SANTE CONNECTEE : EST-ON EN TRAIN DE PASSER A COTE DE L’ESSENTIEL ?
Bristol Myers Squibb et l’EDHEC Business School publient leur premier baromètre dans le cadre de la nouvelle Chaire de recherche « Management in Innovative Health » créée en mai 2022 et qui qui vise à contribuer à l’accélération de l’innovation dans le domaine de la e-santé au bénéfice des patients.
Un baromètre de la santé connectée réalisé par l’institut de sondage IPSOS et mis en place pour fournir aux acteurs de l’écosystème de la santé des données inédites sur les évolutions comportementales et la perception des Français vis-à-vis des solutions digitales en santé.
Si le baromètre apporte de nombreux éclairages sur les attentes et les attitudes des français vis à vis de la santé connectées, il soulève aussi des réflexions, voire des inquiétudes, sur les impacts sur notre système de santé.
Outre le manque d’information, 3 idées fortes ressortent de ce baromètre :
· L’iniquité d’accès à la santé malgré sa digitalisation : les plus touchés par la maladie sont les moins enclins à utiliser la santé connectée
· Le privé moins légitime : pour 67% des Français, les services publics sont les plus légitimes pour proposer des services ou des solutions digitales en santé
· L’humain avant l’algorithme : 91% des Français font confiance à leur médecin traitant pour établir un diagnostic quand seulement 24% déclarent faire confiance à un algorithme.
Mais un autre aspect me semble émerger : la santé connectée peine à servir ceux qui en ont le plus besoin…
Décryptage.
Santé connectée : un baromètre annuel pour offrir aux différents acteurs de l’écosystème un aperçu régulier de la perception des Français sur cette révolution
Le numérique prend une place grandissante dans le domaine de la santé et la pandémie a accéléré le recours à la téléconsultation des Français mais aussi l’utilisation de solutions connectées comme des objets et/ou des applications mobiles.
Mais cette innovation en e-santé peut sembler complexe au grand public et les impacts de la révolution numérique sur cet écosystème doivent être évalués pour que celle-ci puisse déboucher sur une plus grande efficience du système de soin pour les patients.
Dans le cadre de la création de la chaire « Management in Innovative Health », Bristol Myers Squibb et l’EDHEC Business School ont souhaité mettre en place un baromètre annuel de la santé connectée.
Menée par les équipes IPSOS auprès de 1000 Français âgés de 18 à 74 ans du 4 au 9 novembre 2022, cette première vague du baromètre montre leurs attentes en termes d’information, de pédagogie et de réassurance quant à l’utilisation de la santé connectée.
Pour rappel, la santé connectée a été définie dans un livre blanc du Conseil National de l’Ordre des Médecins il y a déjà quelques années et regroupe les domaines de la télésanté, des applications mobiles et des objets connectés dédiés à la santé.
Avec le déploiement d’une offre pléthorique - plus de 350 000 applications mobiles santé/bien être dans les stores avec, en 2020, des chiffres qui montraient un accroissement de plus de 250 applications/jour et un taux d’équipement en smartphone et autres objets connectés qui explose – il est indispensable de prendre le temps de comprendre l’évolution, voire la révolution, en marche pour en mesurer les impacts, apports et limites.
« A travers les travaux de la Chaire, l’EDHEC vise à contribuer à l’accélération des connaissances en matière de santé connectée pour précisément comprendre les nouveaux usages et acteurs à l’origine de transformations majeures des modèles actuels dans la santé. Il s’agit pour l’EDHEC d’ouvrir le débat de société relatif à l’accès de ces solutions digitalisées pour une médecine plus inclusive, quel que soit son âge, son statut social et son niveau d’éducation »,
explique Loick Menvielle, professeur à l’EDHEC et directeur de la Chaire « Management in Innovative Health ».
Santé connectée : une bonne acceptabilité et des usages relativement bien installés…
Les résultats du 1er baromètre Ipsos pour Bristol Myers Squibb et l’EDHEC montrent que l’attrait et l’utilisation de la santé connectée varient selon les profils d’utilisateurs : urbains, ruraux, jeunes ou encore personnes atteintes de pathologies graves.
76% des répondants se disent prêts à utiliser la santé connectée :
· mais 46% ne le feraient que sous certaines conditions (sécurité, accès limité etc ).
· Les moins prêts à utiliser davantage les outils en santé connectés sont les plus âgés (55 ans et plus), les ruraux et les moins éduqués.
