Réflexion autour des leviers pour un numérique responsable
On parle beaucoup en ce moment de l'impact des usages numériques sur les ressources que nous offre la planète. Les rapports se succèdent et convergent vers le même constat : l'explosion des usages numériques ont de lourdes conséquences sur l'environnement.
Le problème ? c'est que cette pollution est invisible! On pense parfois à la consommation électrique de nos smartphones, ordinateurs, box, TV... mais moins souvent à celle de toute l'infrastructure qui support les services que nous consommons. La plupart des gens ignorent également que leur smartphone fraichement sortie de sa boite a déjà généré 75% de la pollution de son cycle de vie.
A la maison, il y a pleins de leviers pour réduire l'impact environnemental de ses usages numériques. Mais quid de l'entreprise ? Quand on travail, comme moi, dans les infrastructures informatiques et qu'on a une conscience écologique, on se rend compte qu'il y a finalement peu d'outils clé en main pour aller dans le bon sens. Je vous livre donc l'état de mes réflexions sur le sujet, n'hésitez-pas à lancer le débat en commentaires!
Note : je n'aborde ici que l'impact environnemental du numérique. Bien sûr, l'impact sociétal est tout aussi important mais je suis moins aguerri sur le sujet.
La sobriété
Partons d'un simple conseil de ma grand-mère :
"Si tu veux éviter de grossir, évites de trop manger"
Et bien quand on parle d'impact environnemental c'est pareil. On peut parler efficience, innovation, compensation et tout ce qu'on veux mais il est bien plus efficace de moins consommer.
Mais peut-on traduire le conseil de ma grand-mère dans la DSI ?
1/ Dans les projet
On pourrait croire que le numérique est la réponses à tout. Mais bien souvent, on confond les besoins de l'entreprise (servir ses clients, payer ses factures, répondre à des obligations légales, communiquer) et les envies de ses employés/managers/directeurs (faire un site web en 4K, équiper tout le monde d'un smartphone, collecter toutes les données possible...).
Le premier levier est donc de séparer les besoins, les exigences, les contraintes et les envies. En tant qu'AMOA, chef de projet ou architecte, il faut remettre sans arrêt en cause ces critères en évaluant les coûts direct, les coûts cachés, les impacts et en proposant parfois des alternatives non technologiques (coucou l'application dont on se sert 1 fois par mois pour remplacer un document papier).
Le second levier dans les projets est d'utiliser une démarche d'éco-conception. Celle-ci permet de mesurer au fur et à mesure les ressources utilisées par une application ou un service et de trouver plus facilement le moyen de les réduire. Une fois l'application déployée, il est souvent trop tard (trop coûteux, trop risqué) de changer quoi que ce soit.
2/ Dans les usages
Si une grande part de l'impact numérique est lié à la fabrication des équipements, l'usage qu'on en fait dans l'entreprise peut significativement infléchir le bilan. On parle ici de sensibiliser les utilisateurs de l'entreprise aux bonnes pratiques. Si le rapport du Cigref émet quelques idées, vous trouverez pleins de bonnes choses également dans le guide associé de l'ADEME.
Comme pour la sensibilisation à la sécurité informatique, ces bonnes pratiques servirons également à la maison. N'hésitez-pas à appuyer la dessus, c'est un bon moyen de susciter l'intérêt!
L'allongement de la durée de vie des équipements
Nous l'avons dit, une très grande partie de l'impact environnemental du numérique est lié à la fabrication des équipements. Il est donc indispensable de repenser sa politique d'achat, de maintenance et de renouvellement du matériel.
1/ A l'achat
"Qui ne demande rien, n'a rien".
Lors d'un appel d'offre ou des négociations avec un équipementier (PC, smartphone, matériel réseau, serveurs...), vous pouvez tout à fait ajouter des critères de choix basés sur la durabilité du matériel et plus particulièrement:
- La résistance aux pannes (on parle de MTBF par exemple)
- La résistance à la casse (écran plus solides, alimentations protégées contre les surtensions...)
