Quand la vocation devient aliénation
Vivre son métier au point de le devenir. Oubliant qu'avant le Titre il y a la Conscience Infinie.
Fêlure de la psyché éclatée par la pression archaïque d'une hiérarchie insouciante.
Pas innocente.
Constat amer rempli d'incohérence et de paradoxes, nous gardons l'illusion que cela changera, comme si soudainement tout se remplira de sens et de cohérence.
La vocation ou l'art de se donner le droit d’exister que par les rôles et l'utilité que nous nous attribuons dans notre profession.
Sensé nous rendre heureux et utile, nous rendant triste et soumis.
Efforts après efforts, injonctions après injonctions, paradoxes après paradoxes, nous avons beau parler mais à défaut de bien parler face à ces beaux parleurs, nous n'avons d'autre choix que de rentrer la tête baissée et le cœur serré,
En se réconfortant, à chaque lendemain, d'être à notre place, et portant en nous le poids des maux inattendus, non entendus.
- "Tout arrêter pourquoi faire?"
- "Vous sauver enfin !"
- "Me sauver? Je ne fuis pas. Je ne sais être rien d'autre que ce pour quoi je suis fait.. Je m'adapte, ou plutôt... Je subis."
Non, on ne répare pas un vase en cristal brisé par de la colle bon marché.
Dés la première fêlure, on le magnifie, on lui porte une attention particulière, on le met en valeur, parce que cette toute petite brèche raconte une histoire, qui lui rend son unicité.
"On", soi même ou quelqu'un d'autre. Un autre ou un soi capable de voir, d'entendre et de comprendre qu'il ne s'agit plus de devenir, mais de s'en sortir.
Sortir de quoi? De qui?
De cette entité qu'on a appelé vocation et qui a fini par devenir aliénation, qui a fini par prendre notre raison.
Non ils ne sont pas fous, ceux qui passent à l'acte. Juste dignes.
Fatigués, éreintés. Mais encore conscients de leur vocation, ils emportent leur travail à la maison, dans la voiture, ou dans la cour de l'école, s'en servant comme arme qu'ils retourneront contre eux-même.
Vocation, ou sens de l'utilité profonde, qui les mènera à ce geste à la fois désespéré mais plein d'espoir.
Cette fois-ci, il ne s'agira plus d'un appel à l'aide, mais d'un au revoir.
En hommage à toutes ces personnes qui meurent sous les coups de l'incompréhension.
Lucie Ducap