Une majorité de Français a déjà utilisé des outils de santé connectée :
· Aujourd’hui, 57% des Français ont déjà utilisé un tensiomètre connecté et 76% des personnes atteintes de maladies graves/chroniques.
· Si 45% des Français ont déjà utilisé la téléconsultation, seuls 6% l’utilisent souvent.
· De leur côté, 81% des professionnels de santé l’ont déjà utilisée et 30% l’utilisent même souvent.
· Concernant les applications de suivi de santé, si 52% des Français déclarent en avoir déjà utilisé une, seuls 21% l’utilisent souvent. 59% des personnes atteintes de maladies graves/chroniques quant à elles déclarent avoir déjà utilisé une application de santé.
· Parmi les 34% de Français utilisant au moins occasionnellement une application de suivi de santé il y a une part plus importante d’urbains (37%) par rapport aux ruraux (32%) et de personnes atteintes de maladies graves/chroniques : troubles cardio-vasculaires (42%), problèmes respiratoires (44%), diabète (46%).
21 % utilisent au moins occasionnellement la téléconsultation :
· Les personnes atteintes de maladies graves utilisent plus régulièrement la téléconsultation :
o diabète (34%),
o problèmes respiratoires (39%)
o troubles cardio-vasculaires (45%)
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Une bonne acceptabilité et des usages qui se développent. Une lecture superficielle du baromètre laisserait à penser que tout va bien dans le meilleur des mondes… mais le croisement des données montre que la santé connectée peine à servir ceux qui en ont le plus besoin et suscite toujours des craintes auprès des Français concernant notamment le traitement des données.
…mais de nombreuses questions restent en suspens !
1. La santé connectée peine à traiter les inégalités de santé.
La représentativité de l’échantillon fait ressortir de nombreuses informations :
- Plus d’1 personne / 2 parmi les plus de 55 ans déclare avoir une pathologie qui nécessite un suivi médical.
- Les personnes qui ont un niveau de scolarité inférieur au Bac sont plus nombreuses à souffrir d’une pathologie (et notamment l’hypertension artérielle et l’obésité).
- Une partie de la population à une appétence mitigée pour le digital : population plus âgée (55-64 ans), féminine, rurale, niveau d’éducation inférieur au Baccalauréat, CSP-
- Près d’1 personne sur 3 dit avoir un accès difficile au médecin (4 jours ou plus pour avoir un rendez-vous médical), et cela semble toucher d’autant plus les personnes de 65 ans et plus (42%). L’accès plus facile est davantage réservé aux urbains et CSP+/et plus éduqués
En résumé ceux qui pourraient le plus bénéficier de la santé connectée sont les personnes les plus âgées, celles les moins éduquées, celles qui vivent en milieu rural... pour autant ce sont les personnes qui ont le moins d’appétence pour le digital.
Et si la santé connectée se développe grâce à une forte acceptabilité, 64% des Français ne se sentent pas bien informés et c’est particulièrement vrai dans la population qui serait plus à même d’en bénéficier :
· 73% chez les + 45 ans, 73% chez les ruraux, 79% chez les personnes ayant un accès difficile au soin et 76% chez les personnes avec un niveau d’éducation inférieur au bac.
Une iniquité d’accès à la santé demeure donc malgré sa digitalisation
Cela se confirme lorsque l’on va dans le détail de la téléconsultation, celle-ci n’a déjà été utilisée que par 28% des + 65 ans et 40% des ruraux alors qu’elle a été utilisée par 48% des -55 ans et 50% des urbains.
2. Des craintes persistent face à la santé connectée
Pour 46% des Français, l’utilisation de la santé connectée ne peut se faire que sous certaines conditions.
· Si 84% des Français se sentent en confiance pour transmettre leurs données de santé à leur médecin traitant, aux hôpitaux publics (65%) et à l’Assurance Maladie (62%), ils sont seulement 27% à être prêts les transmettre à leur assureur, 24% aux entreprises du médicament, 17% aux GAFAM et 16% à leurs banque et employeur.
· Plus d’1 / 3 des Français (36%) expriment des craintes quant à la sécurité et au détournement des données Cette crainte a tendance à se renforcer avec l’âge. Elle est partagée par 43% des 55-74 ans interrogés.
