Soeur de coeur

Soeur de coeur

"Léonie, c'est ma sœur", ai-je affirmé.

"Non, Léonie n'est pas ta sœur, c'est ma sœur !".

"Non, je te dis que Léonie est ma sœur à moi. D'accord, allons lui demander…"

Je m’appelle Anaïse, je suis fille unique et je n'ai jamais eu de sœur.

Ce jour-là, j'ai découvert que Léonie n'était pas ma sœur biologique, mais plutôt ma cousine qui avait toujours vécu avec nous, du moins aussi loin que remontaient mes souvenirs d'enfance. J'ai été choquée d'apprendre qu'elle avait une autre famille, et surtout d'autres sœurs qui me faisaient passer pour une usurpatrice

Aujourd'hui, je souris en repensant à cet échange passionné qui remonte à plus de 30 ans avec ma cousine Jojo, la "vraie" sœur de Léonie. Mais à l'époque, j'avais le cœur brisé, car j'ai toujours souhaité avoir une sœur, ma propre sœur. C’est vrai que j'ai deux adorables frères, mais j'ai toujours ressenti un vide car la relation frère-sœur n’est pas pareille...

J’étais envieuse quand je voyais la complicité de mes copines avec leurs sœurs, ça me donnait envie moi aussi d’avoir quelqu’un avec qui tout partager, des tâches ménagères aux secrets les plus intimes en passant par les conseils vestimentaires.

Je voulais une alter ego qui aurait pu couvrir mes frasques auprès des parents, m’écouter me plaindre ou m’extasier toute la nuit, bref partager un lien émotionnel qui ne se traduit pas par des mots, mais par des regards ou des gestes.

J'idéalisais tellement la relation entre sœurs que je voulais la vivre à tout prix. J'ai donc cherché à recréer des liens de substitution avec certaines amies et cousines que j’avais en ligne de mire. Mais je crois que j'en faisais trop, j’ai dû être envahissante, maladroite, et possessive dans mes relations avec ses "sœurs" et elles m’ont rappelé subtilement que je n'étais pas la "vraie" sœur, car le lien du sang primait.

Je vivais dans un monde de bisounours, où je pensais que les sœurs étaient des anges... et je n'imaginais pas un seul instant qu'il puisse y avoir aussi des sœurs sorcières, des sœurs jalouses, des sœurs hypocrites, des sœurs froides, des sœurs indifférentes...

Je crois que mes plus grandes déceptions affectives ne sont pas amoureuses, mais proviennent de celles que j'ai à tort considérées comme mes sœurs... J'ai ma part de responsabilité, bien sûr, mais au moins aujourd'hui, j'ai réussi à guérir de ce besoin obsessionnel d'avoir une sœur.

Je respecte le choix de Dieu de m’avoir fait naître fille unique, et désormais, je sais quelle est ma place. Je ne considère plus personne comme ma sœur, mes cousines sont mes cousines, mes amies sont juste des amies, sans amalgames ni désillusions, ni désamour...

Eh oui, mon cheminement vers le détachement m'apprend la capacité d'aimer sans posséder, d'être présent sans s'attacher, et de laisser partir sans résister... Et je me porte mieux.

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