royaume-Uni.

Enfin, l’autocensure chez les journalistes et experts politiques et sociaux s’est développée très rapidement ces dernières années face aux pressions chinoises.

L’annonce l’année dernière du projet de la possibilité d’incarcérer en Chine Populaire des citoyens hongkongais à déclencher des manifestations de très grande ampleur. Cela montrait en plein jour les vraies dispositions dangereuses du nouveau grand timonier ultra-autoritaire de Pékin Xi JINPING qui dispose aujourd’hui de plus de pouvoirs que Mao.

 Quel est l’état du mouvement syndical?

Au milieu de 2019, le syndicat HKCTU a revendiqué le retrait de la loi sur l’extradition ; la libération des manifestants arrêtés sans inculpation ; le retrait par les autorités de la qualification « d’émeutes » des manifestations du 12 juin ; une enquête indépendante sur les violences policières et les abus de pouvoir ; et le recours au suffrage universel. Devant la puissante montée des mobilisations citoyennes dans tout le territoire, la première revendication a été obtenu avec la déclaration de la dirigeante de Hong-Kong à l’automne

Le mouvement syndical hongkongais fait honneur aux principes du syndicalisme libre. A l’automne dernier, la CFDT a montré sa solidarité concrète en recevant à son siège de Belleville à Paris les dirigeants syndicaux.

Depuis longtemps, ces syndicalistes se battent inlassablement pour assurer le respect des conventions fondamentales de l’OIT, notamment celles sur la liberté de négociation et les libertés syndicales. C’était déjà une des actualités de la Conférence annuelle de l’OIT en 1998. Ces collègues et amis syndicalistes prennent de plus en plus de risques personnels et collectifs. Leur déclarer notre soutien pour leur combat est un réflexe CFDT naturel.

Quelle est la position du mouvement syndical international ?

La solidarité joue bien entendu mais avec des variantes parfois discutables voire dangereuses. Depuis la fin des années 90 coïncidant avec l’arrivée des syndicats proches ou se revendiquant du mouvement communiste international au sein de la CISL devenue CIS, ainsi que la CES (présidée aujourd’hui par notre secrétaire général confédéral Laurent BERGER), et les syndicats professionnels internationaux comme ITF (Fédération Internationale des travailleurs des Transports), certaines organisations défendent l’idée de contacts officiels et resserrés avec le syndicat de Chine Populaire.

Or, ce « syndicat » est un instrument strictement politique sous le contrôle exclusif du PCC. Bref, un outil de propagande au service du pouvoir et du premier dirigeant chinois. Etre favorable à des relations cordiales avec le syndicat de chine populaire sous le prétexte du nombre de travailleurs chinois et de la puissance économique de l’empire pékinois est méprisable par rapport à la lutte sociale menée par nos collègues et amis de Hong-Kong. Le syndicalisme de transformation sociale que porte la CFDT et toutes nos valeurs de combat pour la démocratie et l’émancipation des salariés ne pourra tolérer ce genre de manœuvres indignes.

Quelle est la situation des transports à Hong-Kong ? Et notre rapport cheminot européen et français à cette situation grave ?

Le patron de Cathay Pacific a été limogé sur l’exigence du gouvernement de Pékin parce qu’il était trop « soft » par rapport à l’expression de colère de nombreux salariés de cette grande compagnie aérienne.

Des employés de la société de transports publics MTR syndiqués (ou non), ont été sanctionnés et nombreux ont été menacés. MTR est une société moderne et l’exploitation du réseau public se fait en qualité et avec un dialogue social réel. Cette entreprise gagne aussi des appels d’offre dans le monde entier comme par exemple en Suède pour des transports ferroviaires de voyageurs.

Pour la CFDT cheminots, il est essentiel de veiller à ce que nos collègues de MTR à Hong-Kong comme en Suède ou ailleurs puissent pleinement bénéficier des droits proclamés non seulement dans les normes de l’OIT mais aussi les lois nationales, les conventions sectorielles et les accords d’entreprise. Il serait injuste et intolérable de ne pas les défendre aussi à Hong-Kong qui peut développer des mesures encourageant le dumping social et économique alors que MTR s’est engagé comme un transporteur public d’envergure mondiale pouvant répondre à des services de transports en France et ailleurs.

C’est aussi pour cela que la délégation CFDT est intervenue lors de la dernière séance plénière du Comité Européen du Groupe SNCF (en décembre 2019) pour demander à la Direction SNCF de soutenir le droit social et international qui protège les salariés de MTR y compris à Hong-Kong. Nous avons été les seuls à le dire.

Commémorer le centenaire du BIT en 2019, et le premier directeur de ce bel outil par le français Albert THOMAS, défendeur de la social-démocratie française, européenne et internationale, n’est utile que lorsque devant les évènements tragiques de Hong-Kong, nous exprimons notre soutien et une veille très active sur les conditions sociales et humaines de la libéralisation du marché mondial des transports publics.

Rémi AUFRERE-PRIVEL

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