Simplifier réellement les prélèvements en France.
Débat :
Va se poser la question de l’éventuelle refonte de la fiscalité française dont la complexité et surtout l’instabilité n’est plus à prouver. Cependant, avant de se poser la question de combien doit on taxer, peut-être faut il se demander ce que l’on taxe et comment le fait-on ? Afin de cantonner ce débat difficile, on va se restreindre aux prélèvements (fiscaux et sociaux) supportés par les ménages et non ceux payés par les entreprises. Il faut cependant souligner que ceux cette distinction est assez factice car les entreprises ont une interdiction de vente à perte (articles L442-2 et L420-5 du code du commerce) ce qui signifie donc que la société a obligation dans son prix de revient facturé de prendre en compte les impositions qu’elle supporte avant l’impôt sur les sociétés…
Je vais tenter de recenser les problèmes rencontrés et proposer des solutions simples. Aimant cependant les digressions, comme beaucoup de personnes ayant suivi une formation juridique, je mettrai en italique ce qui relève de l’exemple ou de la précision non indispensable.
La base imposable (l’assiette dans le jargon culinaire qu’affectionne la France) permet de définir ce qui va être imposé. Il peut s’agir de ce que l’on consomme (achat de produit), ce que l’on gagne ou ce que l’on possède.
Si l’on sait ce que l’on consomme (enfin pas toujours mais on sait ce que l’on paie pour cela…) et l’on sait à peu près ce que l’on possède, la notion de revenu est assez complexe par moment.
Le dictionnaire Larousse indique : Ce qui est perçu, en nature ou en monnaie, par quelqu'un ou une collectivité comme fruit d'un capital placé (intérêt sur un capital prêté, dividende sur un capital engagé), ou comme la rémunération d'une activité (profit) ou d'un travail (salaire).
Si dans la plupart des cas simples, intuitivement, la définition du revenu ne pose pas de problème, j’identifie rapidement quelques situations ou cette notion est problématique et qui donne lieu à des injustices fiscales en un sens ou en un autre. Afin de tenter de couvrir toutes le situations, l’impôt sur le revenu avait réuni pas moins de sept impôts différents et le législateur a rajouté au fur et à mesure tous les nouveaux cas de figure depuis 100 ans…
- Ainsi, s’il ne fait pas doute que les gains du loto ne sont pas des revenus, les gains de jeu, comme le poker, ont tendance lorsqu’ils sont habituels, à être considérés comme des revenus par l’administration fiscale et la jurisprudence.
- Dans le cas de troc, on peut considérer que c’est un échange ou la vente de deux biens de mêmes valeurs entre les mêmes personnes ce qui, juridiquement, devrait donner lieu à perception d’impôt.
- Une plus-value latente sur une assurance-vie (donc l’augmentation de sa valeur en dehors de tout rachat) n’est pas considérée comme un revenu… Cependant, depuis quelques années, pour la partie représentative du fonds en euros, il y a quand même une perception au fil de l’eau des cotisations sociales…
- Une société qui ne distribue pas ses bénéfices à ses actionnaires permet à ces derniers d’avoir une augmentation de valeur de leurs titres. Si cela ne pose pas de problème dans les cas de réinvestissement (et est même un élément nécessaire à l’économie) en est-il de même quand les personnes qui en ont les moyens laissent cet argent encapsulé dans une structure afin de ne pas officiellement dégager de revenus ? Ces considérations ont poussé le législateur à donner à l’administration le pouvoir de requalifier tout cela dans certaines circonstances ajoutant une strate de complexité à des impositions déjà compliquées…
Une fois la base définie, il faut voir quel est le taux. Celui-ci peut être progressif (plus le revenu est haut, plus l’imposition sera forte) ou forfaitaire (même taux pour tout le monde).
Il faut ensuite retrancher à ces impôts les éventuelles réductions d’impôts ou crédits d’impôts qui peuvent pour les premiers êtres déduits des impôts ou pour les deuxièmes, permettre d’obtenir un remboursement si l’impôt payé n’est pas suffisant… Pour l’amusement, il faut savoir que ces derniers éléments sont globalement plafonnés…. Pour certains !
