Sens Unique ou Sens Interdit ?

Sens Unique ou Sens Interdit ?

Au Moyen-âge, dans une carrière de pierres, un pauvre homme cassait des cailloux avec une lourde masse. On lui demanda ce qu’il faisait, il marmonna d’un air désespéré « je casse des cailloux, c’est très dur ».

A sa gauche, un autre homme cassait lui aussi des cailloux, mais il allait deux fois plus vite ! Il affirma d’un air déterminé : « Je nourris ma famille ! »

Un troisième, allait encore bien plus vite ! Il cassait les cailloux à toute vitesse, sans sembler vouloir s’arrêter. Il proclama passionnément : « Je construis une cathédrale ! »


Cette métaphore du bâtisseur de cathédrale, illustre bien l’effet fondamental du Sens que l’on trouve -ou non- dans ce que l’on fait. 


Dans un passé récent, les problématiques classiques de Coaching tournaient souvent autour de la gestion de son parcours pro, du management, de la quête du Graal qu’était alors un poste convoité ou une expatriation dans un pays rêvé.

Depuis quelques années, la recherche de Sens est devenue un thème récurrent de Coaching. 


Sortons un instant du placard la fameuse pyramide des besoins de Abraham Maslow, qui date de 1943:

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Le besoin de Sens n’avait pas été formulé en tant que tel par Maslow. Il se situerait probablement en haut de la pyramide, au niveau des besoins d’accomplissement, avec peut-être une dimension touchant partiellement aux besoins d’estime voire aux besoins d’appartenance.

Rappelons que pour Maslow, il n’est pas nécessaire qu’un besoin soit satisfait à 100% pour qu’apparaisse le besoin du niveau supérieur, il suffit qu’il soit « plutôt bien satisfait ». En revanche, si un besoin n’est que très imparfaitement satisfait, il est peu probable que le besoin du niveau supérieur soit très fort.


D’après les enseignements de Maslow, l’apparition récente du besoin de Sens serait-elle la conséquence de l’atteinte d’un niveau de satisfaction important sur les besoins inférieurs ?

Il est vrai qu’en 1943, il est peu probable que la recherche de Sens ait été haut placée sur la liste des priorités des contemporains !


En gros, la recherche de Sens serait un besoin de « privilégiés », qui ont déjà fortement satisfait leurs besoins physiologiques, de sécurité, d’appartenance, et d’estime ?

Cette approche ne résiste pas à la chronologie : L’apparition du besoin de Sens est récente, et ne semble pas correspondre à un progrès dans la satisfaction des autres besoins, qui serait soudainement intervenu ces dernières années.


S’agit-il alors plutôt d’un phénomène générationnel ? 

Il est vrai que la jeunesse est souvent plus réceptive que ses ainés à des aspects moins matériels. On la retrouve davantage engagée pour de nobles causes, dans la défense de l’environnement, des libertés ou dans le domaine social. 

Mais est-ce que ce n’est pas là, l’apanage de la jeunesse à travers les époques ? Était-ce vraiment différent sur les barricades de Mai 1968, à Woodstock, dans les manifestations anti-nucléaires des années 70-80 ?


Et dans ma pratique de coaching, la question de la recherche de Sens se rencontre également chez des personnes d’âge mûr, à des postes parfois élevés. Ce n’est en aucun cas l’exclusivité d’une classe d’âge.

N’est-ce pas simplement une combinaison d’éléments, qu’on pourrait résumer de manière lapidaire comme étant « liés à l’époque » ? 


D’une manière générale, les besoins primaires des personnes en poste sont plutôt satisfaits. Mais les modèles ont changé. Certains ne rêvent plus forcément, comme par le passé, d’un poste plus élevé, d’une meilleure rémunération, ou plus précisément certains ne souhaitent pas toujours faire les efforts nécessaires pour obtenir et conserver ce type de situation. 


Les « modèles » d’aujourd’hui font le tour du monde sur un bateau ou en camping-car, trouvent une activité qui conjugue passion/hobby et business, sont entrepreneurs et paraissent gérer leur temps comme bon leur semble. Les étudiants commencent par une année de « césure » avant de commencer à travailler. 

Les valeurs « Temps Libre » et « Liberté » ont souvent pris le pas sur les valeurs traditionnelles « Travail » ou « Position Sociale ». 


Dans ce contexte, la quête de Sens prend justement tout son Sens !


Elle joue un rôle déterminant dans les facteurs de Motivation au travail, quand les anciennes recettes (carotte/bâton, salaire, promotion, reconnaissance) ne suffisent plus. 

Dans ma pratique du Coaching, j’accompagne souvent des dirigeants ou des managers, ou encore des experts, à (re)trouver le Sens dans leur mission. Pris dans l’engrenage de la pression du quotidien, le « nez dans le guidon », ils commencent à perdre la « big picture ». 

Il arrive parfois qu’ils concluent qu’ils ne sont plus à leur place et déclenchent un autre projet. Mais bien souvent, ils ont simplement perdu de vue qu’ils étaient en train de « bâtir une cathédrale » ! 

Et après ce travail sur eux-mêmes, ayant retrouvé le Sens qui leur manquait, ils repartent avec beaucoup plus de sérénité pour atteindre leurs objectifs à leur poste.


C’est pour moi un émerveillement sans cesse renouvelé, de voir mes clients positivement transformés dans leur relation à leur travail.

C’est ma Cathédrale à moi !

Emmanuelle Fallourd

Leadership & Energy Coach, Facilitator

1 ans

Merci Michele Raulin pour ce bel article. Ta reference à Maslow me fait penser au modèle de Barrett Values Centre - une belle extension de la pyramide… en sablier: utiliser notre temps pour aller au-delà de soi, donner du sens, contribuer et remplir sa mission de vie

Benoit Raulin

Consultant Stratégie - Finance ; Auteur de nouvelles et de romans

1 ans

C'est tellement vrai! Le besoin de Sens concerne toutes les générations et tous les métiers. C'est certainement le facteur de motivation le plus durable.

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