Regard (presque) naïf d’un psychiatre sur la santé psychique des sportifs.
On dit qu’il faut toujours préciser d’où on parle. Quelques précisions s’imposent donc. Je ne suis ni coach, ni préparateur mental et n’ai pas d’expérience d’accompagnement de sportif de haut niveau Je suis psychiatre, fan de sport, et m’intéresse depuis un an environ à la question de la santé psychique des sportifs. J’ai lu pas mal de choses, me suis intéressé aux formations et aux pratiques déjà en place, et j’ai discuté avec quelques préparateurs mentaux.
De plus en plus, des témoignages de sportifs sur leur santé psychique émergent. On les retrouve à travers des articles ou des documentaires. On y retrouve le plus souvent des symptômes voir des troubles assez « classiques », comme la dépression, des troubles anxieux, des troubles des conduites alimentaires etc. Jusque-là, rien de très surprenant, la prévalence de ces troubles étant largement connue dans la population générale.
Ce qui interpelle par contre dans un premier temps, c’est l’étonnement et les commentaires des gens lorsqu’un sportif rapporte ce genre de symptômes. Comme si l’argent, la renommée, la médiatisation ou le fait d’avoir sa passion pour métier, étaient des barrages évidents à la dégradation de la santé psychique. Voire même à l’extrême, qu’il serait mal venu lorsqu’on a la chance d’avoir « cette vie là », de se sentir moins bien, alors que certains ont des vies en apparence plus difficile et font avec. Ces commentaires, sont le reflet des stéréotypes erronés qui restent chevillés à la santé psychique. Lorsqu’on travaille dans ce milieu-là, on sait au combien la dépression par exemple ne se préoccupe pas de votre compte en banque, de votre nombre de followers ou de votre apparente « vie de rêve » pour frapper.
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Dans un second temps, lorsqu’on se penche sur la vie d’un sportif de haut niveau, on est encore plus surpris que les gens tombent de haut quand leur idole fait part de son mal être. Et pourtant. Quitter sa famille ou son pays parfois très jeune, sacrifier une vie sociale ou amoureuse peut compatible avec sa formation, viser une élite qui fait plus de déçus que d’heureux, être jugé constamment sur les réseaux sociaux, voyager parfois quasiment toutes les semaines, gagner de l’argent parfois si vite que s’en est étourdissant, devoir donner et avoir un avis sur tous les sujets politiques et sociétaux (alors même qu’on vous a demandé de stopper ou d’écourter vos études), faire face à la blessure et parfois à l’oubli qui suit… Je continue la liste ou cela paraît évident que cette population de sportif à oh combien toutes les raisons du monde de voir sa santé psychique mis à mal ?
Et pourtant, on s’en occupe peu voire pas. On parle de préparation mentale avant de parler de « mental » tout court. On explique que dans ce milieu de la performance, les émotions vous mettent sur le banc de touche. Que tout ce qui commence par psy fait peur et est mis de côté sous prétexte de pathologiser et de faire « perdre sa confiance en soi ».
D’un regard de professionnel extérieur, voilà quelle impression cela donne. Que cette population de sportif dont la santé psychique peut être mise à rude épreuve, a paradoxalement le moins accès aux outils existant pour stabiliser celle-ci. Et ceci pour des raisons qui neuf fois sur dix sont mauvaises et contestables.
Moi ça m’interpelle. Et vous ?
Pair aidant - Auteur - Orateur Le rétablissement est un processus non linéaire, qui permet à une personne atteinte de troubles psychiques, de mener une vie satisfaisante en fonction de ses propres critères.
1 ansTout à fait d’accord avec toi Nicolas, pour avoir connu le sport études sans percer, je sais combien la pression extérieure, mais aussi celle que l’on se met peuvent être dévastatrices. Je suis comme toi surpris que les gens s’étonnent de la présence de troubles chez les sportifs. On pourra pour finir sur une note d’espoir, dire que la parole semble se libérer doucement, celle de Naomi Osaka alors numéro deux mondiale de tennis qui a mis sa carrière entre parenthèse pour préserver sa santé mentale celle de Simone Billes, peut être la plus grande gymnaste de l’histoire qui a fait de même. Mickael Phelps (sûrement le plus grand nageur de l’histoire), Mark Cavendish (cycliste), Per Mertesacker (footballeur), Noah Lyles (sprinter de talent), Jackie Baumann (sauteur de haies). Ce sont des pionniers, gageons qu’il y en ait beacoup d’autres.
Directrice médicale
1 ansEt quand on connaît le monde sportif, on ne peut que reconnaître que vos propos de naïf sont bien à propos !
La santé , un bien précieux pour tous ✨🌎💕 🔺 Chargée de projet coordination des soins
1 ansBonsoir Nicolas Rainteau , Quand on ne connaît pas le monde sportif , nous pourrions croire effectivement que l’éthique va être top. Or cela n’est pas toujours le cas , et en compétition c’est un « combat » mental . Pour ce qui concerne des compétences physiques , là aussi combien ont mal au dos .... alors que abdos sont beaucoup travaillés . Oui, la santé et la santé mentale des sportifs est encore un sujet un peu tabou même si certains parlent de leur dépression , des entraînements . C’est très intéressant de réfléchir aux sportifs , à l’aube des JO . Merci pour votre post , je vous souhaite une très bonne soirée.
📖Auteur de «Soyez Réhab » Psychiatre chez CHS Bassens. Unité de rehab SM@RT 73
1 ansAnthony Mette (PhD) Thomas Sammut Mickaël Campo Yassin Nfaoui Léna Marjak Emilie Musnier-Thienot Jérémy Schachner