- La réparabilité (on espère que l'indice de réparabilité se généralisera)
- Des engagements sur la mise à disposition des mise à jour logicielles
- Des engagements sur la période de maintenance matériel et sur les coût associés (on en parle juste après)
Attention : les contrat de leasing, plébiscités par la direction financière pour réduire les CAPEX, sont souvent antinomiques avec ces démarches.
2/ La maintenance
Lorsqu'on parle d'augmenter la durée de vie d'un équipements informatique, on est rapidement confronté à la capacité à dépanner ou remplacer ces équipements. La DSI s'appuie, la plupart du temps, sur un contrat souscris auprès de l'équipementier pour assurer la maintenance au delà de la période de garantie. Seulement voilà, après 3, 4 ou 5 ans, celui-ci veut vous forcer à renouveler votre matériel (coucou les objectifs de chiffres d'affaire!). Il augmente ses coûts, réduit ses engagements voir dégrade la qualité de se prestations. Qu'elles sont les alternatives possible ?
- Le renouvellement partiel : on définit un périmètre plus critique sur lequel le matériel sera renouvelé et on se sert du "vieux" matériel pour assurer la maintenance sur le reste du périmètre. On itère ensuite régulièrement pour renouveler le parc sur plusieurs années. Cela demande un peu de logistique et un processus de renouvellement efficace mais c'est tout à fait possible. Cette solution évite aussi d'avoir tout un parc qui devient obsolescent au même moment (on a tous vécu les pannes de disque dur en série car ils avaient tous été achetés en même temps).
- Les mainteneurs alternatifs : bien souvent les grossistes ou des entreprises spécialisés sont capable de vous proposer des contrats de maintenance compétitifs au delà de la durée prévue par l'équipementier. Ils s'appuient bien souvent sur du matériel reconditionné et vous propose également du rachat de matériel.
3/ Anticiper la fin de vie
Ouff, ça y est, vous venez de terminer une refonte du réseau local de vos 29 sites en France. Et là, Albert, le chef de projet, vous demande :
Qu'est-ce qu'on fait du vieux matos chef ?
Il est indispensable d'anticiper ce point si on veut prendre de bonnes décision pour l'environnement. Car vos déchets seront peut-être les matières premières d'un autre. Seulement voilà, la filière aujourd'hui est très organisée autour du recyclage est assez peu vers le ré-emploi. Il faut donc prendre le temps de trouver le meilleur moyen de se "débarrasser" du matériel obsolète. Mais qu'elles sont les alternatives à la mise au rebut?
- Le don aux associations ou aux écoles : je ne connais pas de plateforme de mise en relation mais il n'est pas très compliqué de donner une seconde vie à nos équipements. Que ce soit les PCs pour donner à des personnes en situation de fractures numériques, des téléphones pour aider à la réinsertion sociale, des équipements réseaux pour aider les étudiants à apprendre en montant des maquettes... Vos équipements en fin de vie seront d'utilité publique. A noter : ces dons donnent souvent droit à des réduction fiscales! Votre service communication sera également content de valoriser cette action auprès de vos clients/partenaires/futurs employés.
- La rachat par votre mainteneur ou des brokers : comme nous l'avons vu précédemment, votre vieux matériel pour être facilement reconditionné pour assurer le remplacement d'autres équipements. Contactez ces partenaires qui vous feront une offre de rachat, ça coutera toujours moins cher que le D3E.
Bien sûr, dans certains cas, il n'est pas possible de revendre le matériel (trop vieux, cassé...) et l'utilisation de la filière de recyclage D3E s'avère obligatoire.
Attention : Dans tous les cas, pensez à effacer toutes les données présentes sur les équipements!
Conclusion
Ceux d'entrevous qui sont les plus affutés dans la domaine de l'écologie, l'auront remarqués, je me suis inspiré de la logique des 3 R pour rédiger cet article. En informatique comme dans tous les domaines, l'écologie se base sur des principes simples et il est facile de transposer ce qui est fait dans d'autres domaines.
Merci de m'avoir lu jusqu'ici !
Acteur d'un monde plus durable et juste
3 ansMerci Maxime Baudry, Evrard Marc, Yves-Gaël Chény, Eric LAURENT, Jean-Yves CALBO, François TIERS, Raoul AUFFRET pour vos échanges inspirant et Pauline Marteau pour l'organisation.