Pour les impôts sur le capital, il y a les revenus du capital et la possession de ce dernier. Dans le premier cas, toujours dans une approche schizophrénique, on admet des déductions pour les revenus en fonction de la durée de détention pour l’immobilier sur 22 ans pour l’impôt sur le revenu et 30 ans pour les cotisations sociales et cela quelque soit la valeur de l’inflation. Par contre, pour les placements financiers mêmes favorables (en dehors des produits totalement défiscalisés), les plus-values sont imposables, à taux réduit certes, mais toujours imposables.
L’inflation d’ailleurs est une problématique à soulever car avec cette dernière. Vous pouvez acheter moins de biens et de services pour un même montant d’euros. Bref, vous mettez 100 000 euros de coté, et, après une période ayant connu une inflation de 10%, vous ne pourrez plus acheter que l’équivalent de 90 000 euros. Dis autrement, il faudra 110 000 euros pour acheter l’équivalent de 100 000 euros avant inflation. Ces 10 000 euros sont ils des gains ou la simple compensation de l’usure de l’argent ?
Concernant la détention du capital, on trouve des impôts comme l’IFI, la taxe foncière ou les droits de succession. Pour ces derniers, ce n’est pas une imposition sur les gains mais bien sur un stock possédé. Ainsi, le solde d’un revenu après impôts se trouve lui-même soumis à des droits…
Ce mille-feuilles qui s’est constitué en un siècle ne peut pas juste être adapté mais doit totalement être réformé.
Quelles propositions ?
Notion large de revenus :
Il faut chaque année établir la totalité des gains réalisés et latents des contribuables, quelque soit la capsule de détention avec une liste limitative de biens exonérés (habitation principale, livret A, par exemple). Tout enrichissement est considéré comme un revenu. Seront déductible toutes les charges permettant d’obtenir ces revenus et éventuellement l’inflation.
Imposition progressive universelle globale
Ensuite il faut imposer immédiatement les gains réalisés et pratiquer un report pour les gains latents. Les moins-values de toutes natures s’imputeront sans limitation de durée sur les plus-values constatées. Les contribuables seront soumis à une imposition progressive et pourront choisir d’imposer immédiatement tout ou parte de leurs plus-values latentes. Lors de la réalisation des gains latents ou de certains faits comme le départ du pays ou le décès, ces derniers deviendront imposables. Ainsi tous les revenus seront logés à la même enseigne. Cela pourrait remplacer les taxes sur les biens immobiliers, l’IFI, les droits de successions les cotisations sociales et l’impôt sur le revenu.
En fonction des sensibilités politiques le taux pourra varier (et éventuellement être différencié pour les gains latents) et les limites être définies. Par contre, l’assiette ne devra pas être modifiée sans, par exemple, une majorité parlementaire renforcée…
Autres simplifications :
Dans le même objectif de simplification, je pense que les fiches de paie pourraient être ramener à quelques lignes car il suffit de savoir pour la plupart des salariés quelles sont les cotisations patronales (avec une possible sous distinction, retraite, prévoyance, famille), les cotisations salariales et les impositions supportées…. Cela ferait donc 5 ou 6 lignes avec deux colonnes… A quoi bon savoir que tel pourcentage va à la sécurité sociale alors que tout déficit ou excédent ne sera pas redistribué aux contribuables mais utilisé par l’Etat dans d’autres secteurs comme le remboursement de la dette ? Un site internet pourrait permettre de faire le suivi de la répartition effective.
Concernant les crédits d’impôts, il suffit de réduire les charges sociales, la Tva ou les frais de mutations sur les dépenses concernées. Les avantages fiscaux ainsi accordés seront considérés comme un revenu latent à déclarer…
Enfin, et c’est un vœu pieux, il serait nécessaire que cette simplification s’accompagne d’une assistance des contribuables et des professionnels par l’administration fiscale qui soit opposable à cette dernière afin d’arriver à un impôt lisible, pérenne et ne pouvant être remis en cause. Cela me semble des corolaires indispensables au consentement à l’impôt.