· Les services publics sont perçus comme les plus légitimes pour proposer des services ou des solutions digitales en santé pour 67% des Français.
o La légitimité est très réduite pour les entreprises du médicament (15%), les entreprises technologiques françaises (14%), les entreprises technologiques internationales (13%) et les GAFAM (7%).
3. L’humain reste prédominant dans la confiance dans le système de santé
35% des Français interrogés craignent que le développement de la santé connectée implique une diminution des interactions sociales. Ce sentiment est renforcé chez les femmes, où on atteint 41% et chez les 55-64 ans (42%).
76% des Français font confiance à leur médecin traitant pour établir un diagnostic. Alors que seuls 9% déclarent faire confiance à un algorithme. Parallèlement, 75% des Français font confiance à leur médecin traitant dans le suivi du traitement contre 7% à un algorithme
«La crise sanitaire a mis en exergue la nécessité de proposer, en marge des traitements innovants, des services associés destinés à améliorer la prise en charge des patients, le suivi et la coordination des soins, »
souligne Christophe Durand, Président de Bristol Myers Squibb France .
« Les outils de santé connectées, pour être acceptés et utilisés doivent être conçus en lien avec les associations de patients pour comprendre leurs besoins mais également avec les professionnels de santé ».
Bristol Myers Squibb, 6e entreprise biopharmaceutique mondiale, évolue à l’avant-garde des progrès scientifiques et thérapeutiques, essentiellement dans des maladies graves, comme le cancer et les maladies cardiovasculaires, pour rendre l’innovation disponible aux patients le plus rapidement possible. Son utilisation des technologies numériques a accéléré la découverte de médicaments et a contribué au doublement de la taille de son portefeuille de molécules en développement ces 2 dernières années. Le machine learning et l’intelligence artificielle permettent en effet d’optimiser le développement clinique des molécules et modéliser leur utilisation dans des études cliniques. C’est par exemple l’objet du partenariat stratégique conclu avec la licorne franco-américaine Owkin.
Ce baromètre est une belle initiative que Bristol Myers Squibb et l’EDHEC Business School ont dans le cadre de cette nouvelle Chaire de recherche « Management in Innovative Health » et qui contribuera sans aucun doute à alimenter les réflexions et évolutions sur la place de la santé connectée dans notre système de santé.
Vivement la prochaine édition !
Post réalisé suite à la conférence de presse en partenariat avec Bristol Myers Squibb et EDHEC business school
Global Head Digital Healthcare at Abbott (Medicines)
1 ansAujourd’hui je ne travaille plus que pour les pays émergents. Le paradoxe est de voir que la santé digitale s’y développe plus rapidement : télémédecine, e-pharmacie… sans déchaîner plus d’émotions que nécessaire. Une des explications qui me vient à l’esprit est qu’il est très difficile voire pratiquement impossible de faire bouger des systèmes de santé qui fonctionnent déjà relativement bien (France / EU). La conduite du changement est difficile. Dans les pays émergents, les systèmes de santé fonctionnent moins bien, les patients sont globalement très connectés et chacun est donc davantage prêt à accepter de nouvelles options si elles font le job. De fait, ne sommes-nous pas dans la situation « J’ai déjà un Minitel, pourquoi passer à internet ? »
Consultant en Affaires Publiques - Santé Conférencier, Membre de la Cellule Ethique du Numérique en Santé, Chargé de Cours Droit de la Santé
1 ansEncore une fois, on pense patient mais sans forcement les interroger ou leur faire tester les solutions que l'on a pris plaisir à développer. Ou est le sens pratique ? Comment gérer les codes d'authentification multiples lorsque la main tremble, la vue faiblit et la fièvre gagne. Comment prendre rdv en ligne/application avec une ordonnance d'IRM cérébrale lorsque l'option possible est IRM du crâne ? Comment prendre un RDV médical via une application bien connue si on n'a pas de CB ? (et même si ALD il faut faire l'affaire de frais etc..). Que la connexion n'est pas bonne, que le SMARTPHONE n'est pas récent (J'ai vu que le téléphone à clapet revenait à la mode chez les jeunes). Ou que même sur Mon Espace Santé que je promeus, j'ai passé la soirée à lire les nouvelles conditions générales après une mise à jour... Le patient veut quelque chose qui soit simple, ergonomique, logique, non redondant, utile, efficace et n'être ni tracé, ni jugé, ni assailli de pub. Voilà le cahier des charges en français avant de le traduire en Javascript, Python